NETTALI.COM - Ce mercredi sont célébrés les dix ans des événements du 23 juin 2011, cette journée où le Sénégal a failli basculer dans la violence. Une décennie après, les acteurs ont changé de camps, mais les aspirations des populations demeurent.
Que reste-t-il du 23 juin 2011? Des souvenirs ? Des photos ou vidéos que certains (re)publient sur les réseaux sociaux histoire de se donner bonne conscience ? Ou quoi encore ? Des questions que se posent de nombreux Sénégalais en ce jour anniversaire de ces événements qui ont failli plonger le Sénégal dans la violence et qui, pour beaucoup, constituent le top de départ de la marche qui a fini par emporter Abdoulaye Wade et son régime.
Pourtant le 23 juin 2011 est certes un top de départ, mais il découle d'un long processus marqué par des actes posés par Wade et qui avaient fini par écoeurer les Sénégalais. Quand en 2004, Abdoulaye Wade se sépare d'Idrissa Seck pour le remplacer par un certain... Macky Sall, l'ancien maire de Thiès lance la théorie de la dévolution monarchique du pouvoir. "Wade veut m'écarter, moi le fils d'emprunt, parce que le fils biologique a grandi", dénonçait l'actuel président du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Résultat : Karim Wade qui voulait certainement passer par la mairie de Dakar pour réaliser le rêve de remplacer son père est lamentablement battu aux locales de 2009. Malgré ce signal envoyé par les Sénégalais, Wade reste droit dans ses bottes. Il nomme son fils dans le gouvernement de Cheikh Aguibou Soumaré et lui donne presque tous les pouvoirs. Entre temps, Macky Sall a quitté la barque des libéraux pour aller grossir les rangs de l'opposition.
Ainsi, l'annonce du fameux ticket présidentiel voulu par Wade finit de convaincre les Sénégalais de sa volonté de se faire remplacer par son fils. Un large front se forme alors. Partis politiques, organisations de la société civile, mouvements citoyens... se retrouvent pour dire non. Un premier signal est donné le 21 juin 2011 quand le député Cheikh Bamba Dièye s'enchaîne devant l’Assemblée nationale. Le lendemain, les rappeurs du mouvement "Y'en a marre" sont arrêtés et tabassés à la Place de l’indépendance. Malgré la forte tension, toutes les manifestations prévues le 23 juin sont autorisées. Ce jour-là, les abords de l’Assemblée où les députés examinent le projet de loi sur le ticket présidentiel sont pris d'assaut par des milliers de Sénégalais. Les manifestations dureront presque toute une journée, obligeant Wade à abandonner son projet. Mais le processus devant aboutir à son départ était lancé et ne s'arrêtera qu'en mars 2012 avec l'arrivée de Macky Sall au pouvoir.
Dix ans après, force est de reconnaître que le Mouvement du 23 juin (M-23), né dans la foulée de ces événements, est devenu l'ombre de lui-même. Les acteurs de l'époque, dans leur écrasante majorité, sont au pouvoir avec Macky Sall. Quid des aspirations démocratiques pour lesquelles ils avaient mobilisé les Sénégalais ? Elles ne semblent plus être leur priorité.
Mais la nature ayant horreur du vide, d'autres organisations ont pris la place. Et ce sont ces mouvements et partis politiques qui se retrouvent dans le M2D né au lendemain des violences de mars 2021. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que le Mouvement pour la défense de la démocratie (M2D) a choisi ce 23 juin pour organiser un vaste rassemblement. Pour les membres de ce mouvement, c'est le moment de remettre sur la table les revendications de 2011 notamment le respect de la constitution, mais aussi et surtout dire non à une troisième candidature de Macky Sall. Le M2D connaîtra-t-il le même succès que le M-23? C'est la grande question. Toujours est-il que le M-23 est, lui, mort de sa belle mort après servi d'escalier à certains pour accéder aux privilèges du pouvoir.