CONTRIBUTION - Professeur, j’ai lu avec grand intérêt votre article intitulé : « La mémoire de Thiaroye… » publié dans le site SENEPLUS.COM.
Je salue la qualité de votre écriture et respecte votre opinion qui est bien respectable. Toutefois, JE NE LA PARTAGE PAS ALORS PAS DU TOUT. Et pour les raisons suivantes.
1/ les tirailleurs sénégalais ne peuvent en aucun cas être taxés de COLLABORATEURS ou d’EXECUTEURS DES BASSES BESOGNES de l’armée française en ce sens qu’ils ont été enrôlés de force pour la plupart d’entre eux ou par cooptation pour d’autres qui auront été convaincus par des «voix autorisées» de l’époque. De plus, il faut retenir que pour parler de sentiment national, il aurait fallu que le Sénégal eût été à cette époque, un pays souverain. Ce qui n’était pas le cas durant ces périodes. N’oublions pas que nous étions tout comme d’autres pays de la sous-région, des POSSESSIONS FRANCAISES et pas des pays structurés, organisés et …autonomes. Nous étions des SUJETS de la France qui était notre Maître. Et dans cette posture, Elle avait la latitude faire de nous ce qui bon lui semblait pour ses propres intérêts. Dès lors, comment peut-on accabler un esclave d’être sous les ordres de son Maître et d’obéir à ses oukases?
Sur ce plan, votre analyse est faussée en essayant d’accuser les TIRAILLEURS de COLLABORATEURS et de COMPLICES des crimes de la France contre nos pays et nos populations.
2/ Les exemples comparatifs de COLLABOS traqués et condamnés que vous citez notamment ceux du Maréchal PETAIN et ceux des algériens Harkis anti-indépendance ne sont pas pertinents pour la simple raison que « comparaison n’est pas toujours raison. » Pour PETAIN, les français ont fait montre d’une ingratitude historique. Le Maréchal Pétain vainqueur de la première guerre mondiale avait compris que la France ne pouvait pas résister face à la puissance dévastatrice de la WEHRMACHT. C’est pourquoi, en fin stratège bien averti, il a vite rendu les armes. Permettant à la France d’échapper à une destruction systématique de ses villes. Cela avait d’ailleurs été critiqué à l’époque par les alliés qui avaient vu dans cette fuite en avant, une TRAHISON. En effet par cette position défaitiste, Paris et toutes les grandes villes de France ont été déclarées «villes ouvertes» et ont pu être épargnées par les bombardements nazi grâce au coup de génie du Maréchal. Sa condamnation future résulte plus d’une justice des vainqueurs que d’un crime de haute trahison.
N’oublions pas que DE GAULLE qui avait récupéré la victoire finale avec les alliés avait été dégradé et radié des armées françaises pour insubordination et s’était exilé à Londres pour poursuivre le combat. Après la victoire finale, il n’a pas boudé son plaisir de voir son ancien patron voué aux gémonies pendant que lui était porté aux pinacles. CQFD.
Pour les algériens c’est dans le cadre d’une lutte pour l’indépendance du pays vis-à-vis de la France. Il y’avait les Pour et les Contre. Chacun traitant l’autre de traitre. Les vainqueurs ont pu surfer sur la victoire pour accabler les vaincus, les accuser de trahison. Et les condamner à mort.
On voit bien que ces deux cas cités en illustration de votre article n’ont aucun rapport avec la situation des tirailleurs sénégalais. Qui, encore une fois, étaient des SUJETS Français et ne pouvaient en aucune façon se soustraire à des réquisitions forcées ou à des enrôlements volontaires obtenus par l’entremise de hautes personnalités de l’époque comme le Grand Marabout Thierno Seydou Nourou TALL ou les politiques comme Blaise Diagne ou Galadou DIOUF qui étaient à l’époque, les voix les plus autorisées et qui ont joué pratiquement le rôle de sergent-recruteurs pour la France. D’autant plus, qu’ils avaient vraiment conscience de défendre leur mère Patrie, LA France. Il aura fallu toutes les vilénies, trahisons et ingratitude de la France à leur endroit avec notamment les mauvais traitements, le blocage des incorporations, la cristallisation voire le non paiement des pensions, le racisme et toutes sortes d’exactions et dont le massacre de Thiaroye aura constitué le point culminant de l’ignominie pour qu’ils se rendent compte qu’en fait, ils ne sont pas acceptés comme des FRANÇAIS. Avec l’expérience vécue de la guerre dans leur chair qui
leur avait ouvert les yeux sur le grand Manitou blanc qu’ils vénéraient tant et qui n’était en fait qu’un tigre en papier, ils vont donc développer l’esprit de révolte qui va engendrer les mouvements d’humeur qui aboutiront plus tard, à l’indépendance de nombre de ces pays pourvoyeurs de tirailleurs. Pour tout cela et bien d’autres, s’il faut aller jusqu’à taxer les vaillants tirailleurs de TRAITRES comme l’a vociféré tout récemment le Sieur Cheikh Omar DIAGNE, l’honnêteté intellectuelle commanderait d’y inclure aussi les démarcheurs religieux et politiques cités supra qui auront permis des enrôlements massifs de nos anciens dans le corps des tirailleurs sénégalais.
