NETTALI.COM - Même si en public, les autorités sénégalaises rejettent en bloc l’homosexualité, dans leurs faits et gestes, elles sont adeptes d’un jeu clair-obscur. Elles en ont encore administré la preuve ce vendredi. Le Conseil des droits de l’Homme des Nations-Unies a, en effet, adopté, le même jour, la résolution visant à renouveler le mandat de l'Expert indépendant spécialisé dans la protection contre la violence et la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre. Le hic est que si des pays comme le Nigéria et la Chine, par exemple, ont adopté une position tranchée en rejetant systématiquement ce projet, le Sénégal, lui, a décidé de s’abstenir.
L’Organisation des Nations-Unies (Onu), qui veut mettre fin aux violences liées à l’orientation sexuelle, a adopté ce vendredi à Genève, en Conseil des droits de l’Homme, la résolution condamnant toutes les violences sur les lesbiennes, les gays, les bisexuels et les transgenres et les personnes intersexes, par 27 voix contre 12 et sept abstentions, après un débat de plusieurs heures et plus d'une quinzaine de votes distincts.
Le Sénégal, un pays à majorité musulmane (95%), a adopté une position mitigée sur cette question, en décidant de s’abstenir. Une position qui intrigue plus d’un.
En effet, un peu plus tôt, le Nigéria, s'exprimant au nom de l'Organisation de la coopération islamique (à l'exception de l'Albanie) dont le Sénégal est membre, a indiqué que les Etats de ce groupe qui sont membres du Conseil, soutiennent eux aussi la motion de non-action, en raison du manque de clarté du texte. «Ce texte ne définit pas ce qu'est une orientation sexuelle, ni ce qu'est une discrimination», avait affirmé la délégation nigériane, tout en ajoutant que pour ces raisons, un mandat d'expert indépendant tel qu'envisagé dans ce projet, «n'est pas pertinent, d'autant plus que cet expert pourrait avoir la compétence d'interférer dans les législations des Etats souverains.»
Toujours selon la délégation nigériane, une telle question, qui ne jouit pas d'un consensus international, ne saurait être validée par une simple majorité du Conseil des droits de l'Homme, d'autant que les coauteurs n'ont pas consulté toutes les délégations. «Il faut respecter les différences culturelles, les valeurs et les systèmes juridiques de chaque Etat. Ce texte essaie de créer de la rancœur au sein du Conseil.»
Naturellement, à l’heure du vote, le Nigéria s’est opposé au texte, tout comme la Chine.
Seydi Gassama, lui, pense que l’abstention du Sénégal au vote du renouvellement du mandat de l’expert indépendant des Nations-Unies est la plus raisonnable pour notre pays. «Voter oui mettrait le gouvernement dans une situation inconfortable avec le peuple. Et si le Sénégal vote non, cela signifie qu’il cautionne les violences contre les homosexuels. Alors qu’on peut être contre la promotion ou la dépénalisation de l’homosexualité, mais aucun État au monde ne devrait cautionner les violences contre les homosexuels. Donc, la position du Sénégal est l’attitude qui sied à un État qui veut respecter, d’un côté, ses engagements internationaux, et de l’autre côté, les aspirations de son peuple», a-t-il justifié.