NETTALI.COM - « Fin du journalisme, sacre de la corruption ? ». Tel est le titre de l’ouvrage de Ben Makhtar Diop publié récemment à la maison d’édition «Premier». Le journaliste qui a fait les beaux jours de chaînes de radios et de télévision, en a-t-il eu marre d’entendre les journalistes se faire traiter de «menteurs», de «nullards» et surtout de «corrompus» ? Il semble bien que oui.
Tout au long de ce livre de 172 pages, il a fait le choix de confirmer le bien fondé de certaines de ces accusations, même s’il ne faut pas pousser le bouchon trop loin dans le sens d’une généralisation qui serait bien insensée. A partir de faits, d’anecdotes, de récits et de citations, il a ainsi tenu à démontrer ses assertions.
Un ouvrage qui ne va certes pas faire que des heureux. Mais qu’il faudra surtout lire avec beaucoup d’attention, sans occulter ce point d’interrogation à la fin du titre. Un titre qui se veut à la fois interrogateur et provocateur puisque le journaliste dresse un diagnostic sans complaisance de l’envers d’une certaine presse, avec force détails. Un réquisitoire qui interpelle en tout cas tous les hommes des médias. Non pas que Ben Makhtar croit qu’il n’existe plus de journalistes idéalistes, vertueux et à cheval sur l’éthique et la déontologie, mais bien parce qu’il pense que ceux-là qui ternissent l’image de cette noble profession, doivent prendre conscience de l’ampleur du désastre qu’ils causent. A la vérité, l’auteur souffre dans sa chair, de ce métier aujourd’hui si dévoyé.
Du courage, il lui en a fallu. Car le risque est gros. Celui de se mettre à dos une bonne partie des confrères qui se vautrent dans le corporatisme, préférant fermer les yeux sur les tares d’une profession exceptionnelle qui n’a pas le droit de prendre les mêmes travers que les autres pouvoirs, aussi consacrés soient-ils : pouvoir exécutif, législatif et judiciaire.
Qui oserait imaginer la fin du journalisme ? Pour le remplacer par quoi ? Que ceux-là qui croient que les réseaux sociaux sont en train de supplanter le journalisme, se détrompent. Comme cet invité présent à la cérémonie de dédicace du livre qui laissait penser cela. C’est d’ailleurs ce déficit d’authentification des éléments filmés voire photographiés puis diffusés qui fait des réseaux sociaux le lit des fake news. Ce n’est pas non plus parce qu’une personne s’offre une tribune sur le net qu’elle devient de fait un chroniqueur ; ou que tout ce qu’il dit devient le Coran ou la Bible. Les réseaux où cohabitent toutes sortes de personnes aux niveaux et aux différences de background parfois si énormes que les compréhensions des messages s’en retrouvent également différents.
La production d’une information est de loin plus rigoureuse, en plus d’être soumise à des exigences. Elle obéit à une démarche de collecte, de recoupement et de diffusion, mais par des personnes formées à cet effet. Elle repose aussi sur une certaine temporalité, des lieux où les évènements se passent, des circonstances, des parties prenantes et aborde aussi l’antériorité des faits tout en tenant compte de leur évolution.
L’information découle en réalité de recoupements auprès de sources crédibles. De sources documentaires également. Que l’on ne s’y trompe donc point. Le fait d'avoir filmé un ouvrier tombé d'un échafaudage, n’informe pas forcément sur les causes réelles de l'accident, ses circonstances, l’identité de la victime, le lieu, le moment et encore moins sur l’état de cet échafaudage. Bien sûr, une image ou une photo peut livrer une information, mais la donne-t-elle dans ses moindres détails ? Le journalisme est un métier. La prise d’une photo ou d’une vidéo est l’affaire d’un instant et d’une occasion. En fait, les deux ne font qu’illustrer une information recoupée et rédigée par un journaliste. C’est un complément, à une information.
Au nom d’une presse à cabales et partisane !
C’est pourquoi ce qui est à déplorer et à dénoncer, ce sont ces journalistes-là qui font mal leur travail en laissant finalement croire qu’il serait mieux de se fier aux réseaux sociaux qui divulguent des torrents d’ « informations » puisque la presse ne serait plus fiable. Ceux-là se fondent désormais sur de la rumeur, ne recoupent plus suffisamment les infos à leur disposition, ou se fixent des buts inavoués qui aboutissent à des partis-pris, du dénigrement, des cabales et autres. Combien de destins ont été brisés par une certaine presse ? Combien de réputations ont été entachées par des hommes de médias ? Des dossiers à forte médiatisation, Dieu sait qu’il y en a eus avec une presse à cabale qui s’est faite beaucoup remarquer ces derniers temps.
