NETTALI.COM - Depuis que la mairesse de Dakar a formulé une demande dans ce sens, au mois de mai, à la cérémonie inaugurale du dialogue politique, des sorties sont combinées dans la perspective d’une libération de Khalifa Sall. Toutefois, le format de cet élargissement peut être sujet à polémique. Le socialiste, pour rester dans la course à la succession de Macky, souhaite une amnistie et non une grâce présidentielle, similaire à celle qui a éloigné Karim Wade du landerneau politique sénégalais.
Prenant la parole à la cérémonie d’ouverture du dialogue politique en cours, Soham Wardini a, s’adressant au chef de l’Etat, exprimé son souhait de voir son prédécesseur être libéré dans les meilleurs délais. Un appel qui a reçu un écho favorable dans les oreilles du président Macky Sall. Celui-ci avait donné son accord de principe, non sans assujettir la satisfaction de cette demande au respect du principe sacro-saint de la séparation des pouvoirs.
Qu’à cela ne tienne, l’hypothèse a été étudiée par EnQuête lors de son édition du week-end dernier. Selon le journal, il y a des manœuvres au sommet pour faire libérer Khalifa Sall avant la Tabaski, puisqu’il n’y a plus d’obstacle juridique pour empêcher une grâce présidentielle. Nos confrères relient cette possibilité à l’une des dernières volontés de Ousmane Tanor Dieng et à un vent de décrispation qui souffle sur les relations entre le régime et la frange du Parti socialiste qui soutient l’ex-édile de la capitale, à la faveur du dialogue politique susmentionné.
Invité le 24 juillet dernier à l’émission Faram Facce, sur Tfm, le très bien introduit fondateur du quotidien L’As, Thierno Talla, a recommandé que cette libération soit effective avant la fête de la Tabaski.
Toutefois, le patron de presse n’a pas manqué de poser des réserves. Car il souligne que Macky Sall peut le gracier, « mais il ne va pas prendre le risque de l’amnistier », sous peine d’en faire un sérieux prétendre à même de remporter la présidentielle de 2024 et se venger. « Ce qui est valable pour Khalifa Sall, l’est aussi pour Karim Wade. Macky Sall ne va jamais prendre le risque de les amnistier », croit-il savoir.
«Khalifa Sall n’a jamais été demandeur d’une grâce »
Le patron du quotidien L’As n’a pas tout faux. Il faut être né de la dernière pluie pour croire qu’à ce jeu de la Barbichette, Macky Sall va lâcher prise sans avoir complètement neutralisé-politiquement s’entend-un adversaire gênant. Tout au plus, va-t-il réserver à l’ex-édile de la capitale le sort qui est celui de Karim Wade, qui a été gracié et éloigné de la scène politique, au terme de négociations souterraines sous des auspices qataries.
De sa cellule de Reubeuss, reniflant l’odeur funeste de la sauce à laquelle on affecte de le bouffer, Khalifa Sall pose ses conditions, sur fond de froids calculs. Il sait que sa libération est une épine qui sera tirée du pied de Macky Sall. Sous ce rapport, le régime, qui souffre déjà des contrecoups néfastes de l’endettement chronique et de la hausse généralisée des prix, a besoin d’un réchauffement pour jouir des retombées du dialogue, auquel ne participe qu’une partie de l’opposition, ayant, pour l’essentiel, battu campagne pour Idrissa Seck lors de la dernière présidentielle. Cette atmosphère rappelle la libération de l’opposant Abdoulaye Wade, en 1988, alors que Abdou Diouf ne pouvait s’offrir le luxe d’emprisonner un adversaire populaire en période d’ajustement structurel, marquée par un climat social délétère.
«Khalifa Sall n’a jamais été demandeur d’une grâce. Il ne prendra pas l’initiative de le faire. C’est un combat de principe. Il est clair et constant dans sa position. Ce n’est pas à lui de demander une grâce. Il a dit clairement qu’il ne demandera pas de grâce. (…) Il nous a défendus de le faire. C’est pour vous dire que c’est un combat de principe qu’il mène. Il appartient à ceux-là qui l’ont mis en prison de prendre la décision s’ils veulent le libérer », a déclaré un de ses avocats dans les colonnes de « emedia.sn ». Une position voisine de celle d’un Barthélemy Dias, qui fait partie des radicaux de l’entourage de premier cercle de l’ancien maire de Dakar.
En définitive, le choix de profils neutres, comme Alioune Tine, pour porter au chef de l’Etat la lettre demandant la mise en liberté de Khalifa indique que ça marchande serré en messe basse. A cet égard, toute erreur d’appréciation se paie cash. Macky Sall est dans une situation de double contrainte.