NETTALI.COM - Les cimetières musulmans du quartier de Rufisque ont servi de cadre, hier vendredi, à un incident qui a failli déboucher sur des troubles à l’ordre public. Il est question d’une manifestation spontanée organisée par des jeunes du coin, qui se sont vigoureusement opposés à l’inhumation d’un présumé homosexuel.
Il est 14 heures passées de 20 minutes. Au quartier Dangou de Rufisque, les fidèles musulmans avaient à peine fini de sacrifier à la grande prière du Vendredi. Au même instant, des groupuscules de jeunes, à bord de scooters et de motos Jakarta, débarquent aux abords du portail de ces cimetières ; une route qui passe pour être la plus empruntée à Rufisque. Dans la foulée, ils sont rejoints par d’autres individus arrivés à pieds. Curieusement, le silence de mort qui, en principe, prévaut dans ce lieu de culte en pareille circonstance, laisse la place à des bougonnements. L’instant d’après, des voix s’élèvent et certains habitants expriment déjà leur courroux. Excités, jeunes et vieux articulent à présent leur colère par des gestuels et vociférations qui en disent long sur leur exaspération. «Pour rien au monde, nous n’accepterons qu’un ‘’goordjiguene’’ (homosexuel, Ndlr), soit inhumé dans ce cimetière», lancent les contestataires.
Comme une traînée de poudre, l’histoire fait le tour du quartier Dangou et ses environs immédiats, où les commentaires allaient déjà bon train. Habillé d’un caftan blanc, égrenant un chapelet, un autre contestataire se lève, se tourne vers les habitations et use ses cordes vocales. «Il existe des érudits qui reposent dans ce cimetière. Il est inadmissible que l’on admette qu’un homosexuel soit enterré à leurs côtés. Je suis prêt à donner ma vie pour empêcher cette abomination», fulmine-t-il. Un sentiment entièrement partagé par les autres manifestants. «Nous avons des guides, des Imams et des hauts dignitaires religieux qui reposent dans ce lieu saint. Inhumer un homosexuel ici, c’est souiller leur mémoire et celle de tous ceux qui y reposent», peste l’un d’eux.
Posté dans la foule, un autre manifestant de révéler que l’information faisant état de l’inhumation d’un homosexuel dans ces cimetières, est parvenue à temps aux habitants du quartier qui, spontanément, se sont rués vers les lieux pour s’y opposer avec la dernière énergie. Selon toujours nos interlocuteurs, le défunt était notoirement connu au quartier Santhiaba de Rufisque, sous le sobriquet de Diagne Ndanane. Dans ce quartier, renseignent nos interlocuteurs, «les notables du coin, informés de la mort de Diagne Ndanane, n’ont pas daigné s’en mêler outre mesure. Ainsi, au terme de la prière du Vendredi, ils sont tranquillement retournés chez eux, laissant la famille éplorée s’occuper de l’inhumation du défunt encombrant. Au quartier Santhiaba, des habitants vont, sous le couvert de l’anonymat, assurer que le défunt Diagne Ndanane, âgé d’une vingtaine d’années, ne cachait pas son penchant homosexuel. Aux dernières nouvelles, le convoi funèbre est reparti des lieux vers une destination inconnue.