NETTALI.COM - Des révélations importantes ont été faites par le nouveau DG de la Société des mines du Sénégal (Somisen) Ngagne Demba Touré, le vendredi 24 mai, lors de la cérémonie de passation de service. Ces révélations ont mis en lumière des anomalies ayant gravement affecté les deniers de l’Etat. Le successeur d’Ousmane Cissé souhaite que la Somisen passe de ‘’société sous perfusion permanente de l’État à sa vache laitière qui fait entrer des centaines de milliards dans sa caisse’’.
Nommé directeur général de la Société des mines du Sénégal (Somisen) par le nouveau président de la République, Ngagne Demba Touré a effectué sa cérémonie de passation de service avec le directeur sortant Ousmane Cissé, le vendredi 24 mai. Faisant part des nombreuses difficultés auxquelles la Somisen fait face, il a dans la foulée dénoncé "la non-effectivité des fonctions de représentation et de gestion des participations de l’État dans les entreprises minières ; le manque de ressources financières suffisantes pour bien réaliser les ambitieux programmes de recherche, de valorisation et d’exploitation de substances minérales qu’elle s’est fixés ; l’absence de soutien politique de la part de sa tutelle technique et financière pour fonctionner conformément au rôle stratégique et aux objectifs économiques qui lui ont été assignés".
À cela, il a ajouté une gouvernance discutable du secteur minier qui fait ressortir plusieurs anomalies, d’après lui. Touré a d'ailleurs regretté une "disparité cuisante" entre la valeur de la production, les richesses créées par les entreprises et les revenus dont bénéficie l’État. À titre d’exemple, il a relevé que pour l’année 2021, sur 1 507,7 milliards générés par la production minière, l’État et ses démembrements n’ont récolté que 203,1 milliards, soit 13 % de la richesse créée.
Il a a également dénoncé la faiblesse de la part de l’État dans les concessions minières. À ce niveau, il a indiqué que sur 12 conventions où l’État détient des participations, il n’a que 10 % de droits sur dix d’entre elles et 15 % sur l’une d’elles.
Le nouveau directeur de la Somisen a aussi constaté le non-recouvrement d’une part importante des redevances minières dues à l’État ainsi que le défaut de transparence dans les opérations minières. Il note égale- ment le non-respect des droits humains, des règles de prévention et de protection de l’environnement ainsi que des conditions d’hygiène et de sécurité.
"Notre pays ne doit plus exporter tous les minerais extraits de son sous-sol"
Face à ces nombreux défis, le Projet porté par le président de la République, qui a bénéficié de la confiance de la majorité des Sénégalais, se positionne comme une solution pour "une réappropriation des ressources naturelles en vue d’un développement économique endogène et durable", selon Ngagne Demba Touré. "Notre vision repose sur un modèle économique endogène d’industrialisation par substitution aux importations", a-t-il soutenu.
Il souligne que les ressources minières du pays doivent favoriser l’essor d’une industrie dynamique et compétitive capable de générer une croissance durable, inclusive et créatrice d’emplois. "Notre pays ne doit plus exporter tous les minerais extraits de son sous-sol pour ensuite importer des produits finis issus de ces mêmes minerais. Le bijoutier sénégalais ne doit plus prendre un avion, faire des milliers de kilomètres pour rallier Dubaï à la recherche de bijoux, alors que l’or extrait ici à Kédougou quitte le pays pour être raffiné en Suisse ou au Canada’’, a plaidé Ngagne Demba Touré.
Les ressources minières pour financer les actions de l’État
À ce niveau, pour lui, la Somisen doit jouer un rôle en aval en mettant le focus sur un programme "ambitieux" de transformation des substances minérales.
Par ailleurs, le Projet mise sur la mobilisation des ressources endogènes pour le financement des politiques publiques. Monsieur Touré indique que c’est dans cette optique que les ressources naturelles en général et les ressources minières en particulier doivent désormais devenir un important levier de financement de l’action étatique.
Ainsi, la Somisen, en tant que compagnie nationale, doit devenir la locomotive de l’État-acteur de l’économie et partie prenante de l’exploitation de ses propres ressources, selon le nouveau DG. "Sans verser dans l’autarcie, elle doit devenir le bras financier de l’État, son grenier, sa mine d’or et d’argent. En somme, mon ambition est que la Somisen passe de société sous perfusion permanente de l’État à sa vache laitière qui fait entrer des centaines de milliards dans sa caisse", a soutenu Ngagne Demba Touré.
Pour parvenir à ces objectifs, il compte adopter un style de management participatif qui fédère ses collaborateurs autour d’une vision commune partagée. "Dans un esprit d’équipe, je m’engage à gérer dans l’inclusivité et la transparence. Avec rigueur et franchise, je compte diriger avec éthique et ouverture. Avec dévouement et créativité, je mise sur une gestion axée sur les résultats", a- t-il promis.
En tant que jeune placé à la tête d’une société publique, il souligne qu’il représente une frange de la population à travers les actes qu’il prend et le comportement qu'il adopte. "Je ne dois pas décevoir ! En choisissant un jeune à la tête de la Somisen, le président de la République a opté pour la fraîcheur, la rupture, le renouveau, l’audace, le mouvement et la conquête’’, a estimé Ngagne Demba Touré qui dit compter sur la mobilisation collective de tout le personnel.
Richesse du sous-sol sénégalais
Il faut dire, comme l’a souligné le DG, que le sous-sol sénégalais regorge d’importantes ressources minières. Il s’agit d’immenses potentialités en substances minérales qui offrent des niches de création de richesses, d’emplois, d’infrastructures viables et d’un développement endogène et durable, selon lui.
Le DG Touré a cité des métaux précieux tels que l’or et le platine, les minéraux lourds que sont le zircon, l’ilménite et le rutile, les minéraux stratégiques comme l’uranium, le lithium, le manganèse ou la bauxite, les métaux de base que sont le cuivre, le nickel, le plomb, le chrome et la barytine, sans oublier le fer, les calcaires, les phosphates de chaux et d’alumine ainsi que les matériaux de construction tels que le basalte, les grès et les sables dunaires, les pierres ornementales que sont le marbre et les granitoïdes ou encore les argiles céramiques ou industrielles et les sables siliceux pour la verrerie.
Ngagne Demba Touré note que pour valoriser ces substances, l’État du Sénégal a mis en place un cadre juridique incitatif qui a permis d’attirer de gros investissements dans le secteur minier.
Pour rappel, la Somisen a été créée par la loi n°2020-31 du 6 novembre 2020. Ayant en charge la gestion du patrimoine minier de l’État, elle a été mise sur pied pour accomplir dix missions, dont la gestion de la participation de l’État dans les opérations minières ; la commercialisation des produits miniers revenant à l’État ; la détention, seule ou en association, de titres miniers aux fins de recherche et d'exploitation ; la mise en œuvre des décisions et orientations de l’État en ce qui concerne la stratégie de ces sociétés minières ; la participation aux négociations entre l’État et les sociétés dans lesquelles elle gère les participations de l’État et de toute autre société où cette participation est envisagée, etc.