NETTALI.COM - Demandant à Maitre Abdoulaye Wade de témoigner sur la contenance de son champ qu’il avait vendu au milliardaire Serigne Abdoulaye Dia(PDG de Senico), 255 victimes dont la“karimiste’’ Marie Aw exigent l’arbitrage de l’Etat avant que l’irréparable ne se produise.

Après Babacar Ngom et “ses’’ terres de Ndengler, c’est maintenant au tour du patron de la Senico, Serigne Abdoulaye Dia, d’entrer dans la danse du foncier. Ayant acheté le champ de l’ancien président Abdoulaye Wade sis à Keur Massar, le milliardaire menace de faire démolir plus de 200 maisons qui, selon lui, se trouvent sur ce qui est désormais son périmètre. Pour les habitants concernés, les 5 ha qu’ils occupent n’ont jamais fait partie du terrain appartenant à l’ancien président et dont la contenance serait de 22 ha. Avant-hier, ils ont reçu une information selon laquelle leur adversaire aurait obtenu un titre exécutoire, malgré un appel en cours.

C’est une Marie Aw (responsable au Parti démocratique sénégalais - PDS) inhabituelle qui a joint, hier, “EnQuête’’ pour cracher son amertume, face à ce qu’elle considère comme une injustice rampante et qui risque de mettre le feu aux poudres aux environs du terrain communément appelé “Toolou Abdoulaye Wade’’. Sa maison faisant partie du lot de 245 habitations menacées de démolition, la libérale enlève son manteau de responsable politique pour enfiler celui de la citoyenne prête à se battre pour défendre son toit.

Toutes griffes dehors, Mme Aw sonne la révolte : “Ce qui se passe dans ce pays est inadmissible. Trop, c’est trop. Avant de démolir nos maisons, Serigne Abdoulaye Dia (PDG du groupe Senico) et ses hommes vont devoir passer sur nos corps. Je me demande comment on peut lui délivrer une ordonnance accompagnée d’une grosse et dont l’objet est d’exécuter une décision de justice frappée d’appel. Nous ne l’accepterons pas.’’

En fait, dans cette affaire, il s’agit d’un champ appartenant à Abdoulaye Wade et qui a été vendu en 2013 au PDG de la Senico. Après une longue procédure judiciaire, l’homme d’affaires a pu obtenir un titre exécutoire, selon la plaignante. Fidèle parmi les fidèles du “Pape du Sopi’’, elle précise : “Tout le monde sait que le champ d’Abdoulaye Wade est entièrement clôturé. Nous, nos maisons se trouvent derrière le champ. Entre nous et le champ, il y a même d’autres titres fonciers. Les 5 ha que nous occupons appartenaient à un certain Serigne Abdoulaye Thiam qui habite à Yeumbeul. C’était un champ et les traces sont encore visibles sur place’’. Comment ont-ils acquis lesdits terrains ? L’adjointe au maire de Keur Massar explique : “C’était un terrain non immatriculé. Le titulaire nous l’avait cédé et le maire de l’époque l’avait avalisé. Nous l’occupons sur la base d’un protocole entre la mairie, le propriétaire et les acquéreurs. C’est sur la base de ces actes de cession que nous habitons ces terres depuis 2005-2006. C’est sur cette base que nous avons pu remplir toutes les procédures pour pouvoir construire nos maisons’’.

Aujourd’hui, sur place, il y a, selon elle, des R+2, R+3, R+4 ; tous menacés d’être rasés. Depuis lors, les populations sont sur le qui-vive. “Nous avons saisi tout le monde, mais personne n’est venu à notre secours. Dès demain, nous allons déposer une demande de marche. Nous allons organiser une assemblée générale suivie d’une marche prochainement. Il y a de véritables risques, parce que nous n’allons pas accepter d’être dépossédés’’. Depuis, le collectif a tapé à toutes les portes, même à celle de l’ancien président de la République pour qu’il puisse témoigner. Hélas, même ce dernier tarde à apporter sa version des faits. Marie Aw tempête : “Ce n’est pas normal que l’Etat fasse la sourde oreille. Il faut aussi qu’Abdoulaye Wade, qui a vendu le terrain, réagisse. Qu’il nous dise si c’est lui qui a vendu cette partie ou pas. Nous l’interpellons directement. Il doit éclairer notre lanterne.’’

D’ailleurs, pense-t-elle savoir, si l’Etat du Sénégal ne veut pas encore réagir, c’est surtout pour tenter de lui faire porter le chapeau. “Ils veulent, fulmine-t-elle, laisser la situation pourrir. Si le vendeur était de l’APR (Alliance pour la République) ils allaient réagir. Ils veulent laisser l’affaire pourrir ; comme ça, on va dire que c’est Abdoulaye Wade qui est responsable. C’est pourquoi j’invite ce dernier à réagir, à dire s’il a vendu cette partie litigieuse ou pas’’.

Pour rappel, après la vente du terrain en 2013, les procédures d’expulsion contre les 245 familles ont été entamées en 2019. En août dernier, le tribunal de grande instance de Pikine rend une décision favorable à Serigne Abdoulaye Dia. Les victimes interjettent appel. Alors que la Cour d’appel de Dakar n’a toujours pas statué, le patron de Senico, selon ses adversaires, a pu avoir une décision lui permettant d’exécuter la sentence rendue en première instance.

Avec ENQUETE