Dans le traitement du dossier Sonko-Adji Sarr par exemple, la presse n’a jamais été aussi divisée avec un traitement parfois si tendancieux et assaisonné d’affabulations. Notamment sur un supposé état de grossesse de la jeune femme. Combien ont affirmé qu’il y a eu viol sans pouvoir produire des faits qui attestaient de cela ; ils n’avaient ni vu des PV d’enquêtes, ni procédé à des recoupements auprès de sources crédibles. Comment ont-ils alors pu tirer certaines conclusions ? Il n’a d’ailleurs pas été étonnant que des hommes de médias jugés partisans aient été pris comme cibles de violences car ceux qui les avaient attaqués, les avaient trouvé trop tendancieux dans le traitement de certaines infos. Des jugements d’un certain travail journalistique qui pouvait être tout aussi subjectif.
Avec l’affaire Akilee, ce dossier aux forts relents médiatiques, l’Agence de Régulation des Marchés publics (ARMP) a fini par conclure, suite à une plainte d’un syndicat de la Senelec, qu’il n’y a eu aucune nébulosité et encore moins d’irrégularité dans ce contrat. Et Dieu sait pourtant que des journaux ont rivalisé de plusieurs dizaines de «Unes» à charge contre la start up, avec force de faits qui n’existaient que dans leur imagination, lorsqu’ils n’aveint pas écrit sous la dictée. La suite, on la connaît, un marché par entente directe a été attribué à une société israélienne Powercom, sans qu'il n y ait une seule ligne de la part de ces même journaux manifestement intéressés par le fait de faire leur travail de journalistes.
Lorsqu’il s’est aussi agi de limoger Amadou Ba, Aly Ngouille Ndiaye, Makhtar Cissé, Aminata Touré, Boun Abdallah Dionne, etc, n’a-t-on pas imaginé toutes sortes de griefs contre ceux-là dans le seul but de conforter les ambitions à eux prêtées ? Il fallait bien trouver des raisons. Une certaine presse avait servi de caisse de résonnance. Aujourd'hui, ils sont redevenus quelque peu fréquentables. Des journalistes prêchent pour la paroisse d'Amadou Ba pour le poste de Premier ministre ; Certains parmi ceux-là sont également cités parmi les possibles à nommer.
Que penser de cette déclaration de Cheikh Yérim Seck sur le plateau de Maïmouna Ndour Faye de la 7 TV, selon laquelle, Amadou Ba l’avait appelé, lors des locales pour lui demander de soutenir lui et ses confrères, Abdoulaye Diouf Sarr, le candidat de Benno Book Yaakaar ? Le pire est que le journaliste assume sa relation avec Amadou Ba qu’il appelle « grand frère » ! Pour Maïmouna Ndour Faye, « la déclaration qu’a faite Cheikh Yérim au sujet de l’appel d’Amadou Ba, n’engage que lui. »
N'a-t-on pas, par exemple vu, lors de ces dernières locales, des journaux qui avaient la même une ? Une sacrée coïncidence ! Les règles n'imposent-elles pas qu’ils mettent en exergue un publi-reportage lorsque c’est le cas ? La suite prouvera qu’ils roulaient pour un certain candidat.
De même, invité chez Maïmouna Ndour Faye sur la 7 TV, Bassirou Diomaye Faye déplorait la posture de Cheikh Yérim Seck, alors que la journaliste s’excusait auprès des télespectateurs qui s’étaient offusqués que le journaliste les traitât « d’électorat captif » pour ne pas dire « alimentaire ». « Tout ce que Cheikh Yérim Seck dit, il le fait exprès. Il est super intelligent, mais il n’est pas droit. Il y a deux cas : lorsque BBC a fait son reportage en pleine campagne sur l’affaire Petrotim, elle a attendu l’issue des élections pour le diffuser afin de ne pas influencer les résultats. Ça, c’est de la grandeur journalistique. On a droit à ça ici aussi au Sénégal, et les gens en sont capables. A la même époque, Cheikh Yérim Seck et l’Observateur ont écrit que Ousmane Sonko qui avait commencé à battre campagne, a été financé par Tullow Oil, alors que tout le monde sait que tout financement étranger est illicite et entraîne de fait, la dissolution de tout parti politique qui en bénéficie. La preuve quand on a fait un « némékou tour », on nous a menacés de dissoudre notre parti. Si Cheikh Yérim Seck savait ce que le pouvoir ignore, le procureur l’aurait convoqué.. »
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si certains journalistes sont aujourd’hui associés à des hommes politiques, à des dirigeants d’entreprises publiques et à des hommes d’affaires. Le journaliste peut évidemment être en contact avec tous ces acteurs de la vie politique et économique pour des raisons évidentes de recherche d’informations, mais il ne devrait nullement être au service de ceux-là. Le journaliste peut être amené à invoquer la clause de conscience lorsque sa proximité avec une partie prenante dans une info, est telle qu’il ne peut être neutre dans son traitement. Mais dans tous les cas, l’essentiel est de garder une distance critique qui permette de ne traiter que des éléments factuels sourcés et recoupés. Il s’agit de comprendre que ceux qui sourcent les journalistes, ont bien souvent intérêt dans l’info qu’ils délivrent.
