NETTALI.COM - La journée commémorative du 34e anniversaire de la disparition de Cheikh Anta Diop,a été célébrée hier, vendredi, à l’université éponyme. EnQuête a saisi l’occasion pour interviewer l'ancien secrétaire général du Rassemblement national démocratique (Rnd) Dr Diallo Diop. Pour ce dernier, il faut cesser d’appeler le scientifique sénégalais pharaon du savoir, comme si son œuvre ne relevait que du passé.
Les jeunes générations gagneraient beaucoup à s’imprégner de l’œuvre de Cheikh Anta Diop, selonDr Diallo Diop. « Nous, notre message, c’est que Cheikh n’a pas besoin qu’on l’appelle le “Pharaon du savoir’’ ou que l’on le momifie dans un sarcophage pour en faire un pharaon. Ce qu’il souhaite, c’est que son œuvre soit enseignée ; et que, surtout, la jeune génération se l’approprie et s’accommode en particulier de sa méthode d’investigation, d’analyse, qui lui a permis de faire des découvertes et des conclusions qui restent valides, un demi-siècle après. Ainsi, nous souhaitons que la jeunesse fasse, à son tour, des découvertes et contribue à la construction souveraine de notre continent », a confié Dr Diallo Diop.
Dr Diallo Diop a aussi rappelé que Cheikh Anta n'avait, de son vivant, ménagé aucun effort, pou l'avènement de l'Etat fédéral africain. « Ceux qui se sont intéressés à la pensée politique de Cheikh Anta Diop découvrent, avec ravissement, que la validité scientifique de ses travaux de recherche en histoire, langue, sociologie et en philosophie demeure pleine et entière. En 1960, immédiatement après avoir soutenu sa thèse, il rentre au Sénégal et publie un ouvrage intitulé “Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire’’. Dans cet ouvrage, il dit que si l’Afrique veut se redresser et recouvrer la maitrise de sa propre destinée, elle doit s’unir politiquement sur le modèle fédéral. Sinon, elle est condamnée à la “sudaméricanisation’’. Soixante ans après, cette prédiction s’est vérifiée jusqu’à la caricature. L’Afrique ne s’est pas fédérée, elle s’est sud-américanisée jusqu’à la cocaïnisation. C’est la cocaïne des Sud-Américains que nous recyclons sur toute la côte de notre continent. De l’Angola jusqu’au Maroc. C’était la zone de transit. Maintenant, c’est devenu une zone de redistribution », poursuit-il.
Sur ce registre toujours, dira-t-il : « L’une des contributions substantielles de Cheikh Anta Diop à la pensée politique panafricaniste, c’est de montrer que nous ne pouvons pas réformer les Etats coloniaux que nous avons hérités de l’impérialisme berlinois : la fragmentation du continent. Nous devons repenser un nouveau type d’Etat continental. Et il dit que l’Afrique est confrontée à une tâche sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Que toutes les autres grandes fédérations de l’histoire de l’humanité se sont construites dans le fer, le feu et le sang (la violence). Pour lui, l’Afrique va devoir se fédérer et s’unir, non pas par la force, mais par la persuasion. On doit amener nos compatriotes africains à comprendre que c’est notre intérêt collectif de nous unir et de nous souder en un seul bloc, sous une direction de lutte, et donc avoir un Etat qui soit radicalement différent de l’Etat colonial “nègrifié’’ que nous avons hérité, par exemple, des Français».