NETTALI.COM - Le gouvernement compte jouer à fond la carte de la vérité et de la transparence. C'est ce qui ressort en tout cas du discours du Premier ministre Ousmane Sonko, lors de la déclaration de politique générale du vendredi 27 décembre. L’objectif est de lutter contre la fraude fiscale et l’évitement fiscal. Dans ce cadre, des réformes profondes relatives aux codes des impôts et des douanes ont été annoncées par le Premier ministre.
Pour lui, cette question est essentielle dans le cadre de l’ambition de mobiliser plus de ressources domestiques pour financer l'économie ; ce qui est loin d'être le cas. “Aujourd’hui, soutient le Premier ministre, nous sommes à un taux de pression fiscale d’un peu moins de 18 %, en deçà du ratio de 20 % fixé par le critère de convergence de l’UEMOA. Notre ambition est d’atteindre et de maintenir un taux de pression fiscale supérieur ou au moins égal à 20 %, ce qui correspondrait à des recettes additionnelles de plusieurs centaines de milliards annuelles”.
À en croire l'ancien l’inspecteur des impôts, cet objectif est bien à portée de main, avec des régies financières performantes et purgées des maux qui les gangrènent. Pour y parvenir, il engage son gouvernement à lutter contre les niches fiscales.
Concrètement, le PM mise sur la rationalisation des dépenses fiscales, afin de réduire progressivement l’impact des exonérations sur la mobilisation des recettes, tout en restaurant des marges budgétaires pour le financement de la politique économique et sociale.
Pour relever ce défi de la mobilisation des recettes, le gouvernement procèdera à l’évaluation de l'impact économique et social des avantages fiscaux des exonérations. “Aujourd’hui, ajoute le Premier ministre, l’analyse des données sur les dépenses fiscales donne l’impression d’une générosité sans contrôle de l’État pour des résultats dont l’efficacité n’est pas démontrée”.
2 232 milliards de dépenses fiscales, entre 2019 et 2022
Sur la période 2019-2022, informe le PM, ces dépenses s’élèvent à 2 232 milliards F CFA. Outre les dépenses fiscales, le gouvernement mise également sur la rationalisation des exonérations relatives, notamment, à l’impôt sur les sociétés des cimenteries ; à l’impôt sur le revenu, notamment par une réactualisation du barème progressif ; aux consommations de la tranche sociale des livraisons d'eau et d'électricité pour ne viser que les consommateurs les plus défavorisés.
Dans le même sillage, il sera procédé à l’évaluation des 18 conventions fiscales conclues par le Sénégal. “Cette politique est un véritable boulevard à la fraude et à l’évasion fiscales. C’est pourquoi, conformément aux directives du président de la République, nous procèderons au retrait du Sénégal de toute convention bilatérale avec un paradis fiscal et renégocierons les clauses défavorables des conventions conclues avec des États à fiscalité normale (c’est le cas notamment des conventions de non double imposition avec certains pays)”, soutient Ousmane Sonko.
Le gouvernement compte, dans la même veine, lancer le chantier de la rationalisation des mesures dérogatoires éparpillées dans plusieurs textes (Code minier, zones franches industrielles, régime de l’entreprise franche d’exportation, Code pétrolier, Code des télécommunications, Code des investissements, etc.), et leur rapatriement dans un seul corpus qu’est le Code général des impôts, qui sera un chantier prioritaire.
Pour le Premier ministre, la stratégie pour une fiscalité efficace est d'élargir l'assiette fiscale tout en abaissant graduellement les taux d'imposition moyens. Dans ce cadre, le gouvernement accorde une attention toute particulière à des secteurs à fort potentiel tels que l’immobilier, le foncier et l’informel.
Taxation des appels entrants sur la table dès le premier trimestre 2025
Le Premier ministre a aussi informé de la volonté de son gouvernement à réinstaurer le dispositif de contrôle et de taxation des appels entrants supprimé en 2012 par Macky Sall. “Initialement, la taxation sur les appels entrants devait permettre à l’État d’engranger des recettes parafiscales de l’ordre de 50 milliards F CFA par année. Ce cadeau fiscal bien généreux ne se fondait sur aucun argument techniquement documenté et économiquement justifié, si ce n’est le respect d’engagements de campagne auprès du patronat étranger du secteur des télécommunications”.
Selon Ousmane Sonko, ce renoncement a fait perdre au Trésor public des centaines de milliards F CFA, de 2012 à 2024. “Mon gouvernement s’engage, dès ce premier trimestre 2025, à remettre sur la table cette question. Une étude documentée, impliquant toutes les parties prenantes (ministère chargé des Télécommunications, ministère chargé des Finances, ARTP, Direction générale des Impôts et des Domaines, opérateurs de téléphonie, associations consuméristes) sera réalisée”.
Dans le même sillage, des mesures fortes ont également été annoncées pour une gouvernance encore plus moderne de l'Administration des douanes. Là également, des travaux seront entamés pour l'élaboration d'un nouveau code.