NETTALI.COM - La grande coalition annoncée récemment en grande pompe n’aura finalement pas vu le jour. Elle a subi des dissidences avant d’avoir existé. Il en restera finalement le Pastef, « Taxawu Dakar », le Pur et les entités politiques de Déthié Fall, Boubacar Camara, Babacar Diop et quelques micro partis… Bougane Guèye Dany a finalement claqué la porte après avoir vainement dénoncé certains actes posés.
De l’autre côté, le Pds, après avoir raté l’échéance de 2019, a créé l’autre coalition, composée entre autres des partis membres de la coalition “Jotna”, ceux du Congrès de la renaissance démocratique (Crd) des Mamadou Lamine Diallo, Thierno Alassane Sall et Abdoul Mbaye, mais aussi d’autres formations comme « Bokk Guis Guis » et And-Jëf de Mamadou Diop Decroix. La coalition « Benno Book Yaakar », au pouvoir, emmenée par Macky Sall, reste intacte, mais est aussi dans l’expectative, Macky n’ayant pas encore sonné l’heure de la répartition des têtes de listes.
Il est en tout cas bien difficile pour les politiciens de s’entendre. Surtout lorsqu’il est question de se regrouper, avec en ligne de mire, des élections qui vont impacter leur avenir voire leur survie. Sonko, Khalifa Sall, Karim Wade, Serigne Moustapha Sy n’avaient, en effet, rien pour s’entendre, si ce n’est une simple logique arithmétique en vue de battre Macky Sall, en dehors des déboires judiciaires que certains d’entre eux, ont en commun. Déboires qui n’auront d’ailleurs pas beaucoup d’impact lors de ces locales (sauf en direction de la présidentielle 2024) pour les trois leaders Sonko, Khalifa Sall et Karim Wade puisqu’il est question d’élire leurs camarades et alliés dans des localités à travers le pays.
Toujours est-il que la large et grande coalition annoncée des Sonko, Khalifa, Karim Wade, Bougane Guèye Dany et compagnie, est restée au stade de l’effet d’annonce, le Pds et "Gëm sa Boop" s’étant retirés. Difficile d’ailleurs de savoir comment il en aurait été autrement, surtout que tout les séparait. Entre les problèmes d’égos, d’orgueil et de leadership et de poids politique, l’entente aurait relevé du miracle, surtout qu’entre Bougane et Ousmane Sonko qui ont en commun d’être de jeunes leaders, il y a comme une sorte de rivalité diffuse. Les évènements de Mars dernier avec Sonko au milieu de la tempête, ont d’ailleurs mis à nu celles-là, avec quelques phrases assassines balancées par ci par là par le leader de « Gëm sa Boopp », jusqu’à ce récent clash qui a valu au journaliste politicien de claquer la porte. Ils ne sont en effet entendus sur rien. Ni sur le logo de la coalition « Yeewwi Askan wi », qui selon Bougane est une combinaison des couleurs de « Taxawu Dakar » et du Pastef, ni sur la question de la présidence de la coalition et encore moins sur les têtes de listes. Que pouvait-il dès lors en rester ? Rien du tout.
Le patron de D-médias s’était même laissé aller à des commentaires peu amènes, qualifiant l’origine de leur différend de « affairou deum » (une affaire d’anthropophage). Comme pour dire que « ce sont des gens qui se mangent entre eux. ». Il les verra même comme des non démocrates, les comparant à Macky Sall. Il parlait en particulier de Sonko et de Khalifa Sall qu’il a au passage égratignés, déclarant qu’il avait l’impression que l’ancien maire de Dakar lui parlait comme son petit-fils, lorsqu’il s’est agi de signer la charte. « Bougane, il faut soit signer, soit ne pas signer. Pas de signature sous réserve », lui a dit Khalifa Sall si on en croit celui-ci qui n’a d’ailleurs pas manqué au passage de réduire le Pastef à un « parti wagon » : « Moi, je parle directement à Khalifa Sall. Je le cite, parce que les autres ne sont que des partis yobalema (littéralement : partis accompagnateurs). Ils n’ont pas le choix. Moi, je n’en fais pas partie. Aujourd’hui, Gëm Sa Bopp est une réalité. On est en train d’abattre un travail de titan sur le terrain. On ne peut plus citer deux opposants qui font peur au régime, sans citer Gëm Sa Bopp ». Voilà pour le côté irrémédiable de la rupture.
