NETTALI.COM - C’était évoqué depuis longtemps, mais jamais confirmé. La collusion entre Macky Sall et Idrissa Seck s’est finalement révélée au grand jour ce dimanche 1er novembre. Idy dauphin de Macky pour la Présidentielle de 2024 ? L’avenir nous le dira. En tout cas, les tractations pour leurs retrouvailles ont été longues.
Elles ont été longues et tenues secrètes. La nomination de Idrissa Seck à la tête du Conseil économique, social et environnemental, ce dimanche 1er Novembre 2020, n’est que la concrétisation de ce long processus. Le premier contact a été noué au lendemain de la Présidentielle de 2019. Et, c’est le chef de l’Etat, Macky Sall, lui-même qui est allé à la rencontre de «son aîné», ancien camarade au Parti démocratique Sénégalais, celui qui l’a précédé au poste de Premier ministre. Macky Sall s’était en effet rendu nuitamment chez l’ancien maire de Thiès au Point E.
Quelques semaines plus tard, invité à l’émission Face-to-Face de la Tm, le journaliste Cheikh Yérim Seck, vend la mèche : «Idrissa Seck et Macky Sall ont renoué le fil du dialogue. Ils se parlent», avait déclaré l’ancien journaliste de «Jeune Afrique».
Idy met de l’eau dans son bissap
Le silence assourdissant d'Idrissa Seck qui s’en était suivi, avait fini de préoccuper plusieurs analystes politiques. Mis au parfum, Barthélémy Dias, sans jamais citer le nom du Président du Rewmi, pointe un doigt accusateur sur «ce leader devenu dealer politique».
«Nous sommes dans un contexte où nous nous trouvons devant une opposition insignifiante. C'est différent de la période où l'on voyait Amath Dansokho, Moustapha Niasse ou encore Tanor Dieng faisant face à Abdoulaye Wade. C'est une opposition complice de Macky Sall. Toute cette agitation (dialogue national) sert juste de prétexte à un gouvernement d'union nationale, de majorité élargie pour berner les Sénégalais. Macky Sall est en train de tracer sa voie», prévenait-il. Une prédiction qui s’est avérée très juste
Déjà, au sein même de la Coalition «Idy2019», le revirement dans le discours de Idrissa Seck était notable. Dans les rares réunions ou entretiens téléphoniques qu’il avait avec eux, il tentait toujours de convaincre les leaders de la coalition du bien-fondé de leur participation au Dialogue national et de l’impérieuse nécessité de l’attitude républicaine, quelles que soient les dérives du régime de Macky Sall.
Le communiqué des Forces démocratiques du Sénégal, parti allié au Rewmi de Idrissa Seck, dirigé par le Dr Babacar Diop, le révèle d’ailleurs. «Dans le cadre des consultations liées au remaniement ministériel, j'ai été contacté par M. Idrissa Seck pour accompagner le parti Rewmi dans le gouvernement. Je lui ai clairement signifié que ma dignité m’interdit de rentrer dans un gouvernement que j’ai combattu, et que je reste dans l’opposition. Il m’a donné comme raison les difficultés que traverse le pays. Je pense que c’est trop léger. La France, les Etats-Unis et bien d’autres pays sont dans des difficultés, mais le jeu démocratique suit son cours. C’est-à-dire que le pouvoir gouverne et l’opposition s’oppose.»
La carte Touba
Dans le rapprochement entre Idrissa Seck et Macky Sall, Touba aurait joué un grand rôle. En atteste d’ailleurs la déclaration d’Idrissa Seck, ce dimanche, au Point E. «Je remercie l’ensemble des autorités religieuses de notre pays pour leurs prières et pour leurs prescriptions en notre direction de toujours œuvrer pour d’abord consolider la paix et la stabilité du pays», a déclaré, dimanche 1er novembre, Idrissa Seck. Une déclaration qui renvoie plus à sa rencontre avec le Khalife général des mourides, pour justifier son ralliement au camp du Pouvoir.
Ce jour-là, à la tête d'une forte délégation composée de l'essentiel de ses alliés, le leader du Rewmi est reçu par le khalife général des mourides peu après 17 heures. C’était aux lendemains de sa défaite cuisante à la Présidentielle de 2019. Dans la salle d’audience de la Résidence Khadimou Rassoul, Idrissa Seck, qui s’était auparavant longuement entretenu avec son marabout, Serigne Moussa Mbacké Nawel, semble jeter les armes du combat politique. Le patron de la Coalition Idy2019, qui avait réuni chez lui les 4 autres candidats malheureux pour contester le verdict des urnes en faveur de Macky Sall, semble totalement passer à autre chose. «Les raisons de notre visite aujourd’hui à Touba se résument à un seul mot. Rendre grâce à Dieu. Vous rendre grâce en votre qualité de digne représentant de Serigne Touba sur terre. Rendre grâce à la population sénégalaise toute entière. Nous réitérons et réaffirmons que nous ne saurions déroger, quelles que soient nos obsessions dans ce bas monde de la conduite que vous nous avez édictée. Nous manifestons toute notre fierté pour tout ce que le bon Dieu décide pour notre personne (…) Dieu a fait que nous y avons participé avec paix. Nous vous réaffirmons notre ferme engagement à œuvrer pour l’intérêt exclusif du peuple sénégalais, d’être des artisans de la paix et des acteurs prompts à tout faire pour éviter tout malheur, quelles que soient les circonstances, c’est cela notre ligne de conduite et celle de tous les autres membres de la coalition.»
Dans sa réponse, le Khalife des mourides est resté sur les principes, dans sa logique de patriarche et de promoteur de la paix. «Le calme dont vous avez fait montre, bien qu’il ne me surprend pas, n’a pas de prix. Je me sens honoré que vous ayez participé au maintien de la paix et de la sérénité dans ce pays, au moment où beaucoup annonçaient le pire», a déclaré le marabout. Sans plus ni moins. Mais dans l’entourage immédiat de Idrissa Seck, les propos de Serigne Mountakha ont sonné comme un appel aux retrouvailles.
Objectif : Contrer Sonko
Ce rapprochement entre les deux «ennemis» d’hier n’est rien d’autre, selon beaucoup d’observateurs, qu’une bataille pour leur survie. Ils se sont juste alliés pour contrer les futures candidatures de Ousmane Sonko du parti Pastef/Les Patriotes, 3e à la dernière présidentielle après Macky Sall et Idrissa Seck, un leader qui se positionne comme le véritable patron de l’opposition. Mais réussiront-ils à durer leur schémas jusqu’au bout. La présidentielle de 2024 nous édifiera.