La presse, un pouvoir pas comme les autres
Ah ces journalistes, de sacrés donneurs de leçons devant l’éternel ! Ils aiment à s’occuper des trains qui n’arrivent pas à l’heure, sans toutefois se soucier des leurs. Le risque d’écrire un livre sur eux est gros. Celui de se faire considérer comme un « traître » ou d’être vu comme un journaliste voulant apparaître comme un « monsieur propre » ou un héros.
La presse est à la vérité, le dernier rempart de la démocratie. Elle n’est ni un pouvoir institué, ni un pouvoir consacré. Il est, disons-le clairement, ce pouvoir qui est dénommé « 4ème pouvoir », non pas de manière fortuite, mais bien parce qu’elle est une sentinelle de la démocratie qui informe le peuple, qui l’éduque, l’éveille, l’éclaire sur tout ce qu’il ignore et qui le pousse à prendre les bonnes décisions au moment de sanctionner positivement ou négativement un régime. Elle est aussi cette lumière qui lui permet d’adhérer ou non à des décisions de gouvernants, suivant ses intérêts, mais également de voir si toutes les décisions qui se prennent en son nom, sont justes et bénéfiques pour lui. Que serait une démocratie sans presse libre et forte ? Elle ne peut assurément pas en être une. C’est pourquoi elle se doit d’être peuplée d’hommes vertueux, bien formés, qui savent un peu de tout, mais aussi spécialisés sur des sujets spécifiques en apportant une valeur ajoutée dans le but d’informer juste et vrai avec de vrais éclairages.
L’annonce de la parution de cet ouvrage n’a en tout cas pas semblé beaucoup faire plaisir à Maïmouna Ndour Faye. Une réaction d’indifférence qu’elle ne devrait pourtant pas adopter pour n’avoir pas lu le livre. En effet, au cours d’une émission, « l’invité de MNF » sur 7 TV, Bassirou Diomaye Faye de Pastef informait la journaliste de la publication du livre : « Votre collègue-là, Ben ,je ne sais plus comment il s’appelle, a publié un livre ». Et la journaliste de rétorquer : « Ben Makhtar Diop ». Et Diomaye Faye, de revenir à la charge : « oui, il a publié un livre « Fin du journalisme, sacre de la corruption ? ». Réponse de la journaliste «Oui non, je ne l’ai pas lu » Et celle-ci, d’ajouter : « Oui, mais ça n’engage que lui. Si son journalisme a pris fin, c’est son… », répond à nouveau Maïmouna Ndour Faye. «Il ne faut pas réagir comme ça, vous n’avez pas lu le livre. Ce que je veux dire c’est que le diagnostic froid que les gens font de toutes les corporations, y compris du journalisme, ne doit pas être destiné qu'aux hommes politiques », souligne Diomaye Faye. Une attitude de mépris pas convenable du tout, alors que le livre a le mérite de poser de vraies questions !
Maïmouna est une bonne journaliste qui aime à challenger ses invités sur des questions éthiques et de bonne gouvernance, mais sa réaction à la publication de cet ouvrage aurait pu être un peu plus sympathique, même si l’on peut toutefois mettre sa réaction sur le compte du sujet qui était bien crispant ce jour-là. Car alors elle était lancée dans une justification et un rejet de cette « presse achetée » que certains détracteurs ont cette fâcheuse tendance à balancer aux journalistes. Diomaye Faye lui répondra d’ailleurs qu’elle doit rester zen puisqu’elle sait si elle est concernée ou pas. Son conseil était tout simplement de ne pas verser dans le corporatisme ?
