NETTALI. COM- Contrairement à la CEDEAO qui demande le rétablissement de Ibrahima Boubacar Keita dans ses fonctions de président de la République du Mali, Moussa Mara, invité du Jury du dimanche, pense qu’il faut tourner la page de ce dernier.
Le Président Mali, Ibrahim Boubacar Keita, a été contraint à la démission par des militaires qui ont pris le pouvoir le 18 août 2020. La CEDEAO, qui condamne cet acte, exige son rétablissement. Mais de l'avis de Moussa Mara, cette requête ne peut pas prospérer. « Le plus important, c’est de tourner la page du président IBK. Contrairement à ce que la CEDEAO a décidé, je ne pense pas qu’il faille envisager de le réinstaller. Il faut tourner la page IBK. Il faut considérer ce qui s’est passé, bien que regrettable, comme une opportunité. Je suis en désaccord avec la CEDEAO. L’écrasante majorité des Maliens et des populations de l’espace CEDEAO ne partagent pas ce qui a été décidé par le sommet par rapport à la réinstallation d’IBK. La réinstallation n’est pas envisageable, n’est pas réaliste. C’est impossible », a expliqué l’ancien Premier ministre malien, sur Iradio.
Pour lui, il faut une transition dans un cadre où l’ordre constitutionnel sera respecté au maximum. « Je pense qu’on est à l’aube d’une nouvelle période. Il faut aller très rapidement vers la résolution des problèmes. Les militaires eux-mêmes ont indiqué que la transition sera civile et il est impensable de penser qu’un pouvoir militaire puisse prospérer aujourd’hui. Cela étant dit, la transition civile doit toujours comporter des acteurs militaires pour une plus grande objectivité. Les militaires étant des forces neutres par définition, il faut qu’ils puissent jouer un rôle avec la participation et l’accompagnement de la communauté internationale », ajoute-t-il.
Ainsi, pour que la transition puisse avoir l’effet escompté, il estime qu’il faut trouver une personnalité malienne à diriger cette transition mais, il exclut les anciens présidents qui, à son avis, peuvent être de bons conseillers. « Il faut une transition qui soit neutre. Il faut un gouvernement constitué de compétences techniques, neutre, cela peut nous aider. On n’a jamais pu arriver à faire ça dans notre pays. Il ne faut pas d’acteurs politiques dans la transition. Cela entraine des jeux partisans et la transition de 2012-2013 a beaucoup souffert de cela. Il faut que nous puissions faire en sorte que le gouvernement de transition ne soit pas un partage de gâteau entre les acteurs politiques. Il faut que nous désignions l’ensemble des ministres sur des bases de compétences », souligne-t-il.
Poursuivant son argumentaire, l'ex PM renseigne que ce qu’il faut faire, c’est de travailler sur les causes réelles des problèmes pour que dans les mille ans à venir, le pays ne connaisse plus de coup d’Etat. « En 60 ans ,on en a connu quatre. Il faudrait que cela cesse. Mais cela nécessite que nous fassions des réformes de fond dans le fonctionnement étatique, dans l’accès et l’exercice des pouvoirs dans notre pays. L’exécutif dans notre pays a trop de pouvoirs. Il faut qu’on développe des contre-pouvoirs. Il faut mettre en œuvre un dispositif qui puisse permettre de destituer quelqu’un en cours de mandat, que ça soit un dispositif constitutionnel », martèle-t-il.
Les faiblesses et insuffisances des leaders politiques ont donné du poids à l'imam Dicko
Après avoir félicité et remercié le président de la République Macky Sall pour tout ce qu’il a fait pour le Mali, Moussa Mara s’oppose aux sanctions annoncées par la CEDEAO contre les putschistes et la fermeture de la frontière malienne aux pays de la sous-région. « Sur cette question, ce qu’on déplore c’est que ces sanctions frappent le peuple. Elles ne frappent pas ceux qui prennent les décisions et qui sont visés. Nous sommes dans une zone grise que nous devons utiliser positivement pour sortir de cette situation. On a une page blanche à écrire au Mali. Les sanctions n’ont pas de portée. Ces jeunes officiers qui ont la quarantaine ont été formés dans les meilleures écoles d’officiers au Mali et à l’extérieur. Ils ne raisonnent que conformément à la démocratie », dit-il.
S’agissant de la percée de l’imam Dicko, il pense que les faiblesses et les insuffisances des leaders politiques ont donné du poids à l’imam.