NETTALI.COM - Pour contester sa radiation de l’Assemblée nationale et sa révocation à la mairie de Dakar, Barthélémy Dias, par la voie de ses avocats, a déposé des recours, avec des arguments à l’appui.
Barthélémy Dias est loin d’abdiquer après sa radiation de la liste des députés et sa révocation, en sa qualité de maire de maire de Dakar. Jugeant l’acte illégal, lors de sa conférence de presse avortée de vendredi dernier à la mairie de Dakar, il avait annoncé un recours pour contester la décision de révocation, après avoir informé, au lendemain de sa radiation de l’Assemblée nationale, d'une saisine des juridictions compétentes.
Selon un des avocats du pool commis par Barthélémy Dias, les choses vont bouger. «Nous avons déposé les requêtes. Deux recours sur la radiation à l’Assemblée nationale et la révocation à la mairie de Dakar.» Devant quelle juridiction, la requête sera-t-elle déposée ? «Il y aura des recours pour excès de pouvoir devant la Cour d’Appel, mais nous n’avons pas encore validé le document», répondra-t-il.
Dans sa correspondance le Préfet de Dakar écrit : «Je vous déclare démissionnaire de votre mandat de Conseil municipal de la Ville de Dakar, à compter de la date de notification», sauf que L’article L.277 dispose : «Tout Conseiller municipal qui, pour une cause quelconque, se trouve dans l’un des cas d’inéligibilité ou d’incompatibilité prévus par la loi, peut-être à toute époque, déclaré démissionnaire par le représentant de l’Etat, sauf recours de la Cour d’Appel dans les dix jours de la notification.»
Mieux, un spécialiste du droit assure qu’«un Préfet ne peut pas révoquer un maire. On ne doit nullement faire appel au Code électoral. C’est le ministre des Collectivités territoriales qui doit saisir le président de la République pour la révocation, et c’est le Code des Collectivités territoriales qui doit être évoqué. La Cour d'Appel, c'est la Cour qui s'occupe de contentieux électoral. La Cour d'Appel peut dire qu’elle est incompétente puisque les élections législatives qui ont mené Barthélémy Dias à la mairie de Dakar datent de 2022. Vous saisissez quelle juridiction ? La Cour suprême ? Ce n'est pas une décision administrative, elle n'est même pas motivée. Donc, dans tous les cas de figure, le Code électoral n'est pas applicable en la matière.»
Des détails croustillants auxquels les avocats de Barthélémy Dias comptent s’agripper pour faire face aux juridictions compétentes. «Nous avons des arguments béton-armé. C’est plus que solide. Ils ont tout faux. Manifestement, ils se sont tous trompés. L’Assemblée nationale s’est très lourdement trompée. Ce sont des conseillers nullards, ignorants et paresseux qui ont conseillé le Gouvernement. Ce sont des paresseux qui ne prennent pas le temps de lire et de comprendre les textes. Des paresseux qui exécutent des commandes politiques sans lire. Ils sont intellectuellement paresseux et techniquement faibles et nuls.» Selon lui, le délai étant suspensif, Barth, jusqu’à preuve du contraire, reste maire. Quand est-ce que la Cour d’Appel devra rendre sa décision ? «Il n’y a que la juridiction saisie qui peut se prononcer.»
En attendant la saisine et la réponse de la Cour d’Appel, le conseil de Barthélémy Dias juge inacceptable ce qui s’est passé, qu’il considère comme une liquidation d’un homme politique. «Imaginez le maire de Dakar qui est sorti manu militari et on ne sait même pas qui a appelé la Police. Ce n’est pas sérieux. C’est une véritable voie de fait qui résulte d’une volonté de liquidation d’un homme politique. Barthélémy n’est pas l’adversaire du Préfet, mais la décision du Préfet a des soubassements politiques. Quand le Préfet viole la loi de cette façon-là par voie de fait, c’est totalement un parti-pris de l’administration.» Quels motifs la Police a-t-elle avancés pour interrompre la conférence de presse ? «Il n’y a pas de motifs valables. Barthélémy Dias est maire et si vous lisez le texte, on dit littéralement que le Préfet constate la démission. Un maire qui fait une conférence de presse dans sa mairie, qui peut convoquer la Police pour arrêter une conférence de presse à l’intérieur de la mairie ? Un endroit fermé. Ce n’est pas dans un endroit public, mais fermé. On n’a pas besoin de savoir qui a envoyé la Police parce qu’il n’y a que le maire qui peut dire à la Police de venir disperser une occupation irrégulière des lieux», regrette un des avocats de Barth. Il poursuit : «C’est plus qu’une violation de son droit de réunion. Quand on te trouve dans ta maison et qu’on te met dehors, c’est une violation des droits fondamentaux de l’homme dans cette affaire. C’est une voie de fait caractérisée. Il est maire de Dakar tant que la Cour d’Appel n’a pas statué sur la décision du Préfet. Rien ne peut expliquer qu’on défonce la porte pour empêcher la tenue de la conférence de presse. C’est une violation caractérisée de la loi, un trouble manifeste à l’ordre public de la part du Commissaire. Il a outrepassé toutes ses compétences et tout ce que la loi lui autorise à faire. La Police n’a pas le droit d’entrer dans la mairie, sans y avoir été invitée par le maire. Ça défie toutes les règles de la République.»
Le conseil de Barth qui juge inacceptable la situation, estime que le Commissaire doit présenter des excuses. «Je pèse bien mes mots. Il est responsable directement et personnellement de cette voie de fait. C’est une infraction qu’il commet personnellement. Le Préfet n’a ni droit ni autorité pour demander de disperser les gens dans la mairie.» Ont-ils d’autres moyens de lutte, si le recours n’aboutit pas ? L’avocat : «Pourquoi le recours n’aboutirait pas ? Juridiquement, c’est un dossier en béton-armé. Il n’est pas possible d’envisager, pour quelque raison que ce soit, de perdre. Je juge aux résultats. Je ne peux pas dire que les juridictions vont statuer de façon politique. Si elles le font, je me prononcerai. Nous sommes sûrs de nos arguments et on attend que la Cour d’Appel se prononce et toutes les autres juridictions qui seront saisies. Chaque Sénégalais, quel qu’il soit, a le droit de porter un jugement critique sur n’importe quelle décision. Personne ne peut l’empêcher.» Le temps nous dira.