Des journalistes solidaires et en accord avec la publication de cet ouvrage de Ben Makhtar, il y en a eu beaucoup pour partager son constat. En attestent tous ces doyens de la presse qui étaient présents à la cérémonie de dédicace : Babacar Diagne, Dajdji Touré, Mamadou Koumé, Pape Alé Niang, Mamadou Thior, Abdoulaye Fofana Seck, etc et des hommes politiques : Doudou Wade, Moustapha Diakhaté, Fatou Blondin Diop, etc
« Journalistes menteurs », « journalistes corrompus », « journalistes nullards », sans distinction aucune. Des qualificatifs qui reviennent souvent de la part du grand public sans retenue et sans nuance, avec une généralisation trop facile et déconcertante.
La vérité est que le grand public ne fait pas forcément la différence entre les journalises formés et ceux qui ont fait irruption dans la profession, sans avoir la qualification et le background requis. Et il n’a pas forcément tort. Ce qu’il voit, c’est l’acteur des médias. Tout simplement. Difficile en effet à ses yeux de voir ce qui fait la différence entre le journaliste diplômé qui gravit les échelons dans les rédactions et le chroniqueur ou encore l’acteur de la revue de presse ? Assurément rien, puisqu’ils ont tous un impact sur l’opinion.
Le journaliste, un produit de la société, mais…
On a affaire de nos jours à une presse sénégalaise pris entre le marteau et l’enclume. Une presse au banc du tribunal de son public : tantôt louée pour une bonne couverture des élections dans laquelle elle a garanti la transparence en publiant les résultats au fur et à mesure qu’ils tombaient ; tantôt haïe ! Elle avait pourtant été considérée à l’époque de l’alternance, sous Me Wade, comme cet instrument de la démocratie qui avait joué un rôle déterminant. On était loin de cette ère de l’internet et de cette effervescence sur les réseaux sociaux. Lors de ces récentes locales aussi, elle a pourtant continué à assumer ce rôle de sentinelle.
Mais elle est de plus en plus décriée parce qu'elle aurait ses brebis galeuses. Et même si ce n’est pas une raison suffisante pour l’excuser, les Sénégalais se doivent de garder à l’esprit que les journalistes sont issus d'une société sénégalaise que l'on dit elle aussi gangrénée par la corruption et par d’autres tares aujourd’hui dénoncées. Ceux qui la peuplent ne sont ni des anges, ni des surhommes. La vérité est que le journalisme est aujourd’hui un métier bien précarisé, en plus d’être régi par un modèle économique si peu viable qu’il faille revoir son mode de financement si on veut en faire un instrument utile à la démocratie.
A titre d'exemple, un titre de la presse quotidienne coûte au Sénégal 100 f et dont seuls 70 f seulement reviennent à l'éditeur avec derrière des charges salariales, d'électricité, de location etc à assumer. Si les dégâts s'arrêtaient la seulement, on aurait pu applaudir. Le même support est en moyenne lu par 4 personnes parce que beaucoup de ces Sénégalais qui critiquent cette même presse, rechignent à acheter un journal ou préfèrent recourir à ces sites d’informations ou « revueurs de presse » qui pillent les contenus des journaux.
N'oublions pas aussi que la plupart des publicités des entreprises publiques reviennent au quotidien « Le Soleil » ou à la Rts. Dans le même temps, les grands annonceurs notamment, les sociétés de Télécom réduisent leurs budgets publicitaires. C’est d’ailleurs cette tyrannie du commercial que souligne Ben Makhtar dans son livre. Il y a en effet, une tentation de la part de certains médias de sauvegarder leurs bons rapports commerciaux avec les annonceurs qui achètent de la publicité dans leurs supports, qu’ils en sont parfois réduits à jouer les équilibristes dans le traitement de l’information, lorsqu’ils ne s’autocensurent pas tout simplement.
Mais, malgré tout, ces aléas qui incitent à une reconsidération du mode de financement de la presse, il est à préciser qu'on n'intègre pas le métier de journaliste avec l’objectif d’être riche. On y entre par vocation et par passion car le journalisme reste ce métier contraignant et exigeant.
