NETTALI.COM - Le 14 octobre 2024, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a officiellement lancé le Référentiel Sénégal 2050, un plan de transformation économique et politique pour les 25 prochaines années. Présenté comme un tournant décisif dans la trajectoire du développement du pays, ce projet vise à bâtir un Sénégal plus souverain, équitable et prospère, avec un accent particulier sur la jeunesse, la lutte contre la corruption, la réforme des institutions et la coopération panafricaine. Toutefois, ce plan audacieux n’a pas tardé à susciter des réactions mitigées, tant de la part de l’opposition politique que d’une partie de la société civile.
Lors du lancement du Référentiel Sénégal 2050 au Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio, le président Bassirou Diomaye Faye a souligné que Sénégal 2050 sera le pilier fondamental du développement futur du pays. L’un des points forts de son discours est l'importance qu'il accorde à la jeunesse sénégalaise, qu'il considère comme le moteur de cette transformation. “Le Sénégal de 2050 sera porté par une jeunesse compétente, dynamique et préparée à répondre aux défis du monde moderne”, a déclaré le chef de l’État.
Selon lui, une jeunesse bien formée et engagée est essentielle pour moderniser le pays et en assurer la prospérité à long terme.
Outre l'accent mis sur la jeunesse, Diomaye Faye a évoqué la nécessité de repenser les institutions sénégalaises afin de les adapter aux aspirations de la population. La refonte institutionnelle vise à instaurer une administration plus efficace, capable de soutenir les ambitions de développement du pays. La lutte contre la corruption a également été présentée comme une priorité absolue. “Nous combattrons fermement la corruption et nous réformerons l’Administration pour en faire un levier puissant au service du développement”, a-t-il annoncé.
Enfin, le président a réitéré l'engagement panafricain du Sénégal, insistant sur la coopération avec les pays africains dans une optique de solidarité régionale et continentale. Cette vision s’inscrit dans un cadre où le Sénégal ambitionne de jouer un rôle clé dans l’intégration africaine tout en promouvant la souveraineté nationale.
Sonko : “Une nouvelle trajectoire pour le Sénégal.”
Le Premier ministre Ousmane Sonko a, quant à lui, présenté Sénégal 2050 comme une rupture avec les approches politiques et économiques du passé. Pour M. Sonko, ce plan représente une réponse aux erreurs des gouvernements précédents, souvent accusés de prioriser des objectifs à court terme. Il a promis que ce programme offrira une vision à long terme, plaçant le capital humain et l'équité sociale au coeur du développement.
Selon Sonko, la mise en oeuvre de ce document stratégique est le fruit d'une décennie de lutte politique, marquant ainsi une nouvelle ère pour le Sénégal. Il a mis en avant l'implication d’experts locaux dans la conception du projet, affirmant que cela reflète l’engagement des autorités à promouvoir les compétences locales. Il a également souligné que ce plan ne se limite pas à des réformes institutionnelles, mais inclut aussi la transformation agricole, l'industrialisation et la souveraineté alimentaire pour garantir un développement inclusif et durable.
Amadou Ba demande “une critique constructive de l’opposition”
Dans ce contexte de réformes ambitieuses, l'opposition sénégalaise doit être au rendez-vous, selon Amadou Ba, député du parti Pastef. Il a appelé à une critique scientifique du Référentiel Sénégal 2050. Selon lui, la critique doit porter sur les aspects techniques et stratégiques du plan, plutôt que sur des considérations superflues. “Nous espérons que les polémiques sur le sac à main, le tapis rouge et la couleur des costumes seront définitivement bannies du débat public”, a-t-il déclaré.
Monsieur Ba souligne qu’une évaluation comparative avec les précédents plans, notamment le Plan Sénégal émergent (PSE), est nécessaire pour mieux comprendre les paradigmes distincts entre les deux projets.
Bougane Guèye Dany : “Un tâtonnement inquiétant.”
Cependant, tous ne partagent pas cet optimisme. Le leader de l'opposition, Bougane Guèye Dany, président du mouvement Guem Sa Bopp, a exprimé des réserves importantes à l'égard de l'Agenda Sénégal 2050.
Selon lui, le plan manque de clarté et repose sur des bases fragiles. Bougane a notamment remis en question la fiabilité des données économiques utilisées pour élaborer ce plan, laissant entendre que le gouvernement s’appuierait sur des chiffres non confirmés par la Cour des comptes. “Je reste sur ma faim. Je ne vois toujours pas de nouveautés par rapport à ce qui était proposé par l’ancien régime”, a-t-il déploré.
Thierno Alassane Sall : “Un plan déconnecté de la réalité.”
Pour Thierno Alassane Sall, ancien ministre et critique acerbe du gouvernement, Sénégal 2050 est déconnecté des réalités quotidiennes des Sénégalais. Dans un contexte où la population souffre de la hausse des prix et de l’inflation, il dénonce un projet qui promet des résultats à long terme sans proposer des solutions immédiates. “Diomaye et Sonko demandent aux Sénégalais de patienter encore 25 ans, alors que les ménages peinent à joindre les deux bouts”, a-t-il affirmé.
Selon lui, le gouvernement se concentre sur des promesses de prospérité future sans aborder la nécessité de soulager les souffrances actuelles des citoyens.
Élimane Kane : “Une démarche non participative.”
La critique la plus vive est venue d'Élimane Kane, membre de l’ONG Legs Africa. Pour lui, le plus grand problème avec l'Agenda Sénégal 2050 est l’absence d’implication de la société civile dans sa conception. Il regrette que ce projet ait été élaboré sans consultation des principaux acteurs sociaux, qui auraient pu contribuer à une meilleure définition des priorités. “La société civile n’a pas été consultée, alors qu’elle est essentielle pour la réussite d’un projet d’une telle envergure”, a-t-il déclaré.
Sénégal 2050 est un projet ambitieux qui promet de transformer le pays sur les 25 prochaines années. Si les objectifs affichés sont prometteurs, notamment en ce qui concerne la souveraineté économique, la lutte contre la corruption et la modernisation des institutions, il reste des défis majeurs à surmonter. L’opposition politique et la société civile appellent à plus de clarté, de transparence et à une implication accrue des différents acteurs du pays. Le succès de ce référentiel dépendra de la capacité du gouvernement à mobiliser non seulement des ressources financières, mais aussi la confiance et la participation active de la population