NETTALI.COM - Un projet de loi sur la criminalisation de l’homosexualité devrait être présenté dans deux jours au président de l’Assemblée nationale. Il prévoit, entre autres durcissements, de déchoir de leurs droits civiques, civils et de famille, les homosexuels condamnés.
C’était l’acte de trop. Au mois de mai, l’épreuve d’anglais proposée aux Terminales de douze lycées du département de Rufisque, provoque l’indignation de tout un peuple. Le texte sur lequel les élèves doivent réfléchir, parle des choix de vie d’un homosexuel et questionne sur la liberté d’orientation sexuelle. Une propagande qui, bien que punie, devrait avoir son épilogue cette semaine. Ce mercredi, quatre députés vont porter, devant le président de l’Assemblée nationale, une proposition de loi modifiant l’article 319, alinéa 3 du Code pénal, en instituant la criminalisation des Lgbt+ (Lesbienne, gay, bisexuel et transgenre).
«La proposition de loi qu’il me revient de remettre à votre honorable autorité, a la modeste prétention de faire l’écho des légitimes inquiétudes de l’écrasante majorité des croyants de ce pays, et de nombreuses autorités religieuses du Sénégal.» Ces lignes qui commencent la proposition de loi, sont signées des députés Cheikh Bamba Dièye, Aliou Souaré, Moustapha Guirassy et Mamadou Lamine Diallo. Ce dernier a été le premier à donner son aval à l’association « And samm jikko yi», le véritable instigateur travaille sur ce projet depuis plus de trois mois. D’abord, la consultation citoyenne avec une tournée dans les 45 départements pour recueillir l’avis des Sénégalais. Ensuite, les audiences avec les chefs religieux, l’église catholique et les chefs du bois sacré. Enfin, les réunions avec les partis politiques et la société civile dans toutes ses composantes. Il s’agit pour l’association de recueillir l’unanimité sur le texte avant de le proposer aux députés susceptibles de le porter. Au total, elle a comptabilisé plus d’un million de signatures encourageant la répression de l’homosexualité au Sénégal.
Si elle est votée, cette loi corrigera un vide juridique longtemps décrié. L’article 319 du Code pénal voté en 1966, ne parle pas d’homosexualité à proprement parlée. Elle réprime seulement les actes impudiques ou contre-nature commis par des personnes du même sexe. Avec cette proposition, le Code pénal sera doté d’un délit d’homosexualité et de toutes pratiques assimilées. A savoir le lesbianisme, la bisexualité, le transgenre, l’intersexualité, la nécrophilie et la zoophilie. « Le phénomène de l’orientation sexuelle au sens large heurte la morale et les croyances, frise l’indécence, sape la cohésion sociale et détruit les fondamentaux du pays de valeurs que nous sommes. II prend des proportions inquiétantes et dangereuses », conclut l’exposé des motifs.
L’apologie de l’homosexualité punie de 3 à 5 ans d’emprisonnement
Avec cette proposition de loi sur la criminalisation de l’homosexualité, ce sera la deuxième fois que le député Aliou Souaré portera un projet. Il sait donc que de la proposition au vote, il y a toute une procédure à laquelle le texte sera soumis. Son rôle s’arrêtera au dépôt ce mercredi sur la table du président de l’Assemblée nationale. Le projet est ensuite examiné par le bureau qui débat sur la recevabilité qui obéit à quelques conditions. «Si, par exemple, la loi comporte des aspects financiers qui peuvent modifier le budget, elle peut être irrecevable. Si au contraire, elle n’a aucune connotation financière et qu’elle ne fait que modifier une loi déjà existante, comme c’est le cas ici, elle est transmise au président de la République », dit Aliou Souaré. Après réception, Macky Sall aura un délai de 10 jours pour réagir. Au delà, la procédure reprend son cours avec la transmission du texte au niveau de la conférence des présidents qui choisit la commission qui devra étudier le texte. Normalement, le projet de loi sur la criminalisation de l’homosexualité devrait revenir à la commission des lois. La procédure prendra fin avec la présentation en plénière pour le vote du texte. Si aucune modification n’est faite, les homosexuels reconnus coupables d’actes contre-nature risquent jusqu’à 10 ans d’emprisonnement «sans possibilités de circonstances atténuantes ». Quant à l’acte sexuel commis avec un animal, il sera puni au maximum de 5 ans de prison. Ces mêmes peines s’appliqueront aussi à toute tentative de commission de ces infractions. Un fait inédit pour le Code pénal qui ne punit, pour le moment, que l’acte constitué. Autre durcissement de la loi voulue par «And samm jikko yi », il sera aussi institué un délit d’apologie à homosexualité «par tout moyen de diffusion publique ou le financement de toute activité relative à l’agenda Lgbt+ », avec une peine maximale de 5 ans ferme.