NETTALI.COM - Deux personnes tuées, plus d’une trentaine d’animaux domestiques emportés, des maisons inondées. La liste des dégâts causés par les pluies de ce lundi est loin d’être exhaustive. C’està Taïba, dans la maison familiale de Zahra Iyane Thiam, qu’un bâtiment s’est effondré sur le fils ainé de feu Mourchid Iyane Thiam et un jeune garçon de 19 ans.

Après une pause pluviométrique de plus de deux semaines, le ciel a décidé d’ouvrir ses vannes : 116 mm recensées à Matam et 98,2 mm à Tafsir Mogo. Le ciel a vraiment arrosé la région, un peu trop, puisque les dégâts sont incommensurables. A Taïba Nguéyène, village de la commune de Nabadji Civol, c’est un bâtiment construit sous forme de hangar qui s’est affaissé sur deux individus, très tôt le matin de ce lundi. L’une des victimes, la plus jeune, âgée de 19 ans, est morte sur le coup. L’autre, qui se trouve être le fils ainé de feu Mourchid Iyane Thiam et demi-frère consanguin de la ministre Zahra Iyane Thiam, était âgée de 62 ans. Il a succombé à ses blessures au moment de son évacuation à l’hôpital de Ourossogui.

Les autorités, parmi lesquelles le sous-préfet de Ogo, le commandant de la brigade de gendarmerie de Ourossogui et le premier adjoint au maire de Nabadji Civol, s’étaient rendues sur les lieux pour constater de visu l’ampleur du désastre. Elles ont souligné le magnifique élan de solidarité des populations, qui n’ont pas attendu l’arrivée des sapeurs-pompiers pour sortir des décombres les victimes. Anta, une voisine des Thiam, était inconsolable : “C’est terrible. Le destin ne pouvait pas trouver un scénario pire que celui-ci. Nous avons tous vu le défunt Moustapha Thiam (fils ainé de Mourchid Iyane) la veille. Rien ne prédisait qu’il allait nous quitter subitement. Il était un émigré installé aux Etats-Unis depuis des années. C’est seulement à la disparition de son père qu’il était rentré, pour certainement occuper la place de son papa dans la famille. A peine quelques mois, voilà que lui aussi part le rejoindre. Le choc est dur’’, dit-elle tout en sanglots. L’émoi se lisait clairement sur tous les visages. La faucheuse est entrée dans une famille très respectée de la contrée.

Feu Mourchid Iyane, au-delà de son envergure nationale, était un véritable patriarche à Taïba et environs. Les eaux de pluie qui seraient responsables de l’effondrement, ruisselaient de partout. Cependant, une question taraudait certains curieux. Comment un bâtiment, qui n’était pas en banco, mais bien en ciment, a pu s’effondrer aussi brutalement ? Les enquêtes d’usage apporteront certainement des éléments de réponse.

Plus de 30 animaux morts

Non loin de Taïba, les dégâts matériels sont lourds. Au village d’Ouro Yero Niébé, le chef Amadou Niébé paraissait stoïque, malgré le grand malheur qui a frappé sa famille. Il vient de perdre d’un coup plus de 20 bêtes. “Que voulez-vous que je vous dise ? Vous avez-vous-même constaté l’ampleur des dégâts. Inutile de vous décrire le sentiment qui m’habite. Mais je suis un croyant ; je m’en remets au Seigneur, Tout-Puissant. J’ai perdu 21 chèvres ; vous pouvez les compter – il nous montre les cadavres. Certaines de nos cases se sont effondrées. Cela fait bien longtemps que je n’ai pas vu autant d’eau. Je suis clairement dans la précarité, aujourd’hui’’, confesse-t-il.

Il n’est pas la seule victime des inondations. Un de ses voisins déclare avoir perdu beaucoup de moutons de son cheptel, sans compter des bêtes qu’il n’a pas encore retrouvées, peutêtre emportées parles eaux de ruissellement. Dans le village de Sinthiou Mbal, les eaux ont déjà forcé certaines populations à déménager. Des maisons sont entièrement englouties, poussant leurs occupants à sortir et à évacuer les objets de valeur. Aux abords de la route nationale, le décor renseignait à suffisance sur la gravité du sinistre. Des matelas, des habits, du mobilier étaient éparpillés sur des arbustes pour être séchés.

Selon Gogo Dieynaba, c’est l’érection de la route nationale qui est la cause de cette situation. “Nous sommes devenus des sinistrés à cause de cette nationale. Nous étions inondés, mais jamais de la sorte. Les passages des eaux de pluie sont obstrués par la hauteur de la route. Ainsi, les eaux se déversent dans nos maisons. Nos chambres sont remplies d’eau, nos matériels sont détériorés, je ne parviens pas à retrouver mon téléphone. Mon matelas était submergé, je l’ai fait sortir pour le sécher. Je risque de passer la nuit à la belle étoile’’, se désole la dame, mère de deux enfants. En réalité, elle n’est guère plus malheureuse que le chef de famille, M. S. habitant au village de Boyinadji. “Ma boutique est dans les eaux. Je ne peux même pas vous dire ce que j’ai perdu. C’est inestimable. Je ne vends que des produits comestibles. Et vous savez que ces produits, une fois mouillés, se gâtent complètement. C’est dur, mais je ne peux pas faire autrement que remercier le ciel’’, a-t-il philosophé.

Un camion de vivres pour les sinistrés

Le sinistre s’est généralisé, en particulier dans la commune de Nabadji Civol où il aurait touché la totalité des 58 villages qui composent cette circonscription, si l’on en croit le maire de ladite commune Abdoulaye Sally Sall. “Les dégâts matériels sont très importants dans l’ensemble des 58 villages de Nabadji Civol. Depuis le matin, nous avons été aux côtés des populations. D’ailleurs, un camion rempli de vivres et du matériel pour soulager les sinistrés, a quitté Dakar cet après-midi (lundi) et arrivera mardi au Fouta. Nous distribuerons ces dons aux sinistrés, en attendant le geste du président de la République qui est au courant de la situation. Il va prochainement dépêcher le ministre du Développement communautaire pour s’enquérir de la situation et venir en aide aux victimes des inondations’’, a annoncé le premier magistrat de la ville, actuellement à Dakar.

Route nationale coupée Le directeur des Routes est attendu ce mardi pour trouver, avec la société marocaine en charge du tronçon Thilogne - Ourossogui, les pistes de solution. Car la route nationale est coupée en deux au niveau de la commune de Dabia, à hauteur du village de Tabé. Les gravats aux alentours du pont en construction ont été emportés par les eaux tumultueuses. Les voitures en provenance de Thilogne ne pouvaient plus traverser, les passagers ont dû attendre des heures pour voir la force de ruissellement baisser pour traverser à pied. Mais la situation risque d’empirer, avec les précipitations enregistrées en fin de soirée de ce lundi.

(Avec Enquête)