NETTALI.COM - L’épreuve sera comme un examen de passage pour le Président Adama Barrow. Elu en décembre 2016, le tombeur de Yahya Jammeh a décidé de se présenter à nouveau, malgré la promesse qu’il avait faite, après son élection, d’assurer une transition de trois ans. Les Gambiens auront le dernier mot ce 4 décembre.
C’est le dernier virage d’une campagne pour une Présidentielle pas comme les autres. Il s’agit du premier scrutin depuis la chute, en décembre 2016, du président Yahya Jammeh, qui a régné d’une main de fer sur le pays durant plus de 20 ans. Entamée le 9 novembre dernier, la campagne électorale a pris fin ce mercredi 2 décembre 2021. Après avoir sillonné les coins et recoins du pays pendant trois longues semaines, les candidats en lice vont se rendre dans les urnes pour le scrutin de ce samedi 4 décembre. 26 dossiers de candidature avaient été déposés pour briguer la magistrature suprême gambienne, mais à l’arrivée, cinq candidats ont désisté et la Commission électorale indépendante n’a validé que six candidatures, parmi lesquelles celle du président sortant, Adama Barrow. Le tombeur du ‘’tout puissant’’ Yahya Jammeh s’était certes engagé à assurer une transition de trois ans avant de céder le pouvoir, mais Barrow a comme qui dirait pris goût à la chose. Il fera finalement un mandat de cinq ans et en redemande. Et force est de constater que son parti, le Npp (National People’s Party-Parti national du peuple), créé en 2019, après son divorce avec la coalition UDP qui l’avait porté au pouvoir, a réussi à s’imposer. Et en cinq ans de règne, Barrow a fait sortir la Gambie de son isolement diplomatique de plusieurs années, le pays a de nouveau adhéré au Commonwealth en 2018 et revu ses relations avec ses voisins tels que le Sénégal et la Guinée Bissau. Cette présidentielle sera un test grandeur nature pour Barrow, mais surtout pour la transition démocratique du pays. Ce sera aux électeurs gambiens de décider s’ils veulent continuer l’aventure avec Barrow, ou essayer un nouveau président.
L’ombre de Jammeh
Bien qu’exilé en Guinée équatoriale, après avoir été poussé au forceps à quitter le pouvoir, et le pays, en janvier 2017, l’ombre de Yahya Jammeh plane toujours sur le ciel gambien. Durant cette campagne présidentielle, l’ancien chef d’Etat a été l’absent le plus présent. Allié d’un des plus farouches opposants du Président Barrow, en l’occurrence Mammah Kandeh, Jammeh n’a pas hésité à mettre son grain de sel. Depuis Malabo, il est intervenu par téléphone lors des meetings de ce candidat pour dénoncer la gestion de Barrow, ravissant ainsi la vedette de la campagne en faisant les choux gras de la presse. Une immixtion qui a fini par exaspérer le président et candidat à sa propre succession, Adama Barrow. «Je mets en garde Mama Kandeh. Nous voulons la paix dans ce pays, Yahya Jammeh vit en exil. Son exil lui enlève le droit de participer à la politique gambienne, l'expression de Yahya Jammeh sur les plateformes politiques de Kandeh peut provoquer des conflits dans ce pays. Je le mets en garde sérieusement et je demande à la Commission électorale de mettre en demeure Mama Kandeh», lançait-il lors d’un de ses meetings. Quelques semaines avant cela, l’idée d’une alliance, jugée contre nature par certains, entre le NPP de Barrow et l’APRC (Alliance patriotique pour la réorientation et la construction) de Yahya Jammeh, avait été agitée. Mais elle a été vivement rejetée par l’opinion, Yahya Jammeh, considéré par beaucoup de Gambiens comme un dictateur, auteur de nombreux crimes, actes de tortures et violations des droits humains. Une Commission Vérité, réconciliation et réparations avait d’ailleurs été mise en place, mandatée par Barrow lui-même, pour enquêter et entendre des témoins et victimes de Jammeh. D’où la surprise générale à l’annonce de cette alliance, que les partisans de Barrow ont justifiée par des «considérations de sécurité nationale et de réconciliation», «une alliance entre deux partis politiques légalement déclarés et non entre individus», précisaient-ils. Mais contre toute attente, Yahya Jammeh s’est démarqué de cette alliance, ordonnant même le limogeage des responsables de son parti qui ont signé l’accord. Mais n’étant plus qu’une figure honoraire de la formation politique, il n’a pas droit de veto et son refus n’a pas empêché l’alliance d’être maintenue. Le duo NPP-ARPC trace tranquillement sa route vers un deuxième mandat pour Adama Barrow.