NETTALI.COM - La compagnie aérienne Air Sénégal a encore plongé ses clients dans le désarroi. Après plusieurs heures d’attente dans des conditions déplorables, en raison de l’absence d’un avion, des passagers en route pour La Mecque pour le Hajj 2024 ont manifesté leur colère à l'aéroport international Blaise Diagne de Dakar (AIBD), le samedi 1er juin.
“Hajji ! Avion bi lañu bëgë. Xaar bi dafa dooy” (Hajj ! Il nous faut un avion. L’attente a trop duré), scandent en chœur, au hangar des pèlerins de l'aéroport international Blaise Diagne de Dakar (AIBD), plusieurs passagers voulant effectuer le pèlerinage à La Mecque cette année. En effet, les voyageurs ont été convoqués le vendredi à 23 h pour un vol prévu le samedi à 6h40. Mais à l’heure du départ, ils se rendent compte qu’il n’y a pas d’avion. Le seul aéronef d'Air Sénégal opérant vers Paris-Charles de Gaulle, utilisé pour le premier vol des pèlerins, n’a embarqué que les malheureux pèlerins laissés à quai depuis jeudi, selon nos informations.
“Ce que nous disons au directeur général de l'AIBD, Cheikh Bamba Dièye, c’est que les passagers du vol 2B sont très fatigués. Les personnes âgées ont attendu pendant 18 heures dans des conditions pitoyables”, confie un témoin dans une vidéo devenue virale, samedi. Un peu plus tard, le DG est venu auprès des passagers pour tenter de les rassurer tout en reconnaissant le tort qui leur est causé.
“Nous ne pouvons faire autre chose que vous inviter à attendre. Une attente qui ne dépassera pas ce jour. Nous avons tort. Nous assumons nos responsabilités. Nous allons, dans les plus brefs délais, vous trouver un autre avion”, a déclaré Cheikh Bamba Dièye au milieu des futurs pèlerins, désespérés et las d’attendre.
Ancienne professionnelle de l'aviation : “Air Sénégal doit être auditée et remise à niveau.”
Cette situation déplorable met encore une fois la compagnie aérienne sénégalaise au banc des accusés. “Ce qu'Air Sénégal fait vivre à nos futurs pèlerins à l'AIBD, est indigne d'une compagnie qui veut se faire respecter”, regrette le journaliste Oumar Kandé. “Depuis lors, nos papas et mamans, désemparés, fatigués et inquiets, se trouvent à l'aérogare des pèlerins de l'AIBD, attendant désespérément un avion pour les convoyer en Arabie saoudite”, a-t-il ajouté.
Chaque année, Air Sénégal se trouve confrontée à ce genre de problème, créant des soucis à ses clients. Certains appellent au changement de compagnie. Aux yeux du journaliste Oumar Kandé, “c'est dû à un nationalisme mal placé de vouloir donner une part du marché à Air Sénégal. Mais cette compagnie n'a ni les compétences techniques ni l'organisation pour convoyer des pèlerins”.
Ancienne professionnelle de l’aviation, la journaliste Zeynab Sangaré, en faisant une comparaison, confie qu’une compagnie saoudienne vient toujours à l’heure et que ses équipages attendent à l’hôtel. D'après elle, depuis le début, cette compagnie étrangère n’a raté aucun vol. Mieux, vendredi, elle a décollé 10 minutes avant l’heure, selon l’ancienne professionnelle du secteur aéronautique.
Elle explique ainsi le problème de la compagnie sénégalaise : “Air Sénégal n’a qu’un seul avion qui peut faire ce trajet, c’est l’A330 neo qui fait le Paris CDG. Ils comptaient sur des affrètements d’avions, ce qui était possible, mais pas à l’improviste. Si tu veux effectuer un pèlerinage d’envergure comme le hajj et que tu dois affréter des avions, le minimum est que ces avions soient disponibles un mois, voire une semaine à l’avance. Sachant qu'Emirates et Turkish ne participent pas au hajj cette année, beaucoup de pèlerins n’iront pas, d’autres partiront depuis Paris ou ailleurs.”
Pire, poursuit-elle, “l’affrètement comporte beaucoup de risques en sûreté et sécurité, sans oublier les conséquences de la concurrence déloyale dans ce secteur”. Zeynab Sangaré considère qu”’Air Sénégal doit être auditée et remise à niveau afin d’éliminer toutes les destinations qui ne nous sont pas permises et qu’on s’arrête avec nos moyens de bord”.
Avec un modèle économique rationnel, il est possible de progresser avec succès, selon elle. “Il faut aussi dégager tout ce personnel des anciennes compagnies qui ont fait faillite (Air Afrique, Air Sénégal, Malgré toutes ces dispositions prises en amont, assume le ministre, “il faudra maintenant reconnaître qu’il y a eu défaillance d'une partie, à savoir Air Sénégal. Il faut dire les choses telles qu'elles”.
Pour être plus clair, rappelle El Malick Ndiaye, “nous avons en moyenne quatre vols par jour et tous les jours nous sommes là pour nous assurer que les vols se passent bien. Sur 11 vols qui ont été programmés, les neuf sont déjà partis à temps avec plus de 3 500 pèlerins. Seuls deux ont eu du retard, même si l’on n’aurait jamais dû avoir du retard sur ces vols-là et ce sont des vols qui sont opérés par Air Sénégal”.
À l’en croire, “le problème, c'est qu'ils ont loué un aéronef qui a tardé à rejoindre Dakar. Mais nous avons pris les devants pour trouver des solutions alternatives. Pour le premier vol qui a accusé du retard, nous les avons logés dans des hôtels de la place. Ensuite, nous avons trouvé une alternative pour qu'ils puissent partir comme convenu ce matin (samedi). En début d'après-midi, ils étaient tous partis et on a même pris 20 passagers de plus. On a anticipé sur l'autre vol”.
Et le ministre d’ajouter : “au total, il reste 270 passagers qui doivent partir dès demain (dimanche). Donc, à partir de lundi, la situation reviendra à la normale. Et ça, c'était important de le préciser, car depuis le Sénégal Airlines). Ils sont tous à la retraite et recasés avec des salaires élevés et rien ne bouge. Un profond audit est plus que nécessaire. Depuis sa création en 2017, pas de syndicats des travailleurs...”, dénonce Zeynab Sangaré.
Pour éviter que le pèlerinage 2024 ne soit pas un flop
Pour éviter que le pèlerinage 2024 ne soit pas un flop, le journaliste Oumar Kandé invite la délégation en charge du pèlerinage, le ministère des Transports aériens, le Premier ministre et même le président de la République à agir. “Cela est une urgence pour éviter aussi un drame, car les futurs pèlerins, dont la majorité est d'un âge avancé, sont soumis à un stress infernal de ne pas savoir quand ils pourront regagner l'Arabie saoudite pour s'acquitter de ce pilier de l'islam”, a-t-il estimé.
Air Sénégal doit transporter 4 283 pèlerins répartis en 15 vols, en raison de deux vols par jour, selon le DG.
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