NETTALI.COM - Désigné "candidat unique" de Benno Bokk Yakaar, Amadou Ba peine à rassurer dans son propre camp. Certains lui reprochent un manque d'autorité, de charisme et de courage. Bref, un candidat qui ne s'affirme pas. Ce qui pourrait être un sérieux handicap pour Benno à quelques semaines de la présidentielle prévue en février 2024.
Choisi par Macky Sall pour défendre les couleurs de Benno Bokk Yakaar à la présidentielle de 2024, Amadou Ba s'est très tôt défini comme "le candidat de la continuité". Une posture assumée que d'aucuns comprennent sur un certain plan, ce d’autant plus que celui qui a été ministre des Finances, ministre des Affaires étrangères et enfin Premier ministre de Macky Sall, est aussi comptable du bilan de celui qui l'a choisi comme candidat. Un bon bilan en tout cas si l'on s'en tient juste à son aspect matériel.
Mais une posture d'Amadou Ba que beaucoup ne comprennent toutefois pas sur un autre plan. D'ailleurs, les détracteurs de l'actuel locataire du palais de l'avenue Léopold Sédar Senghor l'attaquent plus sur ce bilan immatériel, c'est-à-dire le manque de transparence dans la gestion des affaires publiques, les contrats pétroliers, la traque des opposants, en particulier Ousmane Sonko, une justice à deux vitesses, le scandale lié à la Covid-19 avec le fameux rapport de la Cour des comptes... Et c'est justement sur ces questions que ceux-là croient savoir que le candidat Amadou Ba doit opérer une rupture dans son discours. Ce qui sera, pour lui, une tâche pas facile, surtout que Macky Sall, même s'il est à trois mois de la fin de son mandat, a toujours le pouvoir et les hommes de Benno en main.
L'autre constat, c'est qu'au-delà de la continuité qu'il prône, des Sénégalais, surtout ceux du camp de Benno, ont sans doute envie de l'entendre s'affirmer. Ce qu'il peine à faire. Une situation qui commence à inquiéter dans les rangs mêmes de la coalition au pouvoir depuis 2012. Une inquiétude que Souleymane Jules Diop a traduite en des termes clairs lors de son passage ce dimanche à l'émission "Grand jury" de la Rfm.
"Je le (Amadou Ba, ndlr) trouve amorphe. Je trouve qu’il ne montre pas assez aux Sénégalais, aux gens de sa majorité, qu’il a les épaules, qu’il a l’étoffe. Il ne le fait pas assez, il doit se bouger, il doit aller vers les gens, il doit rassurer la majorité. À un moment donné, il faut vous assumer (…) Je m’impatiente de voir Amadou Bâ s’affranchir, se lever et dire aux Sénégalais : ''c’est moi", a laissé entendre l'ancien journaliste sur Rfm. Avant d'ajouter une nouvelle couche: "C’est profond ce que je vous dis. Moi je suis 100% Amadou Bâ et depuis longtemps. C’est un homme pétri de qualités. Mais il ne fait pas assez. Et si ça continue comme ça, l’opposition bien organisée peut nous battre à la prochaine présidentielle. Et je vous le dis en toute honnêteté. Les gens ne vont pas le dire, ils vont le murmurer dans les couloirs. Il faut qu’il nous rassure. Il est notre candidat. Nous l’avons choisi, il a des qualités pour être un bon président de la République, mais il faut qu’il rassure son camp. Il ne le fait pas assez."
En réalité, ce que Souleymane Jules Diop a voulu dire à Amadou Ba, c'est que la continuité, c'est bon, mais les troupes de Benno ont besoin d'un bon chef pour mener le combat de 2024. Or, jusqu'ici, le candidat de la mouvance présidentielle ne fait rien pour avoir cette stature du chef. Bien au contraire, il fait tout pour montrer que Macky Sall reste le seul commandant à bord du navire Benno qui n'est pourtant plus si apte à prendre la mer.
Une situation qui ne risque pas de changer quand on sait que l'actuel chef de l'Etat a promis de bientôt descendre sur le terrain pour battre campagne avec son candidat. Un renfort certes pour le candidat de Benno, mais la personnalité envahissante du président de la République pourrait être un sérieux handicap, avec un candidat qui risque de paraitre sous les habits d'un simple faire-valoir. Or, la présidentielle étant la rencontre entre un homme et son peuple, les Sénégalais ont besoin d'entendre des candidats qui disent : "C'est moi le meilleur. Si je suis élu, voilà ce que je vais faire". Ce "C'est moi" qui fait encore peur à Amadou Ba trop préoccupé par son image d'homme fidèle à Macky Sall.
A la vérité, le candidat Amadou Ba semble tétanisé depuis qu'il sait qu'il est le candidat de Benno. Et une telle posture à 3 mois de la présidentielle, peut faire craindre le pire, surtout que cette présidentielle est partie pour être une de vraiment ouverte.