NETTALI.COM - Depuis l’étranger où il s’est établi, Macky Sall tente de répondre aux coups de boutoir des nouveaux tenants du régime qui ne cesse de flétrir son bilan. Hier, mardi 5 novembre, il a publié une nouvelle lettre pour défendre les acquis de ses deux mandats et peindre un tableau très sombre de la politique gouvernementale actuelle. Il explique aussi les raisons qui l’ont poussé à accepter de diriger la liste de la coalition Takku Wallu Sénégal (TWS).
Macky Sall, tête de liste de la coalition Takku Wallu Sénégal (TWS), a publié le mardi 5 novembre, une lettre pour défendre son bilan à la tête du Sénégal. Dans sa missive, il rappelle qu'en avril dernier, après avoir perdu le pouvoir, il a assuré la transmission ordonnée et pacifique du pouvoir pour rester fidèle à la tradition d'une démocratie majeure et apaisée. Il ajoute s'être imposé un temps de recul et de réserve pour permettre à l'actuel régime de commencer en toute sérénité l’exercice de son mandat, par courtoisie républicaine.
Le candidat de poursuivre : “Avec le soutien d’hommes et de femmes de valeur, dévoués et compétents, j’ai laissé un pays résolument installé sur la trajectoire de l’émergence, avec une des rares économies au monde à afficher un taux de croissance positif après l’impact ravageur de la Covid-19 et malgré les effets collatéraux d’une guerre majeure.”
Macky Sall, en effet, se félicite d’avoir laissé un pays apaisé, “avec une loi d’amnistie adoptée dans un esprit de pardon et de réconciliation nationale, après trois années de violences destructrices, un pays dont la parole compte au plan international, un pays écouté et respecté par ses partenaires bilatéraux et multilatéraux”. “J’ai laissé, écrit-il, un pays dont la gouvernance publique et la sécurité juridique inspirent la confiance propice à l’investissement qui génère la croissance et l’emploi, dont la Fonction publique, toutes catégories confondues, a été renforcée en effectifs et revalorisée en traitement, et un Sénégal avec des infrastructures structurantes, indispensables au développement économique et social : des routes, des autoroutes, des ponts et pistes de désenclavement, le TER, le BRT, des centrales électriques, des aéroports modernes, le plus grand investissement privé de l’histoire de notre pays avec le chantier du port du futur à Ndayane, un projet de dessalement d’eau de mer en partenariat public-privé, de nouvelles universités, des hôpitaux clés en main, des infrastructures sportives de dernière génération et un projet finalisé de conquête de l’espace qui a abouti au lancement du premier satellite de notre pays”.
L’ancien président se targue aussi d’avoir mis en place “des instruments d’inclusion économique et de justice sociale opérationnels, notamment la Der/FJ, le 3FPT, le programme Xëyu Ndaw Yi, les bourses de sécurité familiale et la Couverture maladie universelle”.
Mais, à l’entendre, ce legs a été foulé aux pieds après son départ du pouvoir. Macky Sall dit constater avec regret que ces acquis sont “gravement” menacés, avec une économie en berne, comme en témoignent la “situation catastrophique” de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de l’artisanat, du petit commerce qui occupe des millions de compatriotes et celle du BTP avec des milliers d’ouvriers au chômage et autant d’activités connexes à l’arrêt.
Ce qui lui fait dire : “Huit mois après, et deux fois en l’espace de quelques semaines, la note souveraine de notre pays a été dégradée par deux agences d’évaluation, suite à des affirmations intempestives, calomnieuses et sans fondement, dont la dernière, encore plus grotesque, porte sur un prétendu compte bancaire aux mille milliards de francs CFA qui a été vite démenti par des professionnels de la banque et n’a pu tromper personne.”
La tête de liste fait, en outre, cas des “scandales présumés de l’Onas et de l’Aser” qui, à ses yeux, tardent à être élucidés. Tout ceci, assure-t-il, “n’inspire la confiance d’aucun bailleur ni investisseur. Voilà ce qui va assombrir davantage les perspectives de l’économie nationale, mettre en péril des entreprises et des emplois, aggraver le chômage des jeunes et tuer à petit feu le secteur privé, formel et informel. Aujourd’hui, le populisme, les contre-vérités et la manipulation tiennent lieu de mode de gouvernance, comme hier ils avaient servi de promesses électoralistes”.
