NETTALI.COM - Le chef de l’Etat n’a pas perdu de temps. Après sa cérémonie d’investiture et sa prestation de serment dans la matinée du 02 avril, le Président Bassirou Diomaye Faye a effectué sa première nomination. Ousmane Sonko est le nouveau Premier ministre du Sénégal.
Sans surprise, Ousmane Sonko est nommé Premier ministre du Sénégal. Le président de la République nouvellement élu, Bassirou Diomaye Faye, a porté son choix sur son mentor et leader politique pour diriger sa première équipe gouvernementale. Son premier décret (n° 2024-921) a été réservé à Ousmane Sonko, celui grâce à qui il a été élu et préside désormais aux destinées du Sénégal. Le leader du parti Pastef est le nouveau chef du Gouvernement. Un retour d’ascenseur, un choix cohérent. Momar Diongue, journaliste et analyste politique : «C’est un choix très logique et cohérent. Ousmane Sonko est le père fondateur du parti Pastef, il a eu à travailler pendant très longtemps sur le ‘’Projet’’ sur la base duquel Bassirou Diomaye Faye a été élu président de la République. C’est un ‘’Projet’’ qu’ils ont eu à peaufiner, à mûrir et à affiner ensemble. De ce point de vue, je pense qu’arrivés à ce moment précis, il est tout à fait normal que l’un des principaux collaborateurs de Bassirou Diomaye Faye soit Ousmane Sonko.» Momar Diongue souligne que dans sa première déclaration post nomination, Sonko a repris les propos qu’il avait tenus lors du meeting de clôture de leur campagne, à savoir qu’il travaillait pour faire élire Diomaye, mais qu’il était hors de question de le laisser seul, qu’il faudra l’accompagner. «Et je crois que cette nomination s’inscrit dans cette logique, dans une parfaite cohérence pour quelqu’un qui a eu à travailler autour de ce ‘’Projet’’ et qui doit travailler à sa mise en œuvre. C’est une démarche logique et cohérente.»
«Bassirou Diomaye Faye est certes le patron de Sonko au niveau étatique, mais Sonko, président du Pastef, demeure son patron politique»
Certains ont tôt fait de prédire et de craindre une dualité au sommet de l’Etat, voire une certaine rivalité entre les deux hommes, au contact du pouvoir. Ce, en partant d’exemples inscrits dans l’histoire politique du Sénégal. Momar Diongue : «Les deux cas de figure où il y a eu un certain bicéphalisme faisant que le tandem au pouvoir a tourné court, c’est d’abord Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia. Senghor exerçait un certain leadership et avait en-dessous de lui Mamadou Dia. Les deux entourages ont eu à alimenter une volonté de Mamadou Dia de faire un putsch à Senghor. Le deuxième cas fut entre Abdoulaye Wade et Idrissa Seck. Me Wade était aux manettes, patron du Pds, et Idy était son numéro 2. Il était facile d’alimenter une certaine volonté de Idy de lorgner le fauteuil présidentiel. Mais nous ne sommes pas dans ces cas de figures. Bassirou Diomaye Faye, président de la République, est certes le patron de Sonko au niveau étatique, mais il n’en demeure pas moins que sur le plan politique, Sonko, président du Pastef, demeure le patron politique de Diomaye Faye.»
Pour l’analyste politique, il n’y a pas de raison de craindre une dualité au sommet. «Je crois qu’il y a un équilibre des pouvoirs qui va s’opérer de facto. Bassirou Diomaye Faye a été élu président de la République sans être le patron du parti Pastef, il était jusque-là Secrétaire général, pendant que Sonko était le président du parti. Ceci participe donc d’un facteur d’équilibre des pouvoirs. A partir du moment où Ousmane Sonko est chargé de la mise en œuvre du ‘’Projet’’, il ne devrait pas y avoir de problème, normalement. Ce qui aurait été dangereux pour ce tandem, c’est que Sonko soit en dehors du pouvoir. Plus il serait éloigné du pouvoir, plus son influence, la complicité et la bonne intelligence qu’il avait jusque-là avec Diomaye pourrait s’effriter. Mais à partir du moment où il est à ses côtés, à la tête du Gouvernement, je pense qu’il n’y a pas de raison de craindre une dualité au sommet de l’Etat.»
Chef du Gouvernement, Ousmane Sonko porte également la casquette de chef de parti. Occasion de faire la part belle aux membres de Pastef ? Momar Diongue n’est pas de cet avis. «Autant Sonko a eu à affirmer à l’intention des alliés qu’il ne sera pas question d’un partage de gâteau, autant je ne le vois pas avoir une démarche clanique qui consisterait à favoriser les militants de Pastef. Les signaux qu’il a envoyés jusque-là sont aux antipodes de cette logique. Parce que même s’il a eu une ambition présidentielle, il n’a pas hésité à substituer la candidature de Bassirou Diomaye Faye à la sienne, et il a travaillé à promouvoir cette candidature. Et aussi bien aux élections Locales que Législatives, il a fait preuve de générosité en prêtant main forte à tous les autres candidats de Yewwi Askan Wi. Donc, il a montré qu’il n’est pas dans une logique partisane ou clanique, et que dans sa façon de faire de la politique, il est animé d’un certain altruisme.»
«Il ne s’agissait pas de venir et de faire table rase de tout le dispositif qui était en place»
Outre la nomination d’Ousmane Sonko comme Premier ministre, le Président Bassirou Diomaye Faye a posé deux autres actes. Il a maintenu à son poste de Secrétaire général de la Présidence, Oumar Samba Ba. Un geste salué par Momar Diongue. «Je pense que cela participe également d’une logique, dans la mesure où il faut laisser à côté du nouveau Président, quelqu’un qui connaît bien la maison, et qui a une pleine maîtrise des dossiers. Il ne s’agissait pas de venir et de faire table rase de tout le dispositif qui était en place, et je pense que c’est une démarche intelligente.» L’autre acte fort posé est la nomination du Professeur Mary Teuw Niane au poste de Directeur de Cabinet du chef de l’Etat. «Cela me paraît logique également, estime Momar Diongue, parce que non seulement c’est un allié qui a joué les premiers rôles au sein de la coalition ‘’Diomaye Président’’, mais il a aussi une expérience gouvernementale. Il est réputé être un homme qui a les mains propres et qui a fait montre de transparence lorsqu’il était aux affaires. Ces premiers choix effectués me semblent assez rassurants et cohérents.»