NETTALI.COM-Si le juge, en rendant sa sentence, suit le réquisitoire du maître des poursuites, les accusés Erhil Adébé, Moustapha El Béchir et El Atigh Ahmed Mahmoud vont passer le reste de leur vie en prison. Accusés d'avoir un lien avec les attaques terroristes de Grand Bassam et Ouagadougou, ils ont comparu à la barre de la chambre criminelle spéciale de Dakar pour complicité d’actes terroristes, association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et financement du terrorisme en bande organisée.
Les trois Mauritaniens sont accusés d’avoir été en contact avec les organisateurs des attentats de Grand Bassam (Cote d’Ivoire) et de Ouagadougou (Burkina Faso). Il ressort des faits qu’en mai 2016, les autorités maliennes ont interpellé Ibrahim Ould Mohamed qui, interrogé, a reconnu son implication dans les attaques de Ouagadougou et le Grand Bassam. Il a désigné Mimi Ould baba, Hamza ben Mohamed et Ahmed Lemdecem comme étant les principaux protagonistes de ces attentats qui avaient fait plusieurs morts.
Pour ce qui est de celui de Grand Bassam, il a même apporté des précisions sur le véhicule, dans lequel les armes ont été dissimulées puis transportées à Abidjan. A cet effet, les services de renseignement technique du Sénégal ont trouvé des liens entre le numéro de téléphone utilisé par Moustapha El Béchir et le numéro malien enregistré au nom de Hamza ben Mohamed.
Mieux, l’enquête avait établi que ce fameux El Bachir communiquait régulièrement avec Ibrahim Ould Mohamed et Ahmed Lemdecem qui étaient en relation directe avec Mini Ould Baba, coordonnateur des attaques de Ouagadougou et du Grand Bassam.
Le 18 septembre 2016, la Section de recherches de la gendarmerie était informée de la présence, à Diamniadio, d’une personne porteuse du fameux numéro. Le transport effectué sur les lieux permettait l’interpellation de El Atigh Ahmed Mahmoud. Lors de son interrogatoire, ce dernier informait être en possession de la puce depuis le samedi 17 septembre 2016 et qu’elle lui aurait été offerte par un inconnu de nationalité mauritanienne qui se rendait à Nouakchott. L’exploitation du téléphone d’El Atigh permettait d’établir plusieurs communications entre lui et ce dernier.
El Atigh était écroué à Saint-Louis pour association de malfaiteurs, complicité de vol en réunion commis la nuit avec violence et usage d’armes lors de l’attaque du Grand Bassam. Entendu sur sa relation avec Bachir et Mini Ould baba, il soutenait qu’il ne les connaissait pas.
En effet, le 10 octobre 2016, le numéro de Béchir et celui appartenant à Erhil Adébé dit Mohamed Lemdessene sont localisés aux résidences Ndiambour, plus précisément au deuxième étage. Le 27 octobre 2016, les deux cibles sont localisées sur l’itinéraire Kaolack-Diourbel-Louga et le dispositif mis en place permettait leur arrestation, le même jour, à 15 heures. Ils seront interceptés à l’entrée de Louga alors qu'ils étaient à bord d’un véhicule de transport en commun. Les accusés ont battu en brèche les accusations portées contre eux.
El Atigh Ahmed Mahmoud, cambiste, a expliqué qu’il n’a rien à voir avec les entreprises terroristes. A son avis, il n’a jamais pensé de sa vie qu’il allait être, un jour, impliqué dans une affaire de terrorisme. A son tour, Moustapha El Béchir a nié les faits. Ce dernier, propriétaire d’une société immobilière, a explique aux juges que ces multiples appels vers le Mali ou la Cote d’Ivoire se justifient. Il dit avoir des clients dans ces pays.
Quant à Erhil Adébé, il a également rejeté les faits. Se définissant comme un homme d’affaires qui s’active dans l’importation des batteries de véhicule, Erhil Adébé a soutenu qu’il ne connait pas le terrorisme.
Le procureur de la République, estimant que les faits d’acte de terrorisme et de financements de terrorisme ne souffrent d’aucune contestation, a requis la peine de réclusion criminelle à perpétuité. Auparavant, il a essayé d’établir les liaisons qui existent entre Mini Ould Baba, coordonnateur des attaques de Ouagadougou et du Grand Bassam, et les accusés.
Les avocats de la défense ont plaidé l’acquittement. Me Ndiaga Dabo a soutenu que son client n’est pas Ahmed Lemdecem. « On ne vous apporte aucune preuve à ce que Adebe ait participé à une association de malfaiteurs. Je ne pense pas qu’il puisse financer le terrorisme. Pour financer le terrorisme, il faut beaucoup d’argent. Est-ce qu’avec 25 mille francs CFA, on peut financer le terrorisme », s’est interrogé l’avocat. Le Conseil de Mouhamed El Béchir a abondé dans le même sens. Selon lui, les réquisitions obtenues au niveau de la Sonatel et brandies par l’accusation, ils ne les ont pas reçues. « Les terroristes ne sont pas des personnes de cœur. Ils sont très futés. Ils ne prêtent pas leur puce à n’importe qui », a indiqué l’avocat. Me Ibrahima Mbengue, avocat de Atigh a aussi plaidé l’acquittement pour son client. Il est temps, selon lui, qu’il puisse enfin sortir et aller soigner sa jambe qui est plâtrée.
L’affaire est mise en délibéré. Le jugement sera rendu le 29 avril prochain.