Selon l’ancien président, “le temps de la parole stérile a remplacé le temps de l’action utile aux populations, au moment où des urgences sont partout signalées et des compatriotes victimes des inondations appellent désespérément au secours”. Il persifle : “Celui qui vous avait dit qu’il n’a pas besoin d’état de grâce pour régler immédiatement tous vos problèmes vous demande de patienter, en vous disant droit dans les yeux que même un mandat ne suffirait pas pour diminuer le coût de la vie et résoudre vos difficultés. (…) Celui qui vous avait promis son projet comme solution miracle à tous vos maux s’est finalement résigné à une mauvaise copie du Plan Sénégal émergent, une copie sans cohérence ni ambition, qui fait reculer notre objectif d’émergence de 2035 à 2050. Bref, les Vars se suivent, innombrables, révélant au grand jour les limites d’une gouvernance incohérente, tatillonne et calamiteuse. Faut-il encore croire à de nouveaux engagements et de nouvelles promesses sans lendemain ? Assurément non.”
“Le populisme et l’autoritarisme mènent directement à la dictature”
Offensif, l’ex-président affirme que le Sénégal ne va pas mieux sur le plan institutionnel, car l’Assemblée nationale a été dissoute dans un jeu de cache-cache “indigne” de l’État et de la République, alors même qu’elle était régulièrement convoquée en session extraordinaire et que la déclaration de politique générale du Premier ministre était inscrite en bonne et due forme à son ordre du jour. “Ce triste épisode, selon lui, confirme le dysfonctionnement de nos institutions engluées dans une grave inversion des rôles entre le Premier ministre et le chef de l’État, dont la remise en cause publique des décisions par des exécutants en est un exemple patent”.
La tête de liste de Takku Wallu Sénégal va même jusqu’à évoquer la question des arrestations, après avoir libéré des centaines de détenus “politiques” pour pacifier l’espace public sénégalais, à l’orée de la dernière élection présidentielle. Il écrit : “Je n’oublie pas les règlements de comptes infligés à des agents de l’État, les arrestations et sanctions arbitraires, les violences et menaces contre des opposants et toute voix discordante, les vaines tentatives de musellement de la presse ainsi que les attaques répétées et impunies contre nos communautés religieuses. Le populisme et l’autoritarisme mènent directement à la dictature, à la destruction des fondements de notre démocratie, de notre économie et de notre vivre-ensemble dans la paix, la liberté et la cohésion nationale, autant d’idéaux et de valeurs que nous chérissons et qui fondent notre héritage commun.”
“Ces idéaux et valeurs qui nous rassemblent, poursuit-il, nous ne pouvons les laisser dépérir, parce que c’est un héritage reçu des anciens, un héritage qui nous sert de viatique sur le chemin qui nous réunit et un héritage que nous devons transmettre aux générations futures”, indique Macky Sall.
Les 7 engagements de Macky
S’agissant de sa décision de briguer un mandat législatif, il renseigne qu’il aurait pu ne pas agir, rester dans le confort de sa réserve et garder une distance par rapport aux affaires nationales. Mais, dit-il, “ce serait fuir mes responsabilités de citoyen suffisamment averti des affaires de l’État, de la République et de la Nation à l’épreuve du pouvoir”.
Ainsi, une fois la majorité acquise à l'Assemblée nationale, la tête de liste de la coalition TWS annonce sept engagements. Macky Sall promet la restauration du fonctionnement régulier des institutions de la République et de la stabilité nationale par la mise en place d’un gouvernement d’union, de stabilité et de réconciliation nationales qui travaillera en bonne intelligence avec le président de la République dans l’intérêt supérieur de la nation.
Il promet aussi la convocation, dans les trois mois qui suivent, des assises de la réconciliation et de la stabilité nationales associant toutes les forces vives de la nation et la mise sur pied d'un programme d’urgence en faveur des impactés par les inondations.
Il annonce de même un programme d’urgence pour la formation professionnelle, l’entrepreneuriat et l’emploi des jeunes, la lutte contre l’émigration clandestine et l’institution d’un mécanisme de soutien aux jeunes diplômés de l’enseignement supérieur en attendant leur insertion, un programme de rationalisation des institutions et de réduction du train de vie de l’État et du secteur parapublic, la réduction du coût de la vie par la maîtrise de l’inflation des prix des denrées de première nécessité, et l’accélération de la mise en oeuvre des programmes, projets et réformes phares du PSE ainsi que la reprise de tous les chantiers à l’arrêt.
“Toutes ces mesures, écrit-il, sont à notre portée. Et la coalition Takku Wallu Sénégal, dont toutes les composantes sont habituées à la gestion des affaires publiques, est suffisamment préparée à leur mise en oeuvre immédiate. Ce faisant, nous restons convaincus qu’en démocratie, ce qui doit prédominer, c’est le débat d’idées, c’est la force des arguments, c’est la cohérence et la faisabilité des propositions. Ce qui doit être exclu, c’est la violence, c’est la haine, c’est le bellicisme, c’est la calomnie outrancière”.