NETTALI.COM – Il y a désormais au Sénégal une période post-Massalikul Jinaan, c’est-à-dire cette ère ouverte après l’inauguration de la mosquée des mourides de Dakar et qui a vu Macky Sall se retrouver avec Abdoulaye Wade et Khalifa Ababacar Sall sortir de prison après deux ans, six mois et vingt-deux jours de détention. Toutefois, ce vent de décrispation qui souffle sur le Sénégal ne fait pas que des heureux.
Coïncidence ou agenda politique bien calculé ? Les observateurs ne s’entendent pas sur l’analyse à faire de cette ère de décrispation que vit le Sénégal depuis le séjour du khalife général des mourides à Dakar. Toujours est-il que cette période post-inauguration de Massalikul Jinaan ne semble apporter que de bonnes nouvelles. Du moins chez de nombreux citoyens, mais aussi chez certains acteurs politiques. En fait, dans ces retrouvailles Wade-Macky puis la sortie de prison de Khalifa Ababacar Sall, il y a des gagnants, mais aussi des perdants.
C’est le vendredi 27 septembre que le Président Macky Sall et son prédécesseur, Me Abdoulaye Wade, surprennent leur monde en sortant de la mosquée Massalikul Jinaan, main dans la main. Une médiation du khalife général des mourides a permis aux deux hommes de dépasser un conflit qui dure depuis plus d’une décennie. Faut-il y voir un «deal» ? Certains le pensent fortement. Deal ou retrouvailles sincères entre un «père» et son «fils» ? Macky Sall sort comme le principal gagnant de cette affaire. Le président de la République obtient, d’après plusieurs de ses collaborateurs, ce qu’il cherche depuis un bon bout de temps. C’est-à-dire une réconciliation avec celui qui lui a tout donné en politique. D’ailleurs, vu l’âge très avancé de Wade, Macky Sall a toujours craint qu’un malheur arrive et qu’il ne puisse pas honorer (sans gêne ?) son prédécesseur et ex-mentor. La poignée de mains de Massalikul Jinaan lui permet donc de se remettre droit dans ses bottes. C’est d’ailleurs pourquoi Me Alioune Badara Cissé, médiateur de la République, écrivait en main 2019 : «Que les fils du dialogue se renouent hic et nunc, sans délai et sans nouveau référé.» Ces retrouvailles participent également à faire baisser la température socio-politique, surtout que de l’avis de nombreux observateurs, le Sénégal va vers une situation économique difficile avec notamment les hausses annoncées des prix des denrées et des services.
Mais Macky Sall n’est pas le seul gagnant dans ses retrouvailles avec Wade. Karim Wade aussi peut y trouver son compte. Son cas va certainement faire l’objet de discussions entre Me Abdoulaye Wade et le chef de l’Etat. Trouveront-ils un accord qui permettra à Wade-fils de rentrer au pays afin de réaliser son rêve de mettre définitivement la main sur le Pds ? L’avenir nous édifiera. Quoiqu’il en soit, si Macky Sall et Karim Wade semblent être les principaux gagnants de ce vent de décrispation, les perdants, eux, sont à chercher du côté de l’Alliance pour la république (Apr) et de Benno Bokk Yakaar, mais aussi du Parti démocratique sénégalais (Pds). En effet, parmi les alliés du président de la République, il y en a qui n’ont jamais voulu qu’il se retrouve avec Abdoulaye Wade. C’est le cas des socialistes et des autres partis de gauche, conscients que des retrouvailles de la grande famille libérale se feront sûrement à leur détriment. C’est le cas aussi de la bande à Oumar Sarr. L’Alliance suqqali sopi ne souhaite certainement un retour aux affaires de Wade-fils.
En définitive, les retrouvailles Wade-Macky et la sortie de prison de Khalifa Ababacar Sall vont contribuer à une recomposition de l’espace politique. Même au sein de l’opposition, les cartes seront redistribuées. Ce qui ne fera pas que des heureux.