Quoi qu’il en soit, la messe semble être bien dite. Et il ne reste à la coalition des Sonko, Khalifa Sall, Serigne Moustapha Sy, Boubacar Camara, Babacar Diop et autres, que de chercher à pallier le déficit de représentativité à l’échelle nationale par une offre programmatique digne de ce nom, dans une logique de solutions aux nombreux problèmes des populations, s’ils veulent exister dans ces élections. Ce qui passe par un travail de terrain et de proximité. Si les leaders Sonko, Moustapha Sy et Khalifa Sall sont déjà bien populaires en particulier à Dakar et à Ziguinchor, cette coalition a la faiblesse de regrouper une grande proportion de mouvements ou de partis sans véritable poids électoral. Le PDS malheureusement parti et jouissant par ailleurs d’une bonne structuration et d’une bonne représentativité au niveau des départements et communes, aurait pu être d’un grand apport.
Cette coalition aura également à faire face, comme la Coalition « Benno Book Yaakaar » et d’autres, à la lancinante question des investitures. D’aucuns lui prédisent une guerre des égos qui pourrait constituer les germes de son implosion. Et pour cause, l’on s’achemine vers des élections locales où il faudra des arbitrages périlleux à la base. Et les ambitions se font déjà entendre. A Saint-Louis par exemple, Cheikh Bamba Dièye rêve de retrouver son fauteuil de maire. Même cas de figure à Thiès où il faudra arbitrer entre Birame Soulèye Diop de Pastef, Babacar Diop des Fds, entre autres. Pour le cas de la mairie de Dakar, Barthélemy Dias de « Taxawu Senegaal » semble avoir une longueur d’avance. Mais rien ne garantit qu’il aura le soutien de toute la coalition. A Ziguinchor, Ousmane Sonko est investi par son parti, mais il n’a toujours pas donné de suite. Les mêmes cas de figure risquent de se poser dans bien d’autres localités du pays.
Il ne faudra surtout pas se faire d’illusions, les partis sans grand poids politique, chercheront à ne pas en douter, à imposer leurs individualités politiques d’envergure. Il sera en effet difficile de ne pas voir un Boubacar Camara, un Déthié Fall ou un Babacar Diop, prétendre à des candidatures et pas des moindres. Ce qui voudra dire qu’il faudra pour toutes ces coalitions, s’armer de raison et prendre en compte la réalité du terrain, localité par localité, tout en ne pas comptant pas uniquement sur l’exposition médiatique, mais bien sur un travail de terrain sans relâche.
Pastef et "Yeewi Askan wi, à l'épreuve des locales
Dans tous les cas, les guerres fratricides ne manqueront pas de voir le jour. Engagé dans la coalition “Yewwi askan wi”, Pastef fait face à une vague de contestations dans plusieurs localités du pays. La cause : les militants ne s’entendent pas sur le choix des candidats aux prochaines élections municipales et départementales. Des villes comme Kaolack, Ziguinchor et Bignona sont déjà touchées. Dans la capitale du Saloum, c’est le choix de Fadilou Keïta (fils de Nafy Ngom Keïta, l’ex-patron de l’Inspection générale d’Etat) comme candidat à la candidature de la coalition “Yewwi askan wi” qui est au centre des tensions. Selon des militants du parti d’Ousmane Sonko, plus de 39 cellules regroupant plus de 800 militants de la commune de Kaolack ont été exclues du vote. Ces responsables dénoncent “la méthode opaque et cavalière” avec laquelle la coordination communale a choisi Fadilou Keïta comme candidat à la candidature de “Yewwi askan wi” pour le fauteuil de maire de Kaolack.