Le règne de la plastique et de l'inculture
Le livre foisonne de détails croustillants et à la limite de la pornographie qui démontrent la réalité de la promotion canapé qui a cours dans la presse. Difficile en tout cas de croire que la presse puisse échapper à cet autre mal connu du monde des entreprises. La presse n’est- elle pas une entreprise avec ses êtres faits de chair et de sang, mais ô combien stressés. Ce qui n’excuse toutefois pas ces patrons véreux qui profitent de ces êtres ambitieux et en quête de célébrités. Il y a, en effet, une mauvaise règle qui veuille que les femmes à la belle plastique soient prises comme des objets sexuels. Et de l'autre côté, il y a ces femmes-là obsédées par le fait d'apparaître à la télé, d'être célèbres et qui sont prêtes à tout pour cela.
Et le résultat est tout simplement catastrophique avec ces filles d'un nouveau genre qui n'ont aucune formation en journalisme qui animent des émissions ; ou qui sont diplômées des mauvaises écoles, en n’ayant ni un bon niveau de formation, ni un bon niveau de culture générale. Elles ne savent exhiber que leur plastique. Elles se contentent tout au plus de distribuer la parole et faire la police, lors des émissions qu’elles animent. Elles commencent à être bien nombreuses aussi ces commerciales reconverties comme animatrices d'émissions à caractère politique, économique, social et culturel. Et ce qui est d’autant plus sidérant, est de voir toutes ces animatrices sans aucune culture musicale qui ne connaissent que Waly Seck, Titi, Viviane, et Aïda Samb. Les animateurs sont aussi concernés par ce désert culturel. Toutes ces tares, Ben Makhtar les décrit comme des réalités qu’il a vécues lors de ses nombreuses expériences.
Les chroniqueurs, il ne les épargne pas non plus. Ces producteurs d'opinion sortis d’on ne sait où. Ils viennent pour la plupart des desks wolof et s’expriment pour certains en wolof. Il est aussi noté des personnages aux niveaux de qualification pas si élevés qui ont fait incursion sur les plateaux télé. Difficile pour certains de connaître leur background et l’expertise dont ils peuvent se prévaloir. Ils déversent des torrents d’opinions fondées en général que sur leur subjectivité et leurs sensibilités politiques, lorsqu'ils n'ont pas des agendas cachés.
Bref c'est le désastre dans un univers médiatique envahi par des intrus de « revueurs de presse » qui pour certains n'ont pas le niveau pour comprendre les éditorialistes qu’ils citent ou certains mots savants des Unes ou des informations secondaires. D'ailleurs Ben Makhtar décrit si bien le phénomène dans son livre en évoquant ceux-là qui ont commencé à agrémenter la revue de presse. La suite, on la connaît. Ils ont enfanté d'autres « revueurs de presse » qui n'avaient ni leur niveau et encore moins leur background.
Il y a un ménage à faire dans la presse. C’est sûr. La faute à ces patrons de presse d'un nouveau genre qui ont envahi le milieu et qui finissent par mettre la logique commerciale fondée sur le buzz en avant. Leur recrutement ne repose plus que sur cette logique, question juste de coller à des cibles hétéroclites. D'un autre côté, le nouveau code de la presse qui a d'ailleurs mis du temps à être voté et promulgué en ses différentes réformes, constitue certes un progrès, mais n’a pas la prétention de régler tous ces problèmes que seuls les patrons et les acteurs des médias pourront prendre en charge.
A la vérité, il semblerait même que cet état de fait arrange les autorités qui ne s'empressent jamais à faire les choses dans les règles de l'art. La presse est le seul rempart de la démocratie qui doit se tenir debout lorsque les autres ne fonctionnent plus. Elle ne doit pas accepter de subir la tyrannie de ceux-là qui pensent qu'elle doit céder aux sirènes du buzz, du parti pris et de l’argent facile en détruisant des carrières et en entachant des destins.
Faits de corruption, promotions canapés, animateurs, « revueurs de presse » et chroniqueurs sans niveau de culture, d’éducation et de backgrounds appropriés qui ont fait incursion dans le milieu des médias, collusion entre politiques et journalistes, tyrannie du commercial dans les médias, voici, entre autres, ces maux de la presse sénégalaise que dénonce Ben Makhtar Diop.
Il s’est désormais investi dans la formation, après avoir fait le tour des chaînes de radios et de télévision de la place. Mais il n’a pas baissé les armes en quittant les rédactions. Son expérience, il a fait le pari de la partager avec ces plus jeunes armés d’un intérêt pour ces métiers des médias. Une manière de continuer à entretenir l’espoir pour une profession si noble et ô combien utile pour la bonne marche de la démocratie. Sous tous les cieux.