Au total et pour ne pas être trop long dans cet article, il apparait nettement qu’il n’y a aucune similitude entre ces situations citées en exemple dans votre argumentaire et celle des tirailleurs sénégalais.
QUI, une fois de plus, n’étaient pas encore dans une République structurée, reconnue et..libre. La notion de patriotes sénégalais n’était pas encore à l’ordre du jour dans leur sémantique.
Nos anciens étaient fiers d’être des sujets français dans leur contexte d’alors. On voit bien que sous ce rapport, il devient très difficile voire hasardeux de vouloir les taxer de traitres et d’y entrevoir un quelconque besoin de dissimulation d’attitudes coupables……
Pour avoir été des dignes défenseurs de la mère Patrie de leur époque, ils méritent plus que notre respect, notre déférence. Au regard de leur bravoure saluée même par leurs plus grands ennemis ; les Nazis. Plus encore après les vilénies dont ils ont fait l’objet de la part du Général DE GAULLE qui n’avait pas voulu qu’ils participassent au défilé de la libération de Paris suivi de leur massacre perpétré à Thiaroye, ils méritent mille fois d’être honorés, réhabilités et magnifiés par la République. C’est ce que le Président de la République himself a compris en leur rendant l’hommage grandiose de La NATION reconnaissante. Ne serait-ce que pour cette manifestation nationale de haute portée symbolique et patriotique organisée à leur honneur, il aurait été bienséant et plus républicain, par égard pour l’Institution Suprême de la Présidence de la République, de ne pas chercher à leur jeter l’opprobre en les taxant de COLLABOS et de TRAITRES .
Les TRAITRES, les vrais traitres, s’ils existent, il faudra aller les chercher ailleurs que chez nos chers et vaillants tirailleurs. Ils sont chez les sénégalais lambdas post-indépendance et dont la plupart, après avoir été envoyés faire des études de haut niveau dans les grandes écoles européennes et d’ ailleurs aux frais du contribuable sénégalais (SVP) et qui, au terme de leurs formations, ont opté de rester en France, en Europe et ailleurs plutôt que de revenir au pays qui a tant besoin de leur expertise pour se construire. La majorité de ces expatriés restent avec armes, bagages et familles loin du territoire national préférant surfer sur les vagues d’exploits scientifiques, professionnels, sportifs et autres qui ne nous valent que des valorisations par procuration du genre : « un sénégalais est lauréat de tel grand prix etc… » Mais qui n’apportent aucune plus value au pays réel en termes de ristournes de développement.
Et pire, ces vrais renégats très prompts à la critique acerbe et aux leçons de choses, n’ont même pas l’élégance intellectuelle et morale de rembourser les fonds publics qui auront servi à financer leurs études sous forme de bourses d’Etat. Ils demeurent perdus pour le pays nouvellement indépendant qui pourtant, aurait tant besoin de leur «technical know-how» pour son développement.
J’ose croire, PROFESSEUR que vous ne faites pas partie de cette engeance là.
Les TRAITRES, les vrais, ils sont dans les administrations, les armées, les sociétés nationales, les ONG et autres structures et ils travaillent méthodiquement et consciencieusement à asseoir l’hégémon Français sur nos institutions, nos richesses, notre culture etc… au détriment de leur pays devenu INDEPENDANT et cherchant sa voie vers le développement. VOILA LES TRAITRES , LES VRAIS TRAITRES …ET ILS SONT NOMBREUX NAK…
A l’inverse de nos TIRAILLEURS qu’on voudrait trainer dans la boue et qui avaient l’excuse de croire très profondément qu’ils étaient des Français à part entière et qu’ils défendaient les intérêts de la mère Patrie, ceux-là ne peuvent exciper d’aucune excuse ni circonstance atténuante pour justifier leurs comportements de TRAITRES à la Nation sénégalaise devenue indépendante depuis plus de soixante ans.
Ceux- là sont les vrais TRAITRES et pas nos vaillants TIRAILLEURS.
Il appartiendra aux nouvelles Autorités, dans le cadre de la mise en œuvre des 3J : JUB- JUBBEL- JUBENTII, de traquer et de débusquer tous ces TRAITRES, véritables «Big Eye » de la France, masqués et tapis dans les dédales de toutes les structures de notre pays pour les mettre hors d’état de nuire et acter la RUPTURE tant désirée par le peuple souverain.
Pour terminer Cher Professeur, je vois que vous êtes un Chercheur. « Des chercheurs qui cherchent on en trouve mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche. »
Je vous souhaite d’être un chercheur qui trouve plutôt qu’un chercheur qui se cherche.
Qu’ALLAH nous garde, Garde le Sénégal et bénisse nos vaillants TIRAILLEURS qui, les premiers, ont fait le DON DE SOI pour la Patrie. AMIIINNNEEE…
JAJEFFETTI…
DAKAR, Le 24/12/2024
Guimba KONATE
DAKAR
guimba.konate@gmail.com