NETTALI.COM - Dieynaba Sangharé Ndiaye et ses soutiens peuvent enfin pousser un ouf de soulagement. Hier, mercredi, le commissariat central de Matam a procédé à l'arrestation de son époux, Dr Alioune Badara Mbacké, ainsi que deux de ses complices présumés : son chauffeur et son vigile. A 17H, après leur face-à-face avec les enquêteurs, les trois hommes ont été placés en garde à vue.

L’affaire Dieynaba Sangharé Ndiaye a tenu en haleine tout un pays. Comme un tsunami, elle a déferlé sur les réseaux sociaux, portée par les organisations féministes : flot de commentaires et torrent d’appels à la justice ont rythmé la journée du mardi, tandis que la vague d’indignation montait, inexorablement. Le tumulte a fini par atteindre Matam, hier mercredi, où il s'est abattu avec fracas contre les portes du Tribunal départemental. Au cœur de ce raz-de-marée, de cet élan de solidarité, un nom résonnait sans relâche : Alioune Badara Mbacké, médecin-chef du district sanitaire de la ville du Nord, accusé par sa femme de l'avoir battue jusqu'au sang. Selon Dieynaba, tout a commencé avec une sale histoire d’infidélité, découverte par hasard en utilisant le téléphone de son mari pour s’éclairer dans la cuisine. «J'ai décidé de l'interpeller, mais il a mal pris ma réaction», a-t-elle raconté. «Il s'est aussitôt levé et s'est mis à me rouer de coups : visage, nez, tête, bouche. Les blessures et le sang qui coulait n'ont pas suffi à le stopper. Il a continué, m'injuriant et me tabassant avec une violence inouïe.» Ses déclarations, désormais publiques, ont jeté l’émoi bien au-delà de nos frontières.

Sous la pression croissante, les digues ont fini par céder : la police a procédé à l’arrestation d’Alioune Badara Mbacké. Mais le médecin-chef de Matam ne sera pas le seul à faire face à la Justice. Il a été arrêté en même temps que son chauffeur et son vigile, tous deux cités dans la plainte déposée par Dieynaba Sangharé Ndiaye, laquelle était appuyée par un certificat médical attestant d'une Incapacité temporaire de travail (Itt) de 10 jours. L’ordre d’arrestation est venu du Procureur du Tribunal de grande instance de Matam, qui a exigé que le médecin-chef et ses complices présumés soient placés en garde à vue pour les besoins de l’enquête. À 17H, après son face-à-face avec les enquêteurs du commissariat central, la mesure a été notifiée à Alioune Badara Mbacké. Son chauffeur et son vigile ont également été placés en garde à vue pour complicité. Sauf revirement de dernière minute, les trois mis en cause seront présentés, ce jeudi, au procureur de la République de Matam.

L’arrestation de Dr Alioune Badara Mbacké survient six mois après la plainte déposée par son épouse. Prévu pour être jugé hier, le procès a été reporté en raison d’irrégularités relevées par le parquet. Si le médecin-chef devait comparaître libre, c’était suite à une citation à parquet. Cependant, étant sur le territoire sénégalais, il aurait dû recevoir une citation au prévenu. Cette subtilité juridique a changé le cours des événements : Mbacké ne sera plus jugé devant le Tribunal correctionnel, mais devra faire face à la Justice en flagrants délits.

L’histoire entre Dr Mbacké et Dieynaba Sangharé Ndiaye, commencée en février dernier, n’aura duré que le temps d’une rose. Leur union, scellée à peine trois mois plus tôt, s’est rapidement consumée dans les flammes de la violence. Le 14 avril, lasse des humiliations répétées, Dieynaba (26 ans), assistante juridique, se révolte. Ce jour-là, elle se présente devant l’Adjudant de police Arfang Ndong, déterminée à dénoncer les sévices subis : coups et blessures répétés, violences, injures, menaces. Sa plainte décrit un enfer conjugal fait d’agressions et de brutalités infligées par celui qui aurait dû la protéger. Mais la procédure tarde à avancer. Entre-temps, le mari riposte en portant plainte contre elle pour collecte de données à caractère personnel, renversant la situation. Jugée en flagrants délits au Tribunal de Pikine-Guédiawaye, Dieynaba est condamnée à trois mois de prison et à payer une amende de 4 millions de FCfa. Ironie du sort, son époux finit, lui aussi, par être arrêté. L’histoire tragique des Mbacké, autrefois pleine de promesses, n’aura laissé derrière elle que des cœurs brisés et un écho de douleur.