NETTALI.COM - Le procès de Kalidou Baba Ly alias Kaliphone s'est tenu ce jeudi 6 octobre 2022. Le parquet a requis une peine d'un an assortie du sursis avec une amende de 100.000 francs. Adji Thiaré Diaw, représentée par son avocat, a réclamé 100 millions de francs pour panser ses blessures
Poursuivi pour coups et blessures volontaires, Kalidou Baba Ly alias Kaliphone a comparu ce mercredi à la barre des flagrants délits du tribunal d'instance de Dakar. A l'entame, les avocats de la partie civile voulaient un renvoi pour la comparution du médecin de leur cliente. Ils souhaitaient également que le tribunal se déclare incompétent pour juger l'affaire. Mais leurs arguments ont été rejetés par la défense et le parquet. Le tribunal a joint les exceptions au fond et a ordonné l'ouverture des débats.
Entendu en l'absence de Adji Thiaré Diaw, Kaliphone a clamé son innocence avant de présenter ses excuses. "J'ai connu Adjia chez mon ami Ahmed Cissé où elle était avec d'autres filles. Le jour des faits, nous sommes allés dans un restaurant. Elle m'a proposé Terrou bi et j'ai suggéré Novotel. Ledit restaurant est fermé et nous sommes allés aux Almadies au restaurant Planète Kebab. Après avoir passé la commande, elle a même mangé dans ma voiture avant que je la conduise chez elle. Une fois là-bas, elle est descendue et avant qu'elle ne monte chez elle, elle m'a demandé de l'argent pour faire du shopping. Pour ma part, je lui ai dit que je n'avais que 25.000 francs. Une somme qui constituait ma dépense. Mais je lui ai promis de lui en offrir", a raconté Kaliphone. Le prévenu poursuit : "C'est là qu'elle a mis sa main dans ma poche pour prendre mon argent. C'est lorsqu'elle a voulu rentrer chez elle que j'ai confisqué son portable. Ce, avant qu'elle ne commence à saccager ma voiture. C'est là que nous nous sommes bagarrés. Comme elle me mordait, j'ai réagi en lui donnant des coups. Je l'ai aussi mordue à mon tour sur le dos."
Après cette déposition, le juge lui demande si un homme doit frapper une femme. Kaliphone rétorque : "Non! Mais, il fallait que je réagisse à ses coups pour qu'elle puisse lâcher ma peau qu'elle avait sous les dents."
Sermonné, Kaliphone se confond en excuses
Le juge revient à la charge pour le sermonner : "Pourquoi vous n'êtes pas allé à la gendarmerie avant de faire quoi que ce soit ? On est dans un état de droit et ce n'est pas à vous de vous faire justice. On est dans une société qui a ses réalités. La violence ne règle pas la violence. Quelle que soit la situation, personne n'a le droit de frapper son prochain." Face à ce sermon, Kaliphone fait son mea culpa. "Je regrette ce qui s'est passé. Si c'était à refaire, je n'allais pas récidiver."
La représentante du parquet n'est pas convaincue par ses regrets. "Vous n'avez jamais pensé que vous serez attrait ici malgré toutes vos bêtises. Vous pensiez que vous aviez le droit de faire tout ce que vous voulez sans pour autant être inquiété. Nous sommes dans un pays de droit", lui a lancé la procureure.
Invité à témoigner, Cheikh Ahmed Cissé, vendeur de produits aphrodisiaques, a confié au tribunal : "J'ignore où Kaliphone et Adjia se sont connus. Les faits se sont déroulés à 3h du matin. Ce jour-là, comme on devait faire une vidéo, je l'ai appelé et c'est là que j'ai entendu des cris. Et après lui avoir demandé ce qui se passait, Kaliphone m'a informé qu'il se disputait avec l'amie de Mariama, Adjia. Il m'a indiqué qu'ils se trouvaient sur la Vdn. Je les ai rejoints là-bas où j'ai trouvé aussi la mère de Adji. Cette dernière me frappait tout en m'insultant avant que sa mère ne la somme de me lâcher. Ils étaient tous les deux ensanglantés. Adji avait aussi le visage enflé. J'avais suggéré d'aller à la gendarmerie pour régler le problème."
L'absence de Adji Thiaré Diaw décriée, ses avocats demandent un complément d'enquête
Avocat de la partie civile, Me Abdy Nar Ndiaye s'est indigné du sort qui a été réservé à cette affaire. Il a soutenu que le prévenu a cru que sa cliente était de mœurs légères et a commencé à lui faire des attouchements. "Sa stratégie était de peindre ma cliente comme était une sale pute et une lesbienne. Il nous a fallu intervenir pour cela", a fulminé Me Ndiaye avant de brandir une photo. "Ça c'est le slip de la dame. Tout troué, c'est une pièce à charge", assène-t-il convaincu que la thèse de l'agression sexuelle ne souffre d'aucun doute. Il a réclamé la somme de 100 millions de francs Cfa pour sa cliente. Parce que, justifie-t-il, "il y a un préjudice corporel, elle est internée dans un service psychiatrique de l'hôpital Principal." Et Me Amadou Diallo de renchérir : "Je demade à votre juridiction de rendre justice à Adji Thiaré Diaw. Elle est dans une sorte d'asile psychiatrique." Il a reproché au maître des poursuites de n'avoir pas pris en compte les accusations de leur cliente. "C'est un adulte de 42 ans qui est allé chercher cette fille de 19 ans sous la pluie et qui a un ami vendeur d'aphrodisiaques. Cela a tous les ingrédients d'une activité sexuelle. Nous demandons d'ordonner un complément d'information. Et c'est ce qui va nous permettre de savoir ce qui s'est passé car la partie civile n'a aucun intérêt d'accuser le prévenu", a plaidé Me Diallo.
La déléguée du procureur a déploré le fait que les coups et blessures volontaires réciproques ne soient pas retenus car les deux parties avaient des certificats médicaux. "Mais, à la date du 26 septembre seul Kaliphone s'est présenté à la gendarmerie alors que Adjia était elle aussi convoquée. Ce sont des faits de cbv réciproques qui ont été retenus à l'enquête. Et jusqu'à ce jour, on ne sait pas où elle se trouve. Et s'il était là, elle serait conduite ici. Si elle s'était présentée à la gendarmerie avant la date du 26, elle allait comparaître ici au même titre que Kalidou Baba Ly", a fait savoir la parquetière.
Par ailleurs, elle déploré l'attitude du prévenu. "Il est aujourd'hui tombé de son piédestal alors qu'il a commis beaucoup d'infractions. Il n'avait pas pensé qu'il allait comparaître ici aujourd'hui", dit-elle avant de demander 1 an de prison assortis du sursis et une amende de 100.000 F Cfa.
Me Souleymane Soumaré et Abou Abdoul Daff ont plaidé l'excuse de la provocation avant de solliciter l'application bienveillante de la loi. "Si elle ne s'était pas dérobée, elle devait comparaître ici comme prévenue puisque la procureure l'a révélé... Ils peuvent se retrouvaient un jour parce qu'ils fréquentent le même milieu. Il faut ramener cette affaire à sa juste proportion", a déclaré Me Daff.
Le jugement sera rendu le 13 octobre prochain.