NETTALI.COM - Les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont promis samedi de mobiliser un milliard de dollars (898 millions d'euros) sur quatre ans pour lutter contre le jihadisme dans la région.
Un milliard de dollars sur quatre ans pour combattre le jihadisme : c'est la décision phare du sommet extraordinaire "de lutte contre le terrorisme" de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui s'est tenu, samedi 14 septembre, à Ouagadougou.
"Les débats nous ont permis d'adopter des décisions très fortes (...). La conférence (élargie au Tchad et à la Mauritanie) a adopté un plan d'action et de mobilisation de ressources à hauteur d'un milliard de dollars pour la lutte contre le terrorisme", a annoncé le président nigérien Mahamadou Issoufou à la clôture du sommet.
Le plan et son budget, qui fait appel uniquement à des ressources internes, seront présentés en décembre lors du prochain sommet de la Cédéao à Abuja mais l'argent qui sera versé dans un "pot commun" servira notamment à "renforcer les capacités opérationnelles" des armées nationales ainsi que des forces conjointes" comme le G5 Sahel ou la Force multinationale mixte du bassin du lac Tchad.
"Le G5 est loin d'être mort. Le communiqué final (du sommet) montre bien le soutien de la Cédéao au G5 Sahel et à la Force mixte du bassin du lac Tchad", a souligné le président nigérien, président en exercice de la Cédéao, alors que de nombreux observateurs annonçaient "les funérailles" du G5 au cours du sommet de Ouagadougou.
"Dans l'immédiat, ce sont elles (les forces du G5 Sahel et du bassin du lac Tchad) qui sont sur le terrain", a insisté le président Issoufou alors que le communiqué final évoque le "leadership de la Cédéao" et le recours à la force en attente de la Communauté ouest africaine.
"Aucun pays n'est à l'abri"
Dès l'ouverture du sommet, le président de la commission de la Cédéao, Jean-Claude Brou, a planté le décor en évoquant les "2 200 attaques ces quatre dernière années, les 11 500 morts, des milliers de blessés", "des millions de déplacés", une "activité économique considérablement affectée", des "conflits intercommunautaires exacerbés" au Sahel et une menace qui s'étend au Sud.
Le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré a souligné que "les menaces transcendent les frontières". "Aucun pays n'est à l'abri", a-t-il estimé, rappelant que "l'escalade de la violence a déclenché une crise humanitaire sans précédent" au Sahel et que "des écoles et infrastructures de santé (ont été) fermées et des symboles de l'État détruits" dans son pays.
La Force multinationale (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad) qui devait comprendre 5 000 hommes a été au centre des interrogations du sommet. L'idée de cette force, poussée par la France, était de faire monter en puissance les armées régionales pour épauler, voire à terme remplacer l'armée française, qui conduit au Sahel l'opération Barkhane (4 500 militaires) contre les jihadistes depuis 2014, dans le prolongement de l'intervention menée dans le Nord malien l'année précédente.
Or, les résultats du G5 Sahel sont pour le moment très minces, selon plusieurs analystes. "Quel est le résultat opérationnel du G5 ? Le peu qui a été décaissé (en sa faveur) a servi en frais de réunion, d'hôtels, de fonctionnement... Le G5 est presque à genoux", soulignait avant le sommet Mahamadou Savadogo, chercheur au Cerrad (Carrefour d'études et de recherche d'action pour la démocratie et le développement).
"La communauté internationale a des devoirs vis-à-vis du Sahel"
"La Minusma (Mission intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali, 13 000 hommes) et le G5 Sahel ne suffisent pas. Nous devons trouver des moyens de coordination plus élargis et plus efficaces", avait estimé le président ivoirien Alassane Ouattara.
Dans les conclusions du sommet, la Cédéao réclame d'ailleurs aux Nations unies "un mandat plus offensif de la Minusma", mandat qui "puisse permettre de lutter contre le terrorisme", a dit Mahamadou Issoufou
"La communauté internationale a des devoirs vis-à-vis du Sahel : c'est la communauté internationale qui est à la base de la crise libyenne", a-t-il estimé. "La communauté internationale ne peut détourner le regard et doit assumer ses responsabilités."
La Cédéao va aussi solliciter la Banque mondiale et le FMI pour que les dépenses sécuritaires soient "considérées comme des investissements" et solliciter les bailleurs de fonds occidentaux et arabes pour mieux lutter contre le jihadisme.
La Cédéao ne veut pas d'une réponse "militaire", jugée nécessaire mais pas suffisante. Celle-ci est "vaine sans un développement durable, inclusif et équitable", selon le président Kaboré.
France 24 avec AFP