Même scénario dans la commune de Bignona. Dans cette ville du Sud du pays, ce sont les “Patriotes” favorables à la candidature de Bacary Diatta qui mettent la direction de leur parti devant ses responsabilités. Ils refusent que leur soient imposés des candidats aux prochaines élections. Leur porte-parole, Bacary Diédhiou, s’en prend à Birame Soulèye Diop, administrateur du parti, Bassirou Diomaye Faye, le patron de la cellule des cadres, et Cheikh Alioune Bèye, chargé de la massification et de la vie militante, d’être au cœur des manœuvres visant à imposer des candidats. “Je pense qu’ils ont suffisamment de problèmes à régler chez eux“, a laissé entendre Diédhiou. Au même moment, le camp du docteur Chérif Saloum Diatta tente de mettre la pression sur la direction nationale de Pastef.
Des tiraillements, le parti d’Ousmane Sonko en connaît également à Ziguinchor. D’ailleurs, aucun département de la région n’est épargné. Plusieurs rencontres tenues par les responsables de Pastef ont été perturbées par ces tiraillements entre militants. Et beaucoup craignent que ces querelles finissent par perdre Pastef-Les patriotes.
Sur le plateau de Walf Tv ce mardi, Moustapha Sarré, directeur de l’école du parti Pastef, a tenté de rassurer les uns et les autres. Selon lui, le directoire national de Pastef n’interviendra pas dans les choix de la base. Suffisant pour rassurer tout le monde ? Difficile à dire. Du moins pour le moment.
Au sein de la coalition “Yewwi askan wi”, Dakar est un cas. Il n’y a qu’une certitude pour le moment : le candidat pour la ville de Dakar sortira des rangs de “Taxawu Senegaal” de Khalifa Ababacar Sall. C’est du moins ce sur quoi tous les partis membres de cette coalition semblent s’accorder. Toutefois, c’est au sein même de la “Taxawu Senegaal” que les problèmes vont se poser. Candidate à sa propre succession, Soham El Wardini, la mairesse sortante de Dakar, est membre de cette “sous-coalition”. Elle était d’ailleurs présente à la cérémonie de lancement de la coalition “Yewwi askan wi”. “Elle est membre de l’Alliance des forces de progrès (Afp de Moustapha Niass, ndlr), mais elle n’est plus active dans ce parti“, révèle une source proche de “Taxawu Senegaal”. Autrement dit, Soham El Wardini ne peut pas espérer une investiture de la coalition Benno Bokk Yakaar à laquelle appartient l’Afp de Moustapha Niasse. Pourtant, celle qui avait remplacé Khalifa Ababacar Sall lors de ses déboires judiciaires espère bien garder son fauteuil à la mairie de Dakar. Seulement, elle n’est pas la seule candidate à la candidature de “Yewwi askan wi”.
Membre de “Taxawu Senegaal” au même titre que Soham El Wardini, Barthélemy Dias veut, lui aussi, devenir maire de Dakar. Et l’actuel maire de Mermoz Sacré-coeur fait tout pour être choisi comme candidat de “Yewwi askan wi” à la ville de Dakar. La preuve : Dias n’est pas candidat à sa succession à la mairie de Mermoz Sacré-coeur. “Seule la ville de Dakar l’intéresse“, confie un de ses proches. Barthélemy Dias a, d’ailleurs, pesé de tout son poids pour que Khalifa Sall et Ousmane Sonko de Pastef soient dans la même coalition. Et il semble avoir une longueur d’avance sur Soham El Wardini. Comment “Taxawu Ndakaru” compte gérer ce cas Barthélemy-El Wardini ? Est-il possible de convaincre la mairesse sortante de ne pas se porter candidate à sa propre succession ? “Il n’y aura pas de problème. On trouvera la meilleure formule“, assure un membre de la coalition de Khalifa Ababacar Sall.
