NETTALI.COM – Certains politiques devraient cesser de prendre les Sénégalais pour des demeurés. Babacar Gaye qui soutient aujourd’hui que la léthargie dont souffre le Pds, est une conséquence des velléités hégémonistes de Karim Wade, n’était-il pas un acharné théoricien de ce que l’on appela « dévolution monarchique du pouvoir ?»
Les politiciens aiment décidément prendre les Sénégalais pour des demeurés, quand il s’agit de raconter leurs trajectoires. Un exemple : Babacar Gaye déclare partout qu’il est membre du Parti démocratique sénégalais depuis 1982, mais il omet de préciser qu’il avait quitté le navire libéral avec Ousmane Ngom et d’autres compagnons du pape du Sopi, pour fonder le Pls. Un parti qui, avec ceux de Serigne Diop et de Jean Paul Dias, vota pour Abdou Diouf à la présidentielle de 2000. Ce qui fait que Babacar Gay ne peut nullement revendiquer le statut d’artisan de l’alternance.
Cette erreur de perception l’a éloigné de Me Abdoulaye pendant longtemps après le changement intervenu en 2000 à la tête du pays. Il a fallu qu'Idrissa Seck connaisse des déboires, au sujet de ce qu’on appela « dualité au sommet de l’Etat » pour qu'Ousmane Ngom, Babacar Gaye et autres soient réhabilités.
En clair, quand Me Abdoulaye Wade fut accusé de vouloir se faire remplacer par son fils à la tête du parti démocratique sénégalais, Babacar Gaye fut le plus acharné défenseur de Karim Meïssa Wade. On peut même soutenir qu’il doit son ascension rapide au fait d’être un ardent théoricien de ce qui était perçu comme une velléité de succession dynastique, comme mode de dévolution du pouvoir. En juillet 2009, le président du conseil régional de Kaffrine invitait ses frères libéraux à travailler sur l’hypothèse où Abdoulaye Wade ne serait pas candidat en 2012. «Karim Wade peut bien être le candidat du Pds en 2012 », déclarait Gaye, quelques mois après la défaite de Wade-fils au Point E aux élections locales de 2009. De cette période à la perte du pouvoir, il a balancé plusieurs phrases comme ça pour donner des gages de loyauté à Me Abdoulaye Wade.
Le Pds de nouveau dans l’opposition, l’ancien directeur de cabinet politique de Me Abdoulaye Wade continuera à faire dans la harangue karimiste, en défendant la candidature du fondateur de la Génération du Concret. «On sent une présence massive, à la limite envahissante de ceux qui supportent Karim Wade, dans le parti, mais surtout à la périphérie du parti, à l’extrême périphérie du parti. Cela veut dire qu’il (Karim) gagne aujourd’hui en légitimité et en popularité. Certainement ce que Abdoulaye Wade voulait et qu’il n’a pas pu réaliser, Macky Sall est en train de l’offrir à Karim Wade sur un plateau d’argent, c’est-à-dire d’en faire son principal adversaire en 2017», disait le porte-parole du Pds, le 23 novembre 2014 à l’émission Grand Jury de la Rfm.
Toute adversité envers Karim Wade suscitait une vive réaction de Babacar Gaye. Pour rappel, quand le président Wade a présenté Madické Niang comme son « adjoint », à Touba à la veille du Grand Magal en 2017, Gaye n’hésita pas à traiter l’ex-ministre des Affaires étrangères de « chambellan ». Et lorsque Madické et Cie quittèrent le parti, ils reçurent des vertes et des pas mûres de la part de l’ex-président du Conseil régional de Kaffrine.
Il en a été ainsi jusqu’au jour où se rendant compte que le Pds souffrait d’une certaine léthargie, parce que justement les responsables qui théorisaient la candidature de Karim Wade ne mouillaient pas le maillot pour rendre possible celle-ci, Wade a décidé d’appliquer une cure de jouvence, en faisant la part belle aux jeunes. Il se peut aussi que le pape du Sopi, averti de toutes les manœuvres du parti, ait été informé d’une trahison que préparaient les futurs démissionnaires.
Le Nouveau Parti Démocratique (Npd) qu'ils ont récemment porté sur les fonts baptismaux est perçu comme un cheval de Troie de Macky Sall, affectant, par ce biais, de démanteler le Pds. Pour ajouter à la confusion, Babacar Gaye dit qu'il n'exclut pas "de travailler" avec le chef de l'Etat. Le cas échéant, nous ne serons pas surpris.