NETTALI.COM - L'Assemblée nationale a donné, ce vendredi, le top de départ du marathon budgétaire qui verra les membres du gouvernement défiler devant les députés pour défendre leurs budgets. Et pour la première fois, le gouvernement ne dispose pas d'une majorité prête à valider ses moindres désirs. Du coup, certains ministres risquent de passer des moments compliqués à la place Soweto.
Ce vendredi 14 octobre est une date importante pour les députés de la 14e législature. L'Assemblée nationale vient de donner le top de départ du marathon budgétaire parti pour durer plusieurs semaines. Les parlementaires, qui ont reçu la documentation relative au budget 2023, ont une dizaine de jours pour se pencher sur ce que veut faire le gouvernement. Ils vont, par la suite, recevoir les ministres. Ces derniers passeront d'abord en commissions puis en plénière pour défendre le budget de leurs ministères respectifs. Toutefois, ce marathon budgétaire n'aura rien à voir avec ceux de ces dernières années. Et certains membres du gouvernement ont intérêt à bien se préparer avant de passer devant une Assemblée où ils ne disposent plus d'une majorité écrasante capable de voter certains budgets... sans débat.
Parmi les ministres qui risquent de passer un sale quart d'heure devant les députés, il faudra certainement compter Moustapha Diop. Au gouvernement depuis juillet 2014, le ministre du Développement industriel et des Petites et Moyennes entreprises a la particularité de ne presque jamais s'exprimer en public. Pis, certains n'hésitent pas à railler son français à chaque fois qu'il prend la parole en public. Ces dernières années, la majorité Benno Bokk Yaakaar s'est toujours arrangée pour lui éviter les débats en plénière. Le budget de son département est souvent voté sans débat. Pourtant, cet économiste de formation gère un des départements les plus importants dans un pays qui aspire à l'émergence en passant par l'industrialisation. Et il est quasi certain que les députés de l'opposition ne voteront pas le budget de son ministère sans prendre le temps d'en débattre. Mais il n'y a pas que lui.
Autre membre du gouvernement à surveiller, Cheikh Oumar Anne. Tout nouveau ministre de l'Education nationale, ce dernier va devoir défendre le budget de son ministère en commission et en plénière. S'il a l'habitude de s'exprimer en public, il éprouve les mêmes difficultés que son collègue Moustapha Diop. Son français fait souvent l'objet de moqueries. Comment va-t-il si prendre pour défendre le budget d'un ministère à problèmes comme le département de l'Education nationale? Grande question. Le ministre Cheikh Oumar Anne est au moins sûr d'une chose : les députés de l'opposition l'attendent de pied ferme. Et il sera forcément interpellé sur des dossiers comme celui de son passage à la Direction du Centre des oeuvres universitaires de Dakar (Coud). Mame Mbaye Niang, ministre du Tourisme et des Loisirs, et Pape Malick Ndour, ministre de la Jeunesse, de l'Entreprenariat et de l'Emploi, sont presque dans le même lot. Mais ils se défendent mieux que Moustapha Diop et Cheikh Oumar Anne.
D'autres ministres n'ont pas des soucis de langue, mais ils vont devoir suer pour voir leurs budgets passer. Parmi ces derniers, il y a surtout le ministre de la Justice. Ismaïla Madior Fall revient dans un département qu'il connait bien. Mais les débats risquent de tourner autour de la question du troisième mandat. Même s'il se défend d'être en mission commandée pour une validation d'une troisième candidature de Macky Sall, les députés de l'opposition ne rateront pas l'occasion de l'interpeller sur ses déclarations antérieures. Pis, de nombreux députés se sentant victimes d'injustice siègent dans cette 14e législature. Ces parlementaires, dont Guy Marius Sagna, Abass Fall, Birame Soulèye Diop, Cheikh Abdou Bara Doly Mbacké, Mame Diarra Fam..., tiennent une excellente tribune pour interpeller le ministre de la Justice sur les "prisonniers politiques", l'affaire des 14 morts des évènements de mars 2021, le décès en détention de François Mancabou, mais également sur les conditions de détention dans les prisons avant de voter le budget de son département.
Le ministre de l'Intérieur est quasiment dans la même situation que son collègue Garde des Sceaux. Antoine Félix Diom aura en face de lui des députés revanchards. Ces derniers feront tout pour avoir des éclairages sur le processus électoral, les répressions policières, l'insécurité grandissante...
Il s'y ajoute que rien n'indique que le budget sera adopté par l'Assemblée nationale où le gouvernement ne peut compter que sur une majorité particulièrement précaire. Toutefois, renseigne l'ancien parlementaire Alioune Souaré qui cite l'article 68 de la Constitution sur sa page facebook, "si le budget n'est pas définitivement voté dans les délais de 60 jours, il est mis en vigueur par décret et le président de la République reconduit les crédits prévus sur les différents services".