NETTALI.COM - La campagne électorale pour l’élection présidentielle du 24 mars a débuté. Les 19 candidats vont tout faire pour convaincre les électeurs, dans un contexte marqué par la réduction du nombre de jours de campagne qui passe de 21 à 13, mais aussi du mois de Ramadan.
La date de l’élection fixée au dimanche 24 mars, un décret du Président Macky Sall informe que la campagne électorale démarre samedi 09 mars à 00H et se termine le vendredi 22 mars à 00H. Le samedi 23 mars marquera le silence électoral et le dimanche 24 mars, les électeurs iront aux urnes.
La campagne électorale se tient dans un contexte particulier. Deux faits : juste 13 jours de campagne en violation de l’article Lo 129 qui dispos que : «La campagne en vue de l’élection du président de la République est ouverte vingt-et-un (21) jours avant le premier tour du scrutin», une campagne en plein mois de Ramadan. Les 19 candidats retenus par le Conseil constitutionnel devront se plier à ces deux exigences. En plus de leur temps d’antenne quotidien sur la télévision nationale, les candidats vont voir comment gérer ce peu de temps, en plus du Ramadan qui rend les choses un peu plus compliquées. 13 jours pour convaincre les électeurs. Traditionnellement, la campagne électorale se fait à coups de meetings, de caravanes, d’animation, tam-tams, chants, tout y passe. Mais pour cette-fois, les candidats devront se réinventer pour trouver la bonne formule.
«Les campagnes de proximité, ça devrait être la modalité, la dimension principale»
Analyste politique, Mamadou Sy Albert est convaincu qu’il faudra que les candidats soient très astucieux dans la gestion du temps et du contenu. Il dit : «C’est une campagne électorale dans un contexte de crise. La grosse difficulté, c’est l’absence de préparation. Il faut avoir des équipes fonctionnelles. Les candidats qui ont déjà des équipes fonctionnelles, ça va être un facteur déterminant. Il y a aussi l’utilisation du nombre de jours. Comment faire campagne sur le territoire ? Ça va être difficile de faire campagne sur 14 régions. Il faut faire des choix en fonction de sa présence, mettre l’accent dans les régions où les candidats ont plus de chances. Pour quelqu’un qui n’a jamais fait de campagne, il ne doit vraiment pas être gourmand. Quelqu’un qui a de l’expérience, qui a déjà fait une campagne, une élection, qui sait comment ça marche, il sait son électorat. Il peut cibler en fonction de ses résultats électoraux et choisir les zones stratégiques.» Selon l’analyste, il faudra aussi que les candidats sachent comment décliner leur programme. «Le contenu va être aussi très important. Il y a le temps d’antenne, mais ce qui fait adhérer les électeurs citoyens, c’est vraiment le contact. Comment, dans le contexte du Ramadan, créer le contact ? Est-ce que la campagne de proximité ne doit pas être la dimension principale ? La journée, les gens n’ont pas le temps d’écouter. Choisir une tranche horaire 5H-20H. Les campagnes de proximité, ça devrait être la modalité. Il faut revoir la formule des meetings. Choisir un meeting d’ouverture et un meeting de clôture. Ne pas vouloir faire des meetings dans toutes les régions. C’est impossible pour les candidats.» L’autre aspect non moins important, selon toujours Mamadou Sy Albert, c’est le support de communication. «Il faut faire des choix. En ville et dans le monde rural, ce sont des zones différentes. C’est la radio dans le monde rural, en ville, c’est peut-être la télé, les réseaux sociaux. Il faut faire des choix dans les supports de communication.»
«Une campagne nationale pour le candidat et une campagne régionale assumée par les équipes locales»
Avec seulement 13 jours de campagne, l’analyste politique pense qu’il faudra se partager les tâches, surtout dans les coalitions. M. Sy : «Au niveau des coalitions, il faut avoir une décentralisation des campagnes. Le candidat ne peut pas faire toutes les 14 régions. S’il décentralise suivant ses forces, il peut, en dix jours, faire cinq grands meetings, par exemple. Ça a beaucoup plus d’impact et ça ne va pas fatiguer les équipes dans les régions. Ceux qui ont déjà des comités électoraux ont plus de chance et les candidats devraient mettre l’accent sur ça. Avoir une campagne nationale pour le candidat, mais les campagnes régionales soient assumées par les équipes locales.» Le problème avec ce démarrage-surprise, c’est que les candidats n’ont rien vu venir, surtout avec les conclusions du dialogue national qui avaient retenu la date du 02 juin. La date du 24 mars leur est presque tombée dessus. «On a l’impression que l’arrêt qui est intervenu a eu raison des candidats. On a l’impression qu’ils ne sont pas prêts non pas pour aller à l’élection, mais par rapport au démarrage de la campagne. Il n’y a pas de branle-bas dans les états-majors», constate Babacar Dione, journaliste et analyste politique. Selon lui, les candidats sont confrontés à la limite du temps.
«Pour quelqu’un qui devait avoir 21 jours, avoir 13 jours est peu, assure Babacar Dione. Les partis politiques qui ont pu s’installer lors des élections locales ont plus de chances. Certains candidats n’ont pas pu s’installer dans toutes les localités du pays. Même si certains ont fait le tour du pays par rapport au parrainage, par rapport à autres choses, ils se sont rendus dans des localités, mais la campagne est primordiale. Les Sénégalais font plus attention aux candidats, les écoutent un peu mieux et un peu plus. Ceux qui n’ont pas d’appareils forts vont essayer de s’organiser en un laps de temps pour aller dans les régions, ça va poser problème.» Selon lui, avec le mois de Ramadan, c’est encore plus compliqué. Babacar Dione : «Est-ce qu’ils vont mettre des chants religieux ? Le Coran ? Des Khassidas ? Des tam-tams ? Est-ce qu’en plein Ramadan, un cortège en musique peut passer devant une mosquée ? Pendant cette période, ce sont des conférences religieuses dans les quartiers. Il faut faire un choix sur le contenu. Les candidats n’auront pas le temps d’aller partout. Ils pourront, à partir des conférences religieuses, se faire voir. Ils peuvent profiter de ce genre de rassemblement pour délivrer leur message. On verra aussi les candidats rivaliser d’ardeur dans la distribution du ‘’ndogou’’.» L’inconvénient selon lui, c’est que les candidats n’auront pas le temps et l’opportunité de délivrer leurs véritables messages. «Les gens seront chez eux à l’heure du ‘’ndogou’’. S’il y a des tranches horaires par rapport aux médias, les gens vont suivre. Ils vont faire le plein au niveau des médias qui seront des courroies de transmission par rapport aux messages qu’ils voudront bien donner.»