CONTRIBUTION - On ne peut pas rester silencieux après avoir vu ce déchaînement de violence d’une pure lâcheté contre une personne sans défense, un précédent dangereux commenté à travers le monde….
La justice doit se saisir, d’une manière ou d’une autre, en vue de punir les auteurs de cette barbarie à l’état pur, cette bataille de rue mal famée que rien ne justifie dans une institution au cœur de la représentation nationale. Après tout, l’Assemblée nationale n’est pas une arène de gladiateurs sanguinaires ni un repaire d’agresseurs sans foi ni loi, où tous les coups sont permis. Il est heureux que la Ministre en charge des femmes, des enfants et de la famille, ait pris la parole pour dénoncer la violence exercée sur la députée et défendre les principes élémentaires.
Les violences, qu’il a été donné de constater à tous les Sénégalais devant leur écran, sont non seulement physiques mais aussi morales. Car en dehors de la gifle, des coups au visage et au ventre de la députée future maman, l’acharnement de ces deux Néandertaliens à passer à tabac une femme sans coup férir, est une balafre à l’humanité, à l’éducation et à la morale.
Frapper quelqu’un de plus faible que soi, battre une femme jusqu’à la mettre à terre, est aux antipodes des valeurs et du code d’honneur de la culture et des bonnes mœurs sénégalaises.
En principe, avant de venir s’énerver à la Place Soweto et s’y comporter comme une brute épaisse, on l’apprend à la maison, à l’école et au sport: cela s’appelle un esprit sain dans un corps sain, et cela se nomme l’éducation, viatique nécessaire pour le long voyage de la vie.
Cela permet de (sur)vivre au milieu de ses contemporains, non pas comme un ours mal léché, mais comme un être humain avisé (niit bu niitee), qui surmonte ses démons quotidiens et laisse son côté sombre et sa testostérone dans les placards de sa cuisine familiale.
En société, faut-il le rappeler, on se tient à carreaux et on récite comme les enfants de la crèche « je suis sage, à ma place, les mains sur la table... »
Quand un député énervé bat sa collègue en direct à la télé, en plein hémicycle de l’Assemblée nationale, on n’ose imaginer, sans trembler, la violence qu’il se passe derrière les murs de son foyer lorsqu’il est en colère.
Quelles que puissent être, ou avoir été, les divergences politiques et politiciennes entre députés et élus, rien ne justifie la violence, plus particulièrement la violence envers les femmes.
Les députés gladiateurs ne devraient pas oublier qu’ils ont le devoir de représenter dignement le peuple sénégalais.
Les députés, même énervés, devraient garder en tête que le modèle de démocratie sénégalaise est une référence en Afrique, que tous, y compris ceux en dehors des institutions, devraient contribuer à préserver.
Le temps de la compétition est passé, place aux propositions de loi, aux idées pertinentes et à l’innovation parlementaire pour le plus grand bénéfice des populations et de la République. En cette période trouble, il nous revient la nostalgie des joutes parlementaires d’avant la première alternance, lorsque majorité et opposition se combattaient à la loyale, avec respect et intelligence au sein de l’hémicycle de la Place Soweto: Mamadou Puritain Fall, Madia Diop, Arame Diène, Coumba Ba, Marcel Bassène, Daouda Sow, Abdoulaye Faye, Madior Diouf, Iba Der Thiam, Samba Laobé Fall, Marie José Boucher Camara, Abdourahim Agne, Moussé Daby Diagne, Yero Deh, Mbaye Jacques Diop, Mbaba Guissé, Joseph Ndong….
Au lieu de cela, la 14 ème législature bat des records d’indignité qui désacralisent l’institution dans laquelle les députés ne font que passer: querelles de borne-fontaine, règlements de comptes obscurs, coups et blessures volontaires, dégradations, tensions à leur comble, députés à couteaux tirés…Depuis son installation, on ne ressent généralement que malaise, honte et gêne devant la répétition de dérapages qui dépassent l’entendement.
C’est dégoûtant d’animalité.
Sommes-nous condamnés à cette médiocrité, ces attitudes déshonorantes, ces comportements indignes de la fonction de député et du rang de l’Assemblée? En tant que citoyen et observateur, on peut penser que la place de ces hommes n’est pas à l’Assemblée nationale, mais plutôt à Thoiry.
En passant à tabac la député Amy Ndiaye, ces barbares ont offert le spectacle navrant d’une gifle à la République qu’ils devraient, en soldats de la démocratie, défendre en tout et partout. En marchant délibérément sur son pauvre corps, ce sont toutes les femmes que ces Cromagnon ont violentées, outragées et insultées.
C’est tout le peuple que vous avez insulté : quel homme civilisé imagine sa sœur, sa fille, sa femme, sa maman se faire violenter?
C’est l’intérêt des électeurs que vous avez négligé.
Cette sauvagerie ne doit pas rester impunie.
Pauvres députés qui osent tout, même s’attaquer à la matrice fondatrice de notre société humaine, celle qui donne la vie, qui éduque et construit les fondations de notre passé, de notre présent et de notre avenir.
Piètres députés, plutôt que de verser dans le « tessanté » et de montrer vos talents de « tout-dans-les-muscles-rien-dans-la-tête », vous auriez pu mettre votre cerveau et votre intelligence au service de vos idées et des Sénégalais qui vous ont élu, avoir les rieurs de votre côté et ridiculiser vos adversaires. Cela s’appelle de la finesse d’esprit, de la retenue, de la hauteur, dont vous êtes apparemment dépourvus…
Il n’est cependant pas trop tard pour vous ressaisir, quitter le chemin du démon Satan et revenir sur la pacifique voie de notre Seigneur.
Gifler, battre, violenter, insulter, répondre aux insultes et à la violence, doit rester banni. Il existe des institutions dans l’Etat dont c’est le rôle de mener des médiations et le cas échéant, d’exercer des sanctions. Dans un État de droit et dans un espace de civilisation, on ne peut pas se faire justice soi-même.
L’adversité politique doit faire appel à des réflexes intellectuels, certainement pas à des réactions musculaires.
La prière permet de canaliser les instincts de violence, sinon les espaces de sport peuvent peuvent autoriser à s’en décharger sans blesser personne.
La violence, y compris la violence faite aux femmes, ne saurait être tolérée, elle doit être éradiquée pour tous.
A ce titre, la violence physique exercée en 2019 contre la députée Mame Diarra Fam du PDS, par son collègue de Benno Bokk Yaakar du nom de Ndiaye, doit être elle aussi vigoureusement condamnée de la même manière et dans les mêmes termes.
Halte à la violence contre les femmes.
DMF
Journaliste