NETTALI.COM - Le procès pour corruption de Lamine Diack s’est poursuivi ce jeudi devant la 32e Chambre correctionnelle du tribunal de Paris. Après Me Habib Cissé, l’ex-conseiller juridique, Lamine Diack a fait face au jugé. Âgé de 87 ans, le Sénégalais est jugé avec cinq autres personnes, dont seulement deux répondent présent. Il lui est reproché d’«avoir permis de retarder des procédures disciplinaires contre des athlètes russes soupçonnés de dopage sanguin, fin 2011.». Les minutes de l’audience.
L'ancien patron de l'athlétisme mondial, Lamine Diack (1999-2015) devant les multiples questions de la juge du 32ème cabinet du tribunal de grande instance de Paris. Il dit avoir accepté l’aménagement de la suspension des athlètes russes dopés pour deux raisons : «ne pas faire fuir les sponsors pour sauver la santé financière de l’IAAF et réussir l’organisation des championnats du monde à Moscou.» Selon lui, c’est l’accord qu’il a trouvé avec Valentin Balakhnitchev, ancien entraîneur et président de la Fédération russe de l’athlétisme.
«Si j’ai opté pour cette solution contre les athlètes dopés, ce n’est pas pour mon enrichissement personnel. J’ai appris tardivement que les athlètes russes payaient de l’argent pour ne pas être entendus», se défend-il.
Se prononçant sur sa rencontre avec le président russe, l’ex-patron de l’IAAF a expliqué que c’était dans le cadre des droits télévisions pour la chaîne Russe RTB qui n’avait pas d’argent pour payer. «Quand je rencontrais Vladmir Poutine, c’était pour recevoir la médaille de l’Amitié. Mais on en a profité pour parler des droits de retransmission que la télévision Russe devait payer. Mais la chaîne n’avait pas d’argent et Poutine s’est tourné vers le maire de Moscou et lui a dit de se débrouiller pour payer la somme demandée par l’IAAF», a déclaré Lamine Diack à la barre.
«Mon fils s’est conduit comme un voyou …»
Papa Massata Diack, qui s’est retranché à Dakar, était l’absent le plus présent au troisième jour du procès pour corruption à l’IAAF.
A la question de savoir pourquoi son fils était impliqué dans le dossier, alors qu’il était un simple consultant, Lamine Diack a tout simplement répondu que son fils s’est comporté en «voyou». «Mon fils s’est conduit comme un voyou, si le contenu des mails est avéré. Quand le policier m’a dit que mon fils (Papa Massata Diack) est impliqué dans le dossier des dopages, je suis tombé des nues», confie l’ex patron de l’athlétisme mondial.
Dans le rapport d’enquête, Papa Massata Diack aurait proposé à son père de remettre des sommes d’argent à des officiels de l’IAAF pour ralentir les procédures de suspension des athlètes russes. «Lamine Diack reconnaît quant à lui, avoir remis 50 mille euros à l’administrateur antidopage, M. Gabriel Dollé, parce qu’il venait de se remarier et partait en retraite. Un autre chèque de 100 mille euros lui a été remis par l’ancien président de l’IAAF pour son solde tout compte. D’autres officiels comme Pierre-Yves Garnier et le Britannique Levis ont aussi reçu de l’argent, selon le tribunal, pour étouffer le dossier de dopage et être indulgents sur les sanctions et procédures», rapporte la présidente de la 32e Chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris lisant le rapport.
Des accusations rejetées par l’ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) qui confie au tribunal qu’il n’a jamais été question de ralentir les procédures. Il voulait juste échelonner les sanctions après les championnats du monde de Moscou pour garantir la santé financière de l’instance dirigeante de l’athlétisme mondial.
Le financement de la campagne électorale de 2012 au Sénégal au cœur des débats
La question du financement de la campagne électorale au Sénégal était également au cœur des débats. Durant l'enquête qui a duré près de cinq ans, note le rapport, «Lamine Diack avait concédé avoir obtenu en Russie un financement d'1,5 million de dollars, qu'il a sollicité auprès de l'ancien patron de la fédération russe d'athlétisme (ARAF), Valentin Balakhnitchev, pour mener campagne contre Abdoulaye Wade à la présidentielle de 2012. Le pacte aurait été scellé fin 2011 lors d'un voyage à Moscou, où le Sénégalais avait été décoré par le président russe de l'époque Dmitri Medvedev.»
Interpellé par la présidente de la 32e chambre, Rose-Marie Hunault, Lamine Diack soutient : «C’est au détour d’une discussion qu’on m’a demandé si je ne voulais pas être candidat à la Présidentielle de 2012. Ma réponse était que je pourrais l’être, mais juste pour assurer la transition», répond-il. «Mais vous avez demandé 1,5 million d’euros à Valentin Balakhnitchev ?», insiste la présidente. Lamine Diack de répondre : «Je n’ai demandé de l’argent à qui ce soit pour financer la politique ou une quelconque campagne. J’ai dit simplement que pour gagner, il faut 1,5 million d’euros (plus d’un milliard Fcfa). Si j’avais besoin d’argent, j’allais demander à Poutine que je connais depuis très longtemps.».
L’audience se poursuivra dans les prochains jours.