"Benno Book Yaakaar" dans l'expectative
Mêmes difficultés pour la coalition « Benno Book Yaakaar ». A Dakar, par exemple, les partisans du ministre de la Santé et maire de Yoff mettent déjà la pression. Des mouvements se créent pour pousser Macky Sall à porter son choix sur Abdoulaye Diouf Sarr. Au même moment, d’autres responsables de l’Alliance pour la république (Apr) affûtent les armes. C’est le cas de Mame Mbaye Niang. Selon certaines indiscrétions, il aurait fini de constituer son équipe pour engager la bataille. A ces deux-là, il faut ajouter Amadou Ba qui cache encore son jeu. Et la même situation risque de se produire dans des communes comme Parcelles Assainies avec le maire “transhumant” Moussa Sy dont les responsables locaux de l’Apr ne veulent plus.
Mais Dakar ne sera pas le seul terrain miné pour le chef de Benno Bokk Yakaar. Il va devoir aussi arbitrer à Rufisque, Keur Massar, Kaolack, Mbacké, Thiès… Autant dire que les frustrations ne manqueront pas au lendemain des investitures de Benno. Pis, avec cette élection du maire au suffrage universel direct, rien n’exclut que des responsables se présentent aux élections contre la volonté de leur parti ou coalition. Autrement dit, la pression n’est pas seulement du côté de l’opposition, même si Benno semble plus sereine. Du moins pour le moment.
Le PDS crée sa coalition
“En direction des élections départementales et municipales du 23 janvier 2022, nous, partis politiques, regroupements de partis politiques et de mouvements citoyens avons décidé, au terme d’échanges pragmatiques et profonds, de mettre en place une coalition électorale fondée sur le réalisme, la transparence, l’équité et l’intérêt supérieur des citoyens.” C’est en ces termes que le Parti démocratique sénégalais (Pds) et ses nouveaux alliés annoncent la naissance de sa coalition. Dans la nouvelle structure, il y a les partis membres de la coalition “Jotna”, ceux du Congrès de la renaissance démocratique (Crd), mais aussi d’autres formations Bokk Gis Gis et And-Jëf de Mamadou Diop Decroix.
Dans le communiqué , il est indiqué que “cette coalition présentera des listes de candidats dans tous les départements, villes et communes de l’étendue du territoire national“, ajoutant que « des équipes œuvreront au rassemblement le plus large possible de tous les acteurs et partenaires potentiels de leur circonscription électorale en vue de constituer des dynamiques crédibles et représentatives capables de gagner et de conduire les changements nécessaires à l’amélioration indispensable de la gouvernance des collectivités locales et des conditions de vie des populations.”
Seulement, il n'existe pas encore de nom pour cette dite coalition et les discussions continuent. Il faut juste noter que bien avant la constitution de cette coalition, les libéraux s’étaient déjà attelés au placement et à la vente des cartes en direction des prochaines échéances électorales, avec un déploiement de l’ensemble des superviseurs et commissaires sur l’étendue du territoire national. Une manière de se compter. Le PDS , malgré ses départs, a toujours cette assise nationale et comme les autres partis, il n’échappera pas aux contestations et querelles de positionnement dans sa coalition.
Bien malin en tout cas celui qui empêchera les politiciens de se quereller surtout lorsqu’il est question de compétition électorale et de partage de postes. Thierno Bocoum qui avait qualifié la coalition "Yeewi askan wi" à l'origine, de "coalition de pression" en référence aux déboires judiciaires des trois (Khalifa, Sonko et Karim Wade), n'a pas pardonné à ces derniers (désormais Khalifa Sall et Ousmane Sonko), leur acte: "Ils ont brisé l'entente sur laquelle nous travaillions tous", a déclaré celui-ci avant d'ajouter : " les initiateurs de Yeewwi Askan Wi se sont bien gourrés et ça leur a explosé en pleine figure".
Bougane lui, a aussi crée sa propre coalition qu'il a semble t-il créé en y intégrant des artisans, acteurs économiques et des mouvements politiques. Reste à se demander ce que cela pèsera, même si à "Jakarloo" de ce vendredi 10 septembre, a été annoncée la poursuite des discussions avec "Yeewi Askan wi" par un des des invités membres de ladite coalition.