NETTALI.COM - Élus respectivement président et premier vice-président de la Caf, le Sud-Africain Patrice Motsepe et le Sénégalais Augustin Senghor sont loin de faire l'unanimité. Leur nomination a soulevé une vague d'indignations. En effet, un cocktail de déception et de frustration a éclaté sur cette 43ème assemblée générale de la Caf.
La Fifa a-t-elle téléguidé et imposé son diktat lors de la 43ème assemblée générale qui s'est tenue à Rabat au courant de ce mois de mars?
Difficile de répondre par la négative.
En réalité, le choix de ce milliardaire très occupé, méconnu et parrainé par le patron de la Fifa, fait grincer des dents sur le continent. De nombreux observateurs y décèlent une ingérence et une Caf soumise.
Même si aucune voix dissonante ne s’est exprimée durant cette 43e assemblée générale de la Caf, la nomination de Patrice Motsepe par acclamation car étant le seul candidat déclaré suite au protocole de Rabat, sent le diktat de la Fifa en plein nez.
" Pour cette élection-là quand même, personne n’ose dire qu’il n’a pas vu l’implication, l’ingérence même du président de la Fifa, Gianni Infantino : il a sillonné beaucoup de pays africains, il a battu campagne pour Patrice Motsepe", a déploré le président de l'Association nationale de la presse sportive sénégalaise (Anps), Abdoulaye Thiam.
A la question de savoir si Motsepe avait le meilleur profil, Bacary Cissé ne mâche pas ses mots.
" Il n'a même pas le temps pour son club (Mamelodi Sundowns). Il a le meilleur profil pour être la marionnette de la Caf", a lâché le directeur de publication du quotidien sportif Record.
La Fifa se lave à grande eau
Sûrement mis au courant de la vague déferlante de critiques, le président de la Fifa a tenté de se dédouaner. Dans son allocution liminaire tout juste après l'élection de Patrice Motsepe, Gianni Infantino a défendu la version de la Fifa au sujet de cette drôle d’élection : elle ne veut pas contrôler la CAF mais favoriser " l’unité".
" C’est important de mettre ensemble ces deux mots: unité et équipe. En équipe on gagne, seul on perd, le football est un sport d’équipe", a-t-il plaidé.
Hôte de cette 43ème assemblée générale de la Caf, le président de la Fédération marocaine, Fouzi Lekjaa a volé au secours de Infantino.
A l'en croire, il faut " clarifier une bonne fois pour toute que le sort de notre football est entre nos mains, nous les présidents de fédérations et donc pas celles de la Fifa", dit-il.
" Toutes les polémiques autour de la relation avec la Fifa sont stériles", a-t-il ajouté.
Président de la commission des finances, Fouzi Lekjaa a par ailleurs rappelé les difficultés financières de l’institution, qui "s’installe dans un déficit autour de 10 millions de dollars".
Selon lui, la CAF "est en train de bouffer son capital, ses fonds propres", a-t-il alerté, parlant de "déficit structure".
En effet, la CAF dispose de 70 millions de dollars US de fonds propres.
" Si on continue dans cette logique, on aura de quoi fonctionner pendant ce mandat, mais ce sera l’impasse pour le prochain", a prévenu le N.1 des finances de la CAF.
Donc peut-on en déduire que le choix porté sur Motsepe est purement motivé par l'argent?
" C’est forcément à cause de l’argent. Je crois qu’il est très bien entouré. On peut espérer effectivement que, d’ici quatre ans, la Confédération africaine de football puisse retrouver son lustre d’antan et qu’on ne puisse pas vivre sous la tutelle tout simplement de la Fifa comme ce fut le cas ces quatre dernières années avec Ahmad", a sèchement répondu le président de l'Anps.
Alors cette mainmise flagrante et scandaleuse à la limite de la Fifa peut-on la sentir dans les autres confédérations du monde?
" Au XXIe siècle, là où on pensait qu’on allait effectivement vivre totalement de notre indépendance, surtout sur le plan footballistique, mais là c’est un Suisse qui vient en Afrique pour tout simplement être reçu avec les honneurs et qui dicte qui doit diriger effectivement notre confédération. C’est triste parce qu’on ne verra jamais les gens comme Gianni Infantino au niveau de l’UEFA, qui est la confédération européenne. On ne le verra pas au niveau de la Concacaf, qui est la confédération sud-américaine. Ce n’est pas possible", a fait savoir Abdoulaye Thiam.
Augustin Senghor lynché sur les réseaux sociaux
Tout comme Patrice Motsepe, le nouveau poste de Me Augustin Senghor a provoqué ire et indignation.
Le président de la Fédération sénégalaise de football a-t-il raté la train de l'histoire? Devrait-il refuser le "deal" ou protocole de Rabat? A-t-il bien fait de se plier à la demande de la Fifa ?
Voilà autant de questions qui se sont posées les férus du ballon rond. Autant dire que ce poste de premier vice-président de la Caf n'est pas du goût de bon nombres Sénégalais et...d'Africains.
A vrai dire, l'annonce de la candidature de Me Augustin Senghor à la CAF a suscité un vent d'espoir dans le landerneau du football local. D'aucuns s'imaginaient enfin de voir un Sénégalais à la tête de la plus haute instance du football africain et avoir enfin l'influence et le respect qui sied. Hélas ce rêve ne sera pas réalisé. Pas pour le moment devrait-on dire.
Car, celui qui a mobilisé toute la nation sénégalaise pour battre campagne a malheureusement accepté de poser les armes avant même le début des hostilités.
Cet énorme revirement à 360 degrés permet aisément de comprendre la déception indescriptible des...Sénégalais.
" Vous avez porté campagne auprès du Président de la République pour qu'il utilise son influence. Vous avez battu le macadam auprès des journalistes sportifs de ce pays. Nous avons porté votre candidature sur les réseaux sociaux malgré les moqueries des uns et des autres. Vous avez voyagé avec l'argent du contribuable pour aller battre campagne au Cameroun et vous aviez eu la bénédiction du grand Roger Milla (même s'il ne vote pas). Je n'oublie pas votre démonstration de force à Praia, au Cap Vert où vous avez séduit plus d'un. Au finish, qu'avez vous fait? Vous avez préféré nous envoyer un communiqué pour expliquer votre retrait de la course ! Devrai-je dire que c'est une attitude lâche? Non parce que je vous dois du respect, mais c'est un manque de respect notoire à l'endroit des sportifs", a déploré sur sa page Facebook l'un des observateurs les plus avertis du football local, Laye Terry.
Sa déception a été partagée par beaucoup d'internautes qui se sont exprimés en ces termes :
" Il doit être traduit en justice pour haute trahison"...
" C'est un éternel looser. J'ai jamais cru en lui à l'image de notre équipe nationale"...
" C'est du m'importe quoi".
Ces derniers ont-ils raison sur le maire de l'Ile de Gorée qui a préféré se ranger comme le Mauritanien Ahmed Yahya et l'Ivorien Jacques Anouma?
Matar Ba, pour sa part se félicite de cette "nomination historique".
" L’élection de Me Augustin Senghor en qualité de premier vice-président de la CAF, constitue, assurément, un niveau de responsabilité jamais atteint par notre pays dans les instances faitières du Football africain. Et cela est à magnifier et à soutenir ", a laissé entendre le ministre des Sports sénégalais.
Rappelons que le protocole de Rabat a distribué les rôles comme suit :
Président : Patrice Motsepe (Afrique du Sud)
1er vice-président : Augustin Senghor (Sénégal)
2ème vice-président : Ahmed Yahya (Mauritanie)
Conseiller : Jacques Anouma (Côte d’Ivoire).