NETTALI.COM - La perche avait été lancée le 5 septembre par le ministre des Finances, disposé, après quelques mois de tension autour de la dette fiscale, à rencontrer les patrons de presse. L’audience qui s’est finalement tenue ce vendredi, laisse présager un réchauffement dans les rapports entre l’État et la presse privée nationale.

«Ils ont semblé réactifs, ils ont semblé favorables à certaines de nos préoccupations. En aucun cas, ils ne voudraient être un frein au développement des entreprises de presse», a laissé entendre Mamadou Ibra Kane.

Le président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (Cdeps) venait de sortir d’une rencontre de deux heures avec les acteurs du ministère des Finances et du Budget. Une première depuis l’avènement des nouvelles autorités qui avaient systématiquement refusé tout dialogue avec le patronat sur la situation alarmante de la presse privée. Il aura fallu un black-out national, suite à la journée sans presse du 13 août pour qu’elles lâchent un peu de lest.

A l’invitation de Cheikh Diba, la presse privée est donc partie négocier une sortie de crise avec l’objectif principal de desserrer l’étau fiscal. La situation des entreprises de presse est difficile depuis l’avènement du nouveau régime. En cause, principalement l’effacement de la dette fiscale accordé par Macky Sall, mais non reconnue par le Président Bassirou Diomaye Faye. Une dette brandie depuis contre la presse, engendrant des avis à tiers détenteur, des blocages de comptes bancaires, des procédures de saisie du patrimoine qui pèsent actuellement sur trois entreprises de presse, le blocage du fonds d’appui et de développement de la presse…

Face au ministre du Budget, les patrons de presse ont plaidé pour l’annulation des pénalités, des taxations d’office, ainsi que la suppression des redressements fiscaux. « Nous avons plaidé pour la définition d’un moratoire pour les dettes fiscales et surtout pour la définition d’une fiscalité spécifique pour le secteur de la presse», a précisé Mamadou Ibra Kâne.

Le Cdeps a, par ailleurs, incité l’État à honorer ses engagements vis-à-vis des entreprises de presse, notamment le paiement des contrats et le rétablissement des contrats publicitaires que le gouvernement a résiliés de manière unilatérale.

Au terme des discussions, Cheikh Diba, qui devrait en référer à l’autorité, a reporté sa réponse en milieu de semaine prochaine, probablement mercredi. «De manière générale, on peut noter un dégel de la tension qui existait entre le nouveau régime et les entreprises de la presse», a affirmé le président du Cdeps.

Si l’ardoise des entreprises de presse est bien réelle, elle n’est pas plus lourde que celle de l’État à ces mêmes entreprises. «Si on prend la dette fiscale des entreprises de presse au 31 décembre 2023, c’est 13 milliards, dont 3 milliards de pénalités. Dans la dette proprement dite, 10 milliards, les 54 % sont du fait des entreprises publiques et 46 % du fait des privées. Nous estimons que pour l’année 2023 et le premier semestre 2024, l’État doit plus que ne doivent les entreprises de presse privée. Ce qui veut dire que même s’il est difficile de donner un chiffre exact, les créances de l’État dépassent les 5 milliards», révèle Mamadou Ibra Kane qui se félicite de ce dégel inévitable dans un monde où les deux sont